Daniel Ellsberg : « Comment Obama trompe l’Amérique »
Le général McChrystal chef des opérations de l’OTAN en Afghanistan, à propos des victimes civiles des opérations de l’OTAN :
« Nous avons tué un nombre incroyable de gens dont aucun, à ma connaissance, ne s’est avéré être une menace »
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Le propos est un peu surprenant mais le monde sera rassuré, Barack Obama a la confiance de Nicolas Sarkozy : « Quan’t’y’dit [telle chose], Moi je le crois ». Pour le reste, les américains rigolent encore.
C’est vrai, le président Obama inspire la confiance hors des États-Unis. La confiance du comité norvégien Nobel pour la Paix tout d’abord. C’était avant l’effort d’intensification de la guerre en Afghanistan (la « contre-offensive » de la province d’Helmand) et la décision d’envoyer 30 000 hommes en renfort des 70 000 déjà en place
« Face au terrorisme, nous ne pouvons pas nous diviser » assure encore M. Sarkozy à l’université Columbia. Mais qu’est ce que le terrorisme au juste ? Voilà ce que déclarait récemment (voir The New York Times du 26 mars 2010) le général McChrystal chef des opérations de l’OTAN en Afghanistan, à propos des victimes civiles des opérations de l’OTAN :
« Nous avons tué un nombre incroyable de gens dont aucun, à ma connaissance, ne s’est avéré être une menace »
Mesurera-t-on jamais la portée d’une telle déclaration ? Imaginez votre famille se mettant « à l’abri » dans sa maison mais recevant une roquette mettant fin aussi bien à la maison qu’à la famille. Et pourtant votre famille avait juste suivi la recommandation qu’une armée occupante – mais qui répète sans arrêt être votre amie – lui avait faite.
« Nous avons été attaqué le 11/09 de manière particulièrement brutale ».
Ce rappel des attentats de New York à l’avion détourné fait partie du discours de Barack Obama aux soldats américains lors de la visite éclair de leur président le dimanche 28 mars. Certes, mais est-on encore sûr que l’Amérique a été attaquée par les talibans actuels qu’elle entend continuer à combattre jusque, au moins, fin 2011 (pouvoir donner une échéance, les militaires en avaient rêvés, Obama l’a fait) ? En tout cas, le seul rescapé de votre famille qui vient de rejoindre un groupe de résistants à l’occupant, lui, vous le savez bien, n’était pas en Amérique en septembre 2001.
Et puis lutter contre le terrorisme passe aussi par soutenir un gouvernement (islamique, soit dit en passant) à la corruption avérée et reconnue par ses alliés, et dont les revenus sont de plus en plus liés à la narco-économie. Soutenir ce gouvernement c’est aussi le rendre complètement dépendant du soutien militaire américain.
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Alors augmenter aujourd’hui les troupes en Afghanistan et partir fin 2011 ? Non, c’est irréaliste, ils y seront encore en 2015 et peut être toujours en Irak également.
Et qui dit cela ? C’est l’ambassadeur américain en Afghanistan, Karl Eikenberry, précédemment général chef des opérations américaines dans ce pays, qui l’a écrit dans un rapport secret à Barak Obama en novembre 2009. Rapport très confidentiel qui a cependant « fui » dans le New York Times en janvier dernier dû à l’indélicatesse d’un officiel américain.
Mais, hélas pour le Congrès américain qui autorisa les crédits à Barak Obama pour intensifier les combats en Afghanistan, les parlementaires américains ont pris leur décision sans avoir eu connaissance du rapport de l’ambassadeur Eikenberry
D’après Daniel Ellsberg en personne, les analyses contenues dans ce rapport sont aussi défavorables à la guerre (qui dévient petit à petit la guerre d’Obama - ce sont les termes de D. Ellsberg) que les documents militaires secrets américains que Daniel Ellsberg révéla à la presse en 1971 (The Pentagon Papers), révélation qui participa à la décision de retrait américain du Vietnam l’année suivante.
L’interview de Daniel Ellsberg par la journaliste Amy Goodman(*) est disponible sur le site Democracy Now ! (www.democracynow.org : the war and peace report), édition du 30 mars 2010 : Our President Is Deceiving the American Public.
(*) Amy Goodman est fondatrice de la chaîne d’information indépendante Democracy Now !. Après avoir réchappé d’un massacre, avec un autre journaliste américain, au Timor oriental en 1992 où elle avait tenté de s’interposer, elle révéla à l‘Amérique les tueries perpétrées par l’armée indonésienne, avec soutien des États-Unis, de la population timoraise (200 000 morts, soit le tiers de la population de la partie est de l’île, anciennement colonie portugaise). Depuis elle n’a de cesse de dénoncer les dégâts causés par la politique extérieure américaine et déclare que Henry Kissinger, autre Prix Nobel de la Paix, devrait être traduit devant la justice internationale.
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