Escalade de la terreur du régime de Kiev dans le Donbass
Il ne fait aucun doute que la responsabilité de l'escalade actuelle dans le Donbass, en violation des accords de Minsk 2 du 11 février 2015, incombe au régime qui s'est mis en place à Kiev après le putsch militaire du 22 février 2014, voici trois ans, et particulièrement au président Porochenko.
Il ne fait aucun doute que la responsabilité de l'escalade actuelle dans le Donbass, en violation des accords de Minsk 2 du 11 février 2015, incombe au régime qui s'est mis en place à Kiev après le putsch militaire du 22 février 2014, voici trois ans, et particulièrement au président Porochenko. Il s'était pourtant fait élire, dans des conditions contestables, en mai 2014 sur des promesses de paix dans le Donbass dans un délai de trois semaines, alors que l'opération "anti-terroriste" avait été déclenchée par les putschistes quelques semaines auparavant. Porochenko pense ainsi pouvoir trouver une solution à une situation intérieure catastrophique causée par un échec sur le plan économique, suite à l'accord d'association avec l'UE et la rupture des liens structurels avec la Russie, et par l'échec de la lutte contre la corruption, dont il est le premier bénéficiaire, alors qu'il est devenu minoritaire à la Rada après la défection de ses alliés des partis radical et Samopomotch ainsi que celle du parti Baktivchina de Timochenko. Ainsi le régime de Kiev à bout de souffle cherche à trouver un regain de légitimité en jouant la carte de la terreur dans le Donbass, au moment où les cartes de la politique internationale sont rebattues après l'élection de Donald Trump aux Etats-Unis et avec une Union européenne qui s'enfonce toujours davantage dans la crise après le Brexit et dans la perspective des élections générales prochaines en France et en Allemagne.
La responsabilité du régime de Kiev dans l'escalade actuelle est en effet fixée par l'observation sur le terrain de la réalisation des accords de Minsk. A la réunion extraordinaire du Conseil de l'OSCE le 31 janvier dernier, le représentant permanent de la Fédération de Russie auprès de l'OSCE, Alexandre Loukachevitch, a révélé que "dans la nuit du 27 au 28 janvier, la caméra CMM (de l'OSCE, ndlr) de la mine Oktobrskaïa a enregistré qu'un échange de tirs intensifs avait été précédé d'un tir en provenance du nord-ouest en direction du sud-est (c'est-à-dire en provenance des positions des Forces armées ukrainiennes) (1). Dans la nuit du 28 au 29 janvier 15 tirs en provenance du nord-ouest en direction du sud-est, à nouveau à partir des positions des Forces armées ukrainiennes, enregistrés par caméras CMM, ont précédé un combat de plusieurs heures dans la zone industrielle d'Avdeevka (2). Le 30 janvier les structures de force ukrainiennes ont entrepris une nouvelle attaque massive et ont occupé une portion de terrain supplémentaire à proximité d'Avdeevka" (3). Après avoir également fait état de violations du cessez-le-feu imposé par Minsk 2 de la part de Kiev au sud la ligne de Front, sur le littoral de la mer d'Azov entre Marioupol contrôlé par Kiev et Novoazovsk contrôlé par la RPD, Loukachevitch a précisé que "les statistiques d'enregistrement des caméras CMM montrent que la majorité des occurrences des tirs de tanks ou de pièces d'artillerie - quand il a été possible aux observateurs d'enregistrer la direction des tirs - incombent aux structures de forces ukrainiennes (200 infractions (4) de la part des Forces armées ukrainiennes, 80 de la part de la milice du Donbass)" (3).
Porochenko se trouvait à ce moment-là Berlin, pour y plaider notamment une reconduction des sanctions contre la Russie alors que le commanditaire américain fait défaut depuis l'élection de Donald Trump, lequel n'a pas caché vouloir les lever et entreprendre des relations constructives avec la Russie après la très néocon période Clinton-Bush-Obama. Dans une mise en scène pitoyable et perverse, comme le régime de Kiev nous y a habitués depuis trois ans, il décide alors soudain d'écourter sa visite pour rentrer coordonner les opérations d'évacuation d'Avdeevka, menacée de catastrophe humanitaire du fait de la destruction des services de distribution de gaz et d'électricité, que la propagande ukrainienne voudrait faire passer pour un "Alep 2". Le montage plutôt grossier est rapidement éventé, comme sur une vidéo montrant une habitante d'Avdeevka faussement éplorée entre un militaire qui a du mal à prendre un air compatissant et un personnage tournant le dos pour ostensiblement présenter à la caméra son sigle humanitaire Caritas, sur fond de tentes pour réfugiés qui ne se bousculent pas au portillon (5). La pleureuse d'occasion s'avère en fait une fonctionnaire de Marioupol en service commandé.
Le fait est que les combats, qui ont fait de nombreuses victimes notamment du côté des forces ukrainiennes engagées inconsidérément et du fait des tirs de barrage des détachements néo-nazis du Pravy sektor (6), se sont déroulés en milieu urbain et ont touchés les infrastructures civiles, notamment la station de filtrage de l'eau de Donetsk, privant d'eau toute une partie de la ville. Ce qui prouve le caractère irresponsable des stratèges de Kiev, et leur volonté de semer la terreur dans la population du Donbass, de mener une guerre contre elle pour la faire plier. Rappelons que le Donbass s'est insurgé après le coup d'Etat du 22 février 2014, mené par la petite minorité bandériste et galicienne de l'ouest de l'Ukraine, appuyée par l'Amérique néocon et une UE sous influence polonaise, qui a menacé les droits des russophones. Après avoir dans un premier temps réclamé une décentralisation et une fédéralisation, contre quoi les putschistes leur ont envoyé les tanks, l'aviation ainsi que les bataillons néo-nazis, la population du Donbass n'a pas eu d'autre solution que de prendre les armes et d'instaurer les Républiques populaires de Lougansk et Donetsk alors que la Crimée, République autonome et très majoritairement russophone, décidait par referendum son rattachement à la Fédération de Russie.
Suite aux différentes phases des combats qui ont mené à la stabilisation du front, les accords de Minsk 2 en février 2015 ont prévu un cessez le feu, le retrait des armes lourdes, l'échange des prisonniers et surtout une modification de la constitution promouvant une large décentralisation, en accord avec les intéressés sur le plan local, en clair des discussions entre Kiev d'une part, et Donetsk et Lougansk d'autre part, préalable à la tenue d'élections locales. Or Kiev ne s'est jamais résolue à effectuer cette révision constitutionnelle dans le cadre de discussions directes avec Lougansk et Donetsk, qui seule permettrait de maintenir l'unité de la population ukrainienne dans sa diversité ethnique, religieuse, culturelle et linguistique. En clair, une fédéralisation de l'Ukraine. Au lieu de cela, violant les accords de Minsk en en faisant porter de façon puérile la responsabilité aux Républiques populaires qui se sont constituée en réaction à sa politique, elle aggrave la politique de terreur constitutive du pouvoir qui s'est installé à Kiev en février 2014 par la violence et le déni du droit.
Les 30 et 31 janvier, les services de renseignement du ministère de la Défense de RPD note la concentration de systèmes de lance-roquettes multiples Grad du côté ukrainien, interdits par Minsk 2. Outre les nombreuses victimes militaires, les bombardements sur les infrastructures civiles et les habitations font six morts et 13 blessés dans la population. Selon les chiffres du commandement opérationnel de la RPD, les 2411 tirs observés viennent des positions occupées par les néo-nazis du Pravy sektor. Dans un crescendo terroriste, les forces de Kiev lancent un raid d'artillerie sur Donetsk et jusqu'au centre de la ville dans la nuit du 2 au 3 février : "deux civils sont tués et 13 sont blessés par des tirs de systèmes lance-roquettes multiples Grad et Uragan. On a observé jusqu'à 3500 tirs sur 28 localités" (7). Les habitants ont d'ailleurs remarqué la fuite de Donetsk des observateurs de l'OSCE au matin du 2 février, qu'ils ont fixée par vidéo (8), un hasard ? Après la nuit de bombardements, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, déclarait lors d'un point presse : "Ce raid barbare ne peut aucunement être justifié. Avec de telles actions, Kiev a violé de manière flagrante la Convention de Genève du 12 août 1949 sur la protection des populations civiles en temps de guerre, mais également toutes les normes de la morale. Seuls des vandales peuvent bombarder une ville endormie et des gens innocents. Nous n’avons pas d’autre définition pour les gens qui ont commis ce raid ". Après une accalmie, les tirs ont depuis régulièrement repris sur Donetsk et le front sud.
Mais le climat de terreur imposé par le régime de Kiev concerne aussi la population sous son contrôle. Les bandes néo-nazies y font régner leur loi comme dans la presse où les assassinats de journalistes, comme ceux restés impunis d'Oles Bouzina ou de Pavel Cheremet, s'accompagnent d'occupations violentes et de mise à sac de rédactions, comme celle de la chaîne de télé Inter qualifiée de pro-russe en septembre dernier. Les massacres du Maïdan, prétexte au coup d'Etat, et d'Odessa, dont le responsable présumé, Andreï Parouby, trône sur le perchoir de la Rada, n'ont toujours pas été instruits, de même que le l'abattage du Boeing de la Malaysia airlines, vraisemblablement une autre provocation criminelle du régime de Kiev. L'alignement sur les prix européens du gaz et de l'électricité, ainsi que ceux de la téléphonie, frappe directement une population harassée, à qui l'on avait fait miroiter le rêve européen. C'est dans ce contexte qu'un projet de loi a été porté à la Rada le 21 janvier dernier par un groupe de députés, sur l'exclusivité de la langue ukrainienne "dans l'ensemble des organes d'État et des institutions scolaires et universitaires du pays, ainsi que dans les médias, maisons d'éditions, activités culturelles et dans le secteur des services dans son intégralité" (10). Récemment, le chef du parti polonais nationaliste au pouvoir actuellement Jaroslav Kaczynski, à lui-même souligné : "qu'il était question "d'un certain choix de l'Ukraine", rappelant que même s'il était difficile de surpasser la cruauté dont avaient fait preuve les dirigeants allemands pendant la Seconde guerre mondiale, l'OUN (Organisation des nationalistes ukrainiens) et l'UPA (Armée insurrectionnelle ukrainienne) avaient réussi à le faire", précisant : ""J'ai dit clairement au président Porochenko qu'ils n'entreraient pas dans l'Europe avec Bandera. C'est parfaitement clair pour moi. Nous avons fait preuve d'une immense patience mais tout a des limites" (11). Le même très euro-sceptique Kaczynski avait pourtant triomphalement défilé à Kiev en présence de ceux-là mêmes qui aujourd'hui réhabilitent l'OUN-UPA et leurs dirigeants Bandera et Choukevitch.
La redistribution des cartes dans les relations internationales, avec le probable retrait des Etats-Unis des affaires du continent européen suite à l'élection du président Trump, place les dirigeants de l'Ouest européen devant leurs responsabilités. L'Union européenne en tant que telle ne constitue pas une puissance diplomatique et militaire capable de résister aux chocs de l'histoire au Moyen-Orient et au coeur de l'Europe, alors qu'ils sont provoqués par la politique irresponsable de certains de ses Etats membres, à commencer par la France, en Ukraine, en Libye et en Syrie, avec pour conséquence une crise migratoire qui vient aggraver le défaut d'intégration des population immigrées musulmanes et le terrorisme islamiste. Il n'est pas possible dans ce contexte de laisser Kiev continuer à diviser le continent et à y installer durablement en son centre un foyer de tensions et de conflits, que les populations paient durement. Des sanctions doivent être prises : contre les dirigeants de l'Ouest européen qui nous ont menés là, en dépit du bon sens et de la raison qui était de négocier avec la Russie des accords de partenariat avec l'Ukraine si tant est qu'ils n'aient pas eu pour objet de créer une fracture au coeur du continent. Et surtout des sanctions contre Porochenko et consorts, qui depuis deux ans ont apporté la preuve de leur entêtement à ne pas respecter ce à quoi les engageaient les accords de Minsk 2.
Frédéric Saillot, le 11 février 2017
(1) Voir la reproduction du plan sur la page d'accueil : la caméra d'observation de l'OSCE se trouve à mi-distance entre Orlovka, contrôlée par Kiev et d'où provenaient les tirs, et Donetsk, en face d'Avdeevka, contrôlée en majeure partie par Kiev.
(2) Zone tampon entre Avdeevka, dont le centre est contrôlé par Kiev, et Yasinovataïa, agglomération au nord de Donetsk, contrôlée par la République populaire de Donetsk (RPD).
(3) 1131st Special Meeting of the Permanent Council (of the OSCE) PC.DEL/119/17, 1 February 2017. Rapport transmis par Pavel Goubarev, lors de l'interview disponible sur la chaîne Youtube d'Eurasie Express : https://www.youtube.com/watch?v=EqdoY8voi9o
(4) i. e. aux accords de Minsk.
(5) Même pour ceux qui ne comprennent pas le russe, la vidéo est parlante : https://ria.ru/world/20170202/1487032451.html
(6) http://novorossia.today/video-le-debut-descalades-ukrainienne-dans-le-donbass-en-images-du-terrain/
(7) Donetsk 3/02 - Ria Novosti.
(8) https://m.lenta.ru/news/2017/02/03/tam_ne_strelyaet_vsu/
(9) Sputnik 3/02.
(10) Sputnik 23/01.
(11) https://fr.sputniknews.com/presse/201702071029976947-ukraine-europe-bandera-kaczynski/
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