Congo : la marche en avant d’une jeune démocratie
Contre toute attente, le camp de Joseph Kabila, président élu en novembre dernier, a remporté haut la main les élections provinciales au Congo. La surprise est venue des provinces de Kinshasa et du Bas-Congo (ouest du pays), qui s’étaient montrées lors de l’élection présidentielle extrêmement méfiantes vis-à-vis du pouvoir kabiliste et ont apporté leurs suffrages au parti présidentiel.
Ce résultat, qui intervient après les élections à l’Assemblée nationale et au Sénat, achève de concentrer tous les pouvoirs dans les mains du jeune président, qui devient pour de bon l’homme fort de ce pays-continent, grand comme cinq fois la France et doté d’immenses richesses minières. Il étonne les observateurs par son ampleur, les assemblées locales récemment élues à Kinshasa et au Bas-Congo étant majoritairement acquises au parti de Jean-Pierre Bemba, rival malheureux de Kabila aux élections de novembre. Pour assurer la stabilité du pays, il reste maintenant au Premier Ministre désigné, Antoine Gizenga, à former un gouvernement ; les tractations sont plus longues que prévues, et aboutiront sans doute à un grand nombre de ministres et secrétaires d’Etat (on parle de soixante), contrairement aux voeux formulés par la Communauté internationale (expression mystérieuse sous laquelle se cachent essentiellement les pays occidentaux qui exploitent sans vergogne les mines de l’est du pays).
Les résultats de ces dernières élections inquiètent ceux qui espéraient que des pouvoirs régionaux forts seraient un contrepoids efficace à un Joseph Kabila dont beaucoup dénoncent l’inexpérience et les liens avec les puissances étrangères qui occupent encore les provinces de l’est. Arrivé au pouvoir par hasard (il est, semble-t-il, le fils adoptif de l’ancien président Kabila, assassiné pendant la guerre sans qu’on ait retrouvé les coupables ni les commanditaires du crime ), Joseph Kabila a su, non sans habileté, se maintenir au pouvoir et finalement se faire élire à une confortable majorité. Il va devoir s’affronter à présent aux multiples défis de la reconstruction du pays, ruiné par sept ans d’une guerre qui a fait quatre millions de morts.
Le retour de la démocratie au Congo est une nouvelle étape importante vers le retour à la paix en Afrique centrale. Le Congo est le pays qui a le plus souffert d’un interminable conflit, provoquant la convoitise de ses voisins par ses immenses richesses. Il est dépositaire des plus grandes réserves mondiales de cuivre, mais aussi de réserves d’uranium, de diamant, et de coltan, un métal rare qui entre dans la composition des puces informatiques.
Un signal fort vient d’être donné avec la mise en accusation et le début du procès de Thomas Lubanga, premier criminel de guerre à être jugé par la Cour Pénale Internationale de La Haye pour avoir enrôlé de force des enfants-soldats. Les magistrats de La Haye ont établi le rôle des pays voisins dans les crimes perpétrés par Lubanga, nommant ouvertement l’Ouganda et rappelant les soupçons qui pèsent sur le Rwanda. C’est en réalité vers ce dernier pays que se tournent tous les regards : c’est en effet le Rwanda qui est à l’origine de l’invasion et du pillage de son grand voisin, prenant prétexte de la poursuite de génocidaires pour se lancer dans une guerre-éclair qui a abouti à la situation actuelle. Le procès de La Haye est le début d’un travail de mémoire à l’échelle du continent africain, dont on espère qu’il permettra de faire la lumière sur les circonstances de ce terrible conflit.
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