Diplomatie et relations internationales autour du Tibet : la patience du Dalaï-lama
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Lors de la visite du Dalaï-lama début octobre aux USA, il n’a pas rencontré le président américain Barack Obama, lequel s’est vu décerné le prix Nobel de la paix durant cette même période. Si l’on peut regretter ce qui ressemble à un manque de courage, il faut se souvenir que jusqu’en 1979, les Etats-Unis décourageait le Dalaï-lama de demander un visa, et ce n’est que depuis 1991 qu’il a pu rencontrer un président américain en exercice. Bien sûr, le président Obama a été critiqué par une partie de la classe politique américaine pour n’avoir pas reçu le leader tibétain. Obama doit se rendre à Pékin en novembre prochain et souhaite visiblement ménager la grande susceptibilité des autorités chinoises.
Un précédent nominé au prix Nobel de la paix, l’ancien président tchèque Vaclav Havel a quand à lui analysé ainsi la situation : « Si le frais émoulu Prix Nobel de la paix reporte cette rencontre pour après sa visite en Chine continentale, il fera ainsi un tout petit et discret compromis, un compromis qui a peut-être une certaine logique. Pourtant, une question se pose de savoir si justement ces petits et discrets compromis, plus ou moins logiques, ne constituent pas une origine primordiale, un prélude, une première petite source des grands compromis fatals ». On se souvient de la colère de Pékin après que le président français ait rencontré le Dalaï-lama en décembre 2008, et bien qu’il s’était abstenu de le rencontrer en août 2008, alors que le leader tibétain était en visite en France, et que Nicolas Sarkozy devait se rendre à la cérémonie d’ouverture des jeux olympiques d’été à Pékin.
De son côté, lors de sa visite à Washington, le Dalaï-lama s’est exprimé, d’une part pour féliciter le président Obama pour son prix Nobel de la Paix, et d’autre part pour affirmer qu’il ne souhaitait pas perturber les relations entre la Chine et les Etats-Unis, et n’était pas déçu de ne pas le rencontrer cette fois-ci. Et ce d’autant qu’il y a eu des contacts avec le président américain par des canaux confidentiels, et qu’une coordinatrice américaine pour le Tibet, Maria Otero, a été nommé lors de sa visite aux USA. Ainsi, le Dalaï-lama déclarait : "Je crois qu’une bonne discussion vaut mieux qu’une belle photo". Le Dalaï-lama avait rencontré M. Obama en 2005, lorsqu’il était sénateur. La Maison Blanche a annoncé que M. Obama rencontrerait le leader tibétain avant la fin de l’année, démentant que l’administration américaine ait cédé aux pressions de la Chine en ne prévoyant une telle rencontre qu’après la visite de M. Obama à Pékin.
Près de 60 ans après l’annexion du Tibet par la République populaire de Chine, la question tibétaine n’est toujours pas résolue, mais il faut reconnaître aux USA une évolution certaine sur cette question. Bien qu’en France nous demandions depuis plus de 10 ans la nomination d’un Rapporteur européen pour le Tibet, ce point n’est toujours pas obtenu, et ce n’est qu’en 2008 que pour la première fois un président français, Nicolas Sarkozy, rencontra officiellement le Dalaï-lama. Si « Yes We Can » était le slogan de Barack Obama lors de sa campagne présidentielle, celui du Dalaï-lama est bien « Yes We Can Wait », transformant la frustration en un trésor de vertus, celles de la patience et de la persévérance.
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