Gbagbo le grand patriote ?
Deuxième volet de cette série d’articles sur la Cote d’Ivoire. Si Ouattara semble être plus légitime que Gbagbo comme président, est-il le président qu’il faut à la Côte d’Ivoire, est-il le plus démocrate des deux ? est-il celui qui défendra le mieux les intérêts de la Côte d’Ivoire ?
Gbagbo le nouveau Sankara ?
La réponse à cette question est : toute proportion gardée, partiellement. En effet, quand vous interrogez les Burkinabè sur leur illustre président, ils tirent deux conclusions principales :
- Il était patriote et avait de bons objectifs pour son pays
- Mais il s’y prenait très mal pour les atteindre
Aussi, là où il peut y avoir divergence entre Gbagbo et Sankara, c’est sur le fait que quasiment personne n’a jamais accusé Sankara ou son entourage de s’être enrichis personnellement. Chose dont ne peut se prévaloir Gbagbo.
Tout ce qui s'est passé depuis le 28 novembre nous montre que Ouattara est en mission pour servir les intérêts étrangers. Ouattara est-il le candidat de l’étranger ?
Ouattara est indubitablement plus le candidat de l’étranger que Gbagbo, car même si ce dernier protège également les intérêts étrangers dans certains cas (cf. Bolloré/Bouygues en CI), du fait de son rejet par l'occident, il est naturellement amené à ne pas accepter certaines demandes occidentales sans les combattre.
Néanmoins ce qu’il faut garder à l’esprit c’est que les intérêts de la Côte d’Ivoire passent parfois par les intérêts de l’étranger. Ce point qui semble trivial n’est pourtant pas encore compris par beaucoup de personnes et ses implications encore moins. Dès lors il faut se poser objectivement la question de savoir si le « nationalisme » de Gbagbo sert mieux les intérêts de la Ci que « l’internationalisme » de Ouattara ?
Pour répondre à cette question, deux éléments méritent d’être rappelés :
a. L’essor économique de la Côte d’Ivoire est essentiellement dû à la politique de Félix Houphouët Boigny, d’ouverture maximale aux investissements étrangers (français principalement) et à la main d’œuvre des autres pays de la sous région. En effet, comme de multiples exemples en Afrique (Guinée, Congo Démocratique, Nigeria) l’ont montré, il ne suffit pas d’avoir une terre fertile ou des ressources naturelles abondantes, il faut pouvoir les mettre en valeur grâce au capital et aux hommes.
b. La crise économique qu’a connue la Côte d’Ivoire a partir des années 80 est due essentiellement au manque de diversification de l’économie et au manque de valeur ajoutée dans ses exportations. Cette situation étant due au fait qu’Houphouët avait négligé le fait que si la France et les USA allaient en effet toujours acheter les matières premières de l’ex colonie, ils n’allaient pas se soucier de son réel développement, n’investiront que pour augmenter les exportations de produits à faible valeur ajoutée et ne l’aideraient que de manière limitée lors des crises (la Cote d’Ivoire n’était pas dans l’UE comme l’est la Grèce d’aujourd’hui).
Il est donc clair qu’il ne s’agit ni de se clamer d’un patriotisme exacerbé ni de se jeter inconsciemment dans les bras de l’étranger. Un juste milieu doit être trouvé entre satisfaction des intérêts étrangers et ce que le pays peut obtenir en retour. Là il convient de dire clairement que Gbagbo malgré/grâce à toute sa rhétorique patriotique était plus à même de défendre les intérêts ivoiriens de par son parcours politique (il n’est pas un homme du "sérail" comme Ouattara l’est) et comme l’a montré sa gestion de la Côte d’Ivoire durant ces années de crises où la Côte d’Ivoire est parvenue au point d’achèvement lui permettant de bénéficier de 3 milliards de dollars de réduction de dette. Malheureusement pour la Côte d’Ivoire, ses actions lors des 3 dernières semaines ont grandement réduit sa légitimité sur la scène internationale. Quand bien même il parviendrait à demeurer au pouvoir, la Côte d’Ivoire vivrait coupée du reste du monde pendant quelques mois ou années, chose que l’économie ivoirienne pourrait difficilement supporter comme l’ont rappelé la Chambre de Commerce et d’Industrie et le patronat ivoirien récemment.
Dès lors, aujourd’hui, si le "candidat de la Côte d’Ivoire" est le candidat qui retardera le pays et si le "candidat de l’étranger" est celui qui permettra au pays d’avancer vers le développement, lequel est celui qui défendra mieux les intérêts du pays ? C'est plutot cette question que les ivoiriens et africains devraient se poser et non pas s'arrêter aux parcours politiques des uns et des autres ou aux déclarations des uns et des autres pour décider de qui est plus patriote que qui.
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