Il y a plus de mosquées que d’écoles en Turquie
Le quotidien turc Birgün (13.12.23 www.birgun.net) publie un article avec le titre ci-dessus, relatif au nombre des mosquées en Turquie. Plus précisément, le journal dit que le nombre de mosquées en Turquie dépasse le nombre d'écoles.
Aujourd’hui il y a dans le pays 28 568 de mosquées de plus que d’écoles publiques. Avec plus d'une mosquée construite dans presque chaque quartier, quels que soient les besoins, le nombre total de mosquées en Turquie a atteint les 89 302, tandis que le nombre d'écoles publiques s’élève à 60 734, malgré le problème des classes à double niveau et de la surpopulation des classes d'enseignement, déplore le quotidien.
Selon les données du ministère turc de l'Éducation, l'année scolaire 2022-2023 s'est terminée avec 60.734 écoles publiques, dont 11 716 jardins d'enfants, 23 117 écoles élémentaires, 16 640 collèges et 9 261 lycées. Le nombre total des écoles privées en Turquie est de 13 501 ; ces écoles sont très majoritairement contrôlées par les confréries musulmanes.
Selon les données de la Direction des Affaires religieuses, la ville comptant le plus grand nombre de mosquées était Istanbul, suivie d'Ankara, Izmir, Antalya et Bursa.
Rappelons brièvement l’histoire : Après les années Atatürk et l’instauration d’une République laïque une politique différente du régime ottoman en matière d’enseignement fut adoptée. Atatürk essayait de contrôler l’Islam et de promouvoir un régime laïc avec la suppression du califat, la fermeture des écoles religieuses, l'interdiction des confréries dont les biens sont confisqués, entre autres.
Dans les années 1940, le régime républicain a commencé à changer de politique vis-à-vis de la religion. Nombre de politiciens adopta une autre approche face à l’islam, considérant que, dans le domaine de la religion, le gouvernement n’avait pas pu combler le vide qui s’était créé suite à la suppression de l’enseignement religieux. Il proposa par conséquent, sous contrôle de l’État, de créer une éducation à la religion dont les limites seraient déterminées par l’État qui exercerait un contrôle strict de cette éducation.
Le coup d’État du 12 septembre 1980 fut un tournant important dans les rapports entre enseignement et éducation religieuse : le régime militaire instauré après le coup d’État, pensait que l’islam pouvait être une solution contre toutes les idéologies qu’il considérait comme extrémistes ainsi qu’un moyen pour assurer l’unité nationale et la paix sociale. En soutenant l’islam modéré, toujours sous le contrôle de l’État, le régime militaire pensait pouvoir combattre plus efficacement l’extrême gauche, l’extrême droite ainsi que le séparatisme kurde. Ce régime croyait d’autre part on qu’il était possible de supprimer les activistes des mouvements radicaux sunnites[1].
Cependant, cette « ouverture » a donné la possibilité à l’islam politique de se développer et depuis les années quatre-vingt-dix, cet islam politique gagne du terrain en Turquie. Cette tendance fut renforcée davantage depuis la prise du pouvoir par l’AKP (2002) et Recep Tayyip Erdogan qui « rêve d’élever des générations pieuses » comme il se plait à dire.
Un autre facteur qui encourage l’islam politique en Turquie est la politique appliquée dans l’éducation nationale également depuis 1945 et renforcée depuis l’ère Erdogan : l’enseignement religieux délivré dans les I.mam Hatip (écoles religieuses) et les Kuran Kursu (écoles coraniques), ainsi que le cours de religion obligatoire d’après la Constitution de 1982.
[1] Voir également : https://journals.openedition.org/ries/1511
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