Le concurrent challenger de Hamid Karzai, Abdullah Abdullah a déclaré forfait il y a deux jours pour le second tour de la Présidentielle. Motif : il n’était pas pleinement assuré de la partialité du scrutin.
Et c’est étonnant, vu que le président de la commission électorale, Daoud Ali Najafi, a été nommé par le gouvernement. Abdullah demandait en vain sa démission. De plus, il estimait que les risques de fraude étaient trop grands.
Hamid Karzai sera donc le seul candidat en lice pour le second tour.
Sera ?
Hé bien non. Il n’y aura pas de second tour. Le même président de la commission électorale vient de décider que le second tour était inutile. Hamid Karzaï est par conséquent déclaré vainqueur de la présidentielle. Pas de temps à perdre !
Il est vrai que, sans la présence d’un concurrent, un second tour aurait été une tache sur la légitimité du candidat. Et le risque était trop grand dans un pays dévasté par les querelles de pouvoir.
Mais, sans deuxième tour, on touche le fond. Bien entendu, les autorités afghanes expliquent que l’organisation d’un second tour aurait couté cher à un gouvernement déjà financièrement exsangue.
Pas plus cher que les produits d’une seule récolte d’un champ de pavot de quelques hectares à 10 km de Kaboul, faudrait-il préciser, mais cher quand même !
Et, en plus, la menace que faisaient peser les Talibans durant le second tour a profondément ému le président de la commission électorale. Il a ainsi voulu "protéger la population".
Mais si, puisqu’on vous le dit !
Cette nouvelle, annoncée le jour de l’arrivée de Ban Ki Mon, a forcé ce dernier à saluer l’annulation du second tour et à féliciter le vainqueur. Il parait qu’il avait quand même le sourire.
Kouchner aussi. Car chaque pays membre de la coalition sentait vraiment mal ces élections. Le coup de force du gouvernement afghan de ce jour leur retire un immense épine du pied. Et tant pis pour les principes !
Ces gens peinent à expliquer en quoi Hamid Karzaï sera plus légitime au soir du premier tour plutôt qu’au second. Mais il n’est pas indispensable de s’embarrasser de détails.
Il faut savoir en avaler, des couleuvres, à ce niveau.
Hamid Karzai est donc élu avec 48 % des voix et sans deuxième tour. L’Afghanistan vient d’inventer le scrutin proportionnel à un tour. La France pourrait peut-être s’en inspirer pour les prochaines élections des conseillers territoriaux.
L’actuel Président Afghan, entouré comme chacun le sait, d’une corruption telle qu’elle bloque pour longtemps tout espoir d’amélioration, va gouverner un pays déchiré par la guerre civile, avec une armée de coalition qui hésite, perd des hommes, de l’argent et du temps.
Mais puisque Saint Obama, prix Nobel de la Paix 2009, a décidé que c’était là le seul avenir du monde libre, il n’y a plus qu’à s’exécuter.
Et l’on se prend à songer que, finalement, la démocratie n’est pas un concept facilement délocalisable.