On peut ne retenir des résultats de mardi que les victoires d’Hillary Clinton et Donald Trump, qui semblent s’imposer dans la course à l’investiture. Mais on peut aussi voir dans les résultats une profonde, mais aussi salutaire, volonté de changement des électeurs qui bousculent l’ordre établi.

Nouvel uppercut pour les élites politiques
Côté démocrate, alors que lors des premières élections, malgré trois victoires, Hillary Clinton était présentée comme en grande difficulté,
son succès dans sept Etats contre quatre pour son adversaire, en fait la grande vainqueur. Pourtant, son adversaire n’est pas défait et il continue la lutte,
un résultat étonnant tant il semble loin du centre politique du pays, à moins justement qu’il n’ait contribué à le déplacer. Car son programme (
mise en place d’un taux d’imposition sur le revenu maximal de 67% - comparable à celui des années 1970-, universités gratuites et déprivatisation de la Sécurité Sociale) le place à gauche de
la politique que mène la gauche pseudo radicale de Syriza en Grèce. On peut y voir le signe d’un grand basculement idéologique de la jeunesse aux Etats-Unis,
où Bernie Sanders triomphe.
Côté républicain,
la panique semble s’emparer des dirigeants du parti, qui ne savent plus à qui se donner pour faire barrage à Donald Trump, qui gagne lui aussi 7 Etats, contre deux à Ted Cruz et 1 à Marco Rubio. Ce faisant, les électeurs des primaires envoient un véritable message de révolte contre leurs dirigeants puisque
Ted Cruz n’est pas plus tendre que Donald Trump à leur égard. Son succès est intéressant car
il tient un discours plus complexe qu’il n’y paraît. S’il est conservateur sur les questions de société, avec sa proposition de construire un mur entre les Etats-Unis et le Mexique, en revanche, sur l’économie, il est presque centriste, tenant un discours plus équilibré que les autres républicains,
comme l’avait noté Paul Krugman, qui l’avait jugé plus raisonnable et progressiste.
Donald Trump tient également un discours très protectionniste,
dénonçant, à raison, les conséquences de l’ouverture aux produits venus de Chine, et proposant la mise en place de droits de douane à 45% ! Mardi, Il a aussi déclaré qu’il va «
créer des millions d’emplois ici en faisant en sorte par exemple qu’Apple fabrique ses IPhone en Amérique et pas en Chine », reprenant les raisonnements du
Brésil et de l’Argentine, qui ont souvent imposé aux multinationales d’y construire des usines pour y vendre, ou plus généralement,
de ce que fait une bonne partie de l’Asie. Ce faisant, outre le fait de gagner la primaire républicaine, il pourrait devenir un adversaire redoutable pour Hillary Clinton, même si sa popularité auprès des femmes, des dits hispaniques et des noirs représente un atout non négligeable.
Bien sûr, les outrances de Trump ne donnent envie qu’il s’installe à la Maison Blanche, mais finalement, face à une Hillary Clinton qui ne changerait pas grand chose (ses idées pour financer les études supérieures sont effarantes), on en viendrait presque à se dire qu’il est un choix plus raisonnable.