Égypte : Au nom de la langue de bois
Après une visite éclair au sommet de l'Union africaine, le 30 janvier 2011, à Addis-Abeba, on aurait attendu de Nicolas Sarkozy, une position claire tant sur la Côte-d'Ivoire, la Tunisie que l'Égypte, mais que de paroles creuses, de battages et de boniments, dont il est passé expert. Comme tous les autres dirigeants de la « communauté internationale », la prudence est de mise. Il ne faut pas vendre très tôt, la peau d'un briscard de la trempe de Moubarak. Cette diplomatie mondiale, qui néanmoins semblait se préoccuper de la démocratie et tous ses corollaires est devenue soudainement muette, quant à l'envoi des casques bleus, d'une force internationale pour bouter, pas un des moindres autocrates d'Afrique.
Afrique de paradoxes
Dans ma chronique du 15 juillet 2010, lors du cinquantenaire des indépendances, je trouvais que la France et voire tous les colonisateurs, étaient bourrés de paradoxes. Des paradoxes qui témoignent d’un climat de suspicion généralisée dans le monde de la gouvernance, lesquels autorisent et nourrissent fantasmes, rumeurs et inquiétudes, et empêchent de s’en tenir aux réalités quotidiennes, auxquelles sont confrontées les populations africaines. Moins de bonne gouvernance, absence totale de démocratie ; crimes politiques. Des paradoxes qui disent surtout la complexité d’une France « irréprochable », qui se complaît dans le discours et fuit la réalité. Une France qui fête les « indépendances », tout en embrigadant, une partie de ses colonies, par le droit de la force. Sur la dizaine des chefs d'États présent ce 30 janvier à Addis Abeba, presque tous se sont imposés par la force. Dans son discours, Sarkozy, prétend être du côté des peuples et de tous ceux qui aspirent à la liberté. Ce son de cloche est-il valable aussi pour des dictateurs comme Compaoré, des liberticides comme Wade ou des bandits à col blancs qui sont poursuivis pour des « biens mal acquis » ?
N'en déplaise aux donneurs de leçons, et aux démocrates de circonstances des capitales occidentales, le cinquantenaire des indépendances en Afrique, est une mauvaise chose, pour les amateurs du statu quo et du néocolonialisme. Si un des triptyques qui caractérise une démocratie:presse libre, liberté d'association et le suffrage universel, n'est pas la chose la mieux partagée en Égypte, il n'en demeure pas moins vrai que la « communauté internationale » n'a pas soufflé un mot, quant au désarroi dans lequel le peuple égyptien est plongé depuis plusieurs décennies. Le cinquantenaire est donc ce réveil des peuples, face à l'hibernation et au mensonge des colons. Et, surtout, la reprise en main de leurs colonies appelées, États. L'Afrique doit aller vers son destin et ne plus se laisser assombrir par une liberté de façade dont se prévalent les prévaricateurs de l'Afrique.
La vraie indépendance
L'indépendance de l'Afrique s'est acquise à bras fort. Mais, contrairement à ce qu'on pourrait penser, les plus réfractaires à l'autonomie de l'Afrique, ce furent les Africains ; on n'a qu'à voir comment certains leaders indépendantistes on été jetés dans la gueule du loup : Um nyobé, N'krumah, Lumumba, etc.
A voir aussi la physionomie qui se dessine cinquante ans plus tard, est identique. On a déshabillé l'Afrique de ses leaders charismatiques, pour l'habiller de dirigeants à la solde des satrapes tapis dans l'ombre. On n'a qu'à voir le nombre de villas, hôtels particuliers, comptes bancaires, qui renflouent les trésoreries occidentales.
Il n'est non plus aveuglant de voir les enfants de la nouvelle classe d'esclavagistes arpenter les universités les plus huppées des grandes économies, tandis que dans leurs pays, il n' y a pas d'écoles, d'universités, d'enseignants.
Il ne faut pas être de mauvaise foi, pour voir combien ces agents d'exécution, se faire soigner dans les hôpitaux des plus chics d'Europe et d'Amérique, par contre dans leurs États respectifs, il n'y a ni hôpitaux, encore moins de personnel soignant.
Nous avons entendu parler du droit d'ingérence de cette « communauté internationale », voilà des cas d'école qu'ils ont sur la table. Nous défions aussi ce même Sarkozy, avec ses pouvoirs supranationaux et régaliens, de nous sortir de l'impasse dans laquelle nous sommes plongés.
Au lieu de récupérer les victoires que les peuples se sont offertes les mains nues, il est temps qu'il prête ses gants et qu'on mette tous la main dans le cambouis.
Aimé Mathurin Moussy
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