La Chine, une manne céleste pour qui ?
Il y a de cela quinze ans, un homme d’affaires américain racontait à qui voulait bien l’entendre que s’il arrivait à vendre une bouteille de Coca par an à chaque Chinois, il vendrait un milliard de bouteilles, et que s’il superposait ces bouteilles l’une sur l’autre la dernière atteindrait la Lune.
En 2007, cette double métaphore est plus que jamais d’actualité. Le pétrole est à 70 dollars US le baril et les Chinois achètent sans compter. Les pays les plus industrialisés du monde se bousculent au portillon de la Chine. Le marché est plein de promesses ! D’ailleurs, en mai 2005, la Chine a approuvé la création de 525 400 entreprises à capitaux étrangers, pour un montant de 600 milliards de dollars. Une manne céleste. Enfin, l’ouverture au tourisme permet déjà à ce pays d’accueillir plus de 60 millions de voyageurs par an et, oh miracle, le Chinois découvre cette année le droit au passeport, le droit au voyage.
Actuellement, 1,3 milliard de Chinois occupent les trois versants de la Chine. La première de ces Chine est la plus visible, celle de la mégapole de Shanghai où pullulent gratte-ciel, haute technologie, mode, casinos et rois dollars.
Cette Chine au taux de croissance économique supérieur à 9 % attire tous les financiers de la planète et croît à une allure vertigineuse. La seconde Chine est l’ancestrale, la nourricière, la paysanne ou la très pauvre. Ici, le salaire d’un paysan est souvent le vingtième ou le centième de celui d’un Chinois de Shanghai, dont le port devient le premier du monde, déclassant Rotterdam au second rang mondial ! Cette Chine permet de maintenir des centaines de millions de pauvres chinois sur des terres souvent hostiles. La troisième Chine est un ersatz ou un relent à l’image de la vieille économie de la défunte URSS. Ici, on maintient le feu branlant des vieilles aciéries, par exemple, pour sauvegarder des salariés.
Mais la Chine qui s’est enfin réveillée et a happé au vent la deuxième place économique de la planète songe également à plusieurs voies d’expansion mondiale.
En Afrique, depuis 1970, la Chine vient au secours des pays déshérités. Elle déverse aujourd’hui son informatique et son industrie pharmaceutique à des prix défiant toute concurrence. Les commerçants chinois envahissent la majorité des petits commerces, déjouant souvent les Phéniciens avertis venant du Liban. Concurrençant la bonne vieille Europe, la Chine serait pour les Africains un « Golden bridge », un pont en or vers l’expansion.
De cette Afrique "apprivoisée" elle tirera les précieuses matières premières qui lui manquent ! Le pétrole du Darfour n’en serait pas étranger ! La pollution engendrée par ce pétrole bradé fera de la Chine un pollueur de poids ! Hélas !
Actuellement, 7 900 entreprises chinoises investissent dans 160 pays. Avec plus de 40 milliards de dollars par an, la Chine investit directement à l’étranger dans deux principaux domaines : les finances et l’industrie d’abord, telle cette société chinoise, la TCL, qui avale l’allemand Schneider et ses téléviseurs, le français Thomson et ses appareils électroménagers, qui en fait le premier fabricant de téléviseurs au monde avec 18 millions d’appareils par an, l’usine de réfrigérateurs du groupe Haier en Caroline du Sud aux Etats-Unis...et sa dernière stratégie est d’investir dans les domaines qui lui permettent d’acquérir les matières premières et agricoles.
Mais le fait le plus important et la carte maîtresse du gouvernement chinois sont ailleurs. Le peuple chinois est en effet le maillon fort de l’expansion nationale. Car il a su reprendre la recette de la réussite de certains prédécesseurs dans cette évolution de la construction, celle des États-Unis et du Japon par exemple, qui ont su combiner à leur juste dose trois ingrédients : le travail, la solidarité et la discipline.
Le choix de Pékin par le CIO pour l’organisation des Jeux olympiques de 2008, par 56 voix contre 22 pour Toronto, et 18 pour Istanbul, est peut-être une perche tendue au respect des droits de l’homme.
Sous les feux de l’actualité, la Chine qui a déjà avalé et digéré Hong Kong et Macao, freinera peut-être sa boulimie envers Taiwan et assouplira également le droit à l’expression.
Le jeune financier américain qui projetait de vendre une bouteille de Coca à chaque Chinois n’est-il pas aujourd’hui concurrencé par le jeune stratège chinois qui veut vendre un produit électronique par an à chacun des 6,3 milliards d’habitants de la planète ?
Puisse la Chine avancer dans la concorde et l’équité vers une nouvelle globalisation qui doterait le monde d’un troisième pôle équilibrant et rassurant... !
© R.T.
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