Invasions Turques
Selon la presse française, les choses sont simples :
Les Turcs sont dans le camp du bien et n'ont abattu le bombardier russe que pour se défendre. Les Russes se sont vengés en calomniant bassement Erdogan et en l'accusant de trafiquer du pétrole de l'ISIS. Les Kurdes se battent bravement contre l'Etat Islamique et sont donc justement soutenus par BHL.
Mais à la lecture de la presse étrangère, la situation semble plus compliquée...
Début décembre, nos alliés turcs ont envoyé des militaires en Irak, pour créer une base près de Mossoul. Les turcs ont déjà établi plusieurs bases en Irak, pour un total de 3000 soldats. Officiellement, les turcs sont en Irak pour entrainer les kurdes, les turkmènes et les sunnites à combattre l'EI et sont là à l'invitation des kurdes irakiens. Le gouvernement irakien proteste contre cette violation de son territoire et menace de saisir l'ONU. Le chef spirituel des chiites irakiens, l'ayatollah Al-Sistani a appelé le gouvernement irakien à chasser l'envahisseur.
Mais les Turcs sont en Irak aussi pour d'autres raisons : Certains Kurdes vendent le pétrole de l'EI à la Turquie ; Vous avez bien lu : Le pétrole de l'EI transite à travers le Kurdistan Irakien pour être vendu à la Turquie. Une des bases turques est précisément établi dans la région de transit de ce pétrole. Erdogan protégerait il ses petites affaires ? En tout cas le monsieur veut une part du gâteau. Il veut être là et peser quand les kurdes et les sunnites libéreront Mossoul.
Il faut dire que les relations turco-kurdes en Irak sont plutot au beau fixe. Même si les conditions économique s'y sont dégradées, principalement en raison de disputes avec Bagdad, le Kurdistan irakien reste une région très dynamique économiquement, près de 100000 turcs y travaillent. Les structures gouvernementales kurdes irakiennes sont en banqueroute. Qui leur a prêté 500 millions de dollars ? Erdogan bien sur.
Les Kurdes contrôlent depuis juin 2014 la région pétrolière de Kirkouk, avec des réserves estimées à 10 milliards de barils.Pour exploiter le pétrole kurde, Erdogan a créé la TEC (Turkish Energy Co), une compagnie publique qui fait commerce du pétrole du Kurdistan irakien. Il voulait la privatiser et la vendre à des compagnies privées qui lui sont liées. Patatras, un bête scandale de corruption l'en empêche. Erdogan a suspendu les policiers en lien avec l'enquête mais la TEC est restée publique.
Pour mettre la main sur Kirkouk, en juin 2014, les Kurdes se seraient entendus avec l'EI. Le marché : Mossoul pour l'EI, son or et ses réserves d'armes offensives et Kirkuk pour les Kurdes de Barzani (et la capacité financière de devenir indépendant). Voyez la passivité des Kurdes en juin 2014, refusant de combattre à Mossoul contre l'EI, privilégiant la défense de leur région. Al-Maliki, le premier ministre de l'Irak, s'en était étranglé de rage. C'est quand l'EI va prendre Sinjar que les Kurdes vont vraiment combattre les islamistes. En mettant la main sur Kirkouk, les kurdes ont assuré des ressources qui devraient leur permettre de devenir indépendants, leur volonté depuis des décennies. Pour cette indépendance, ils ont besoin du pipeline turc pour exporter leur pétrole via le port turc de Ceyhan vers Israël. L'indépendance kurde signerait la fin de l'état irakien. Et les américains y sont opposés car un Irak sans kurdistan se jetterait dans les bras de l'Iran, le pays frère chiite.
Les États-Unis veulent engager les kurdes comme troupe au sol contre Daesh. Les kurdes sont peu pressés d'attaquer Mossoul, une région arabe et ne veulent pas combattre dans les autres zones arabes de l'Irak. Je serais Kurde irakien, je me méfierais des promesses que les Américains me font en ce moment...
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