Kamikazes à Alger
Les attentats terroristes survenus mercredi dernier à Alger, notamment contre le Palais du gouvernement, ont choqué les Algériens. Durant tout le week-end (jeudi et vendredi), les discussions ne portaient que sur ça. Et, à l’approche des élections législatives (le 17 mai prochain), on craint le pire !
Tout le monde en parle. Et il y a de quoi !
Dans les cafés, dans les rues, les souks, dans les médias (presse écrite, parlée, visuelle), enfin partout on en parle. Même les enfants, à l’école ou dans la rue, se sont mis de la partie et y vont chacun de son commentaire. Par la force des choses, ils deviennent politisés et savent très bien que le commanditaire de ces attentats n’est autre que Ben Laden qui, du fond des grottes de Tora Bora, donne des ordres aux "tangos" algériens. Nos enfants savent que le GSPC s’est lié à Al-Qaïda. Depuis quelques mois déjà. Eux, à qui on essaie de ne pas parler de ces choses-là, du terrorisme, des soldats tombés dans une embuscade, du pauvre paysan égorgé, de la femme enceinte éventrée et de son bébé enfourné, savent quand même que nos "tangos" ont prêté allégeance à la nébuleuse de Ben Laden. D’où ils tiennent ça ? Des discussions entre adultes certainement. Et ils se le disent entre eux.
Seuls nos hommes politiques font mine de croire au père Noël et, pire encore, de croire encore que "la réconciliation nationale" va apporter la paix tant espérée.
Il faut dire que "l’évènement" a été plus que choquant même si le terrorisme fait partie de notre vécu quotidien depuis plusieurs années maintenant. Même si la mort, entrée depuis longtemps maintenant dans une logique de banalité, frappait partout d’est en ouest mais pas du nord au sud.(1) Et c’est là que réside, certainement, notre erreur : on a banalisé la mort. Tant que les terroristes ne s’attaquaient qu’à des villageois isolés et sans défense, à Alger, nos gouvernants pensaient sérieusement avoir vaincu. Ayant la tête ailleurs ces jours-ci, ils ne prêtent plus attention aux dizaines de morts ça et là que rapporte la presse quotidiennement
Mais, force est d’admettre aujourd’hui que la bête immonde n’est que blessée. Et, après avoir pansé ses blessures, elle a su rebondir : près de deux tonnes de TNT au cœur même de notre capitale font voler en éclats nos espoirs quant à la paix retrouvée. Acculés dans les montagnes de Grande Kabylie, les "terros" essaient de desserrer l’étau en entreprenant des actions de kamikazes ailleurs, notamment à Alger où la vigilance n’est plus de mise depuis quelques mois, vous diront les spécialistes de la lutte antiterroriste. Mais, peut-on se contenter de cette explication ? Nous sommes à la veille d’élections législatives et il aurait fallu déclencher un plan Orsec pour ne pas dire un plan Vigipirate tel qu’il est pratiqué en France, par exemple. "Il est faux de dire le terrorisme est de retour. Le terrorisme ne s’est jamais arrêté et il est de plus en plus violent". (2)
Mais, contrairement aux années 90, une chose nous met du baume dans le cœur : la condamnation unanime par la communauté internationale de ces actes odieux et lâches en même temps. Même le conseil de sécurité des Nations unies s’est indigné cette fois-ci et a insisté sur le fait que "les auteurs de crimes doivent être traduits en justice". Comme après le "11 septembre", en ce 11 avril, le monde entier s’est levé pour dire "nous sommes tous algériens" ! La cause, notre cause, est enfin entendue !
Plus personne n’évoque le « qui tue qui » d’il y a quelques années car il va de soi que maintenant les choses bien claires : il ne s’agit pas d’une guerre entre un gouvernement fantoche et une opposition politique spoliée de sa victoire électorale mais d’une guerre qu’un groupuscule inféodé à « l’internationale terroriste » livre à tout un peuple qui a su pourtant être clément et réconciliant.
Aujourd’hui, Dieu merci, nous ne sommes plus seuls sur le front de ce combat interminable et qui, à la longue, commence à ressembler au travail de Sisyphe. En effet, il n’est pas facile de venir à bout d’un terrorisme transnational et sans visage qui ne se manifeste que par des actions sporadiques, mais des actions d’un impact médiatique certain.
(1) Le sud, qui représente « l’Algérie utile », celle du gaz et du pétrole, reste quand même à l’abri de ces attentats terroristes. Il est très sécurisé.
(2) Kamikazes à Alger ou la "paix" au cœur de la capitale. In le "Soir d’Algérie". Par Leîla Aslaoui.
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