La France comme bouc-émissaire en Afrique
Depuis quelques années, le discours anti-Français a pris de l'ampleur dans les pays dits de la "Françafrique", c'est-à-dire les pays du Franc CFA et ceux du Maghreb francophone sur lesquels la France aurait toujours une hégémonie selon les tenants de ce discours. Qu'en est-il réellement de la présence française 60 ans après les indépendances ?
ARTICLE REPRIS SUR MON BLOG PERSONNEL : La France comme bouc-émissaire en Afrique - Yacine Chibane (over-blog.com)
Jeu d'influence et "bonne guerre"
Il est de bonne guerre que des puissances concurrentes avec la France en Afrique comme la Russie et la Chine mettent en œuvre une propagande anti-française dans une logique de contre-influence et d'expansion. En revanche, il est consternant de voir les masses populaires de plusieurs pays africains encore accuser la France de tous les maux encore 60 ans après et de croire que les Chinois et encore les Russes seraient plus "gentils" avec les Africains que la France ou l'Occident...
Pour revenir aux classiques de la géopolitique, une puissance défend ses intérêts et le rapport de force détermine le rapport entre les puissances loin de l'amour et de la haine. Par conséquent, ni la France, ni les USA, ni la Chine, ni la Russie ne veulent le bien de l'Afrique ou son malheur, mais uniquement leurs intérêts et il appartient aux Africains de défendre les leurs. Beaucoup de naïfs croient que Poutine voudrait le bien des Africains et que lorsque nous tomberons sous l'influence russe, les pays africains se développeraient comme par magie grâce à une tutelle bienveillante...
Il est absurde de croire que la Russie et la Chine développeront l'Afrique étant donné qu'elles-mêmes, surtout la Russie, sont en retard par rapport à l'Occident sur le plan économique d'une part, et qu'ils ne créeront pas une puissance émergente qui les concurrencerait à l'avenir d'autre part. La Chine a pour but de faire main basse sur les matières premières africaines pour maintenir son industrie et satisfaire sa forte demande énergétique de plus d'un milliard d'habitants. Quant à la milice russe de Wagner, il est insensé de croire que ce groupe de 25.000 hommes (en Afrique, en Ukraine et ailleurs) pourrait combattre le terrorisme sur des millions de kilomètres carrés au Sahel alors que des armées régulières peinent à le faire... Si la France n'était pas intervenue au Niger, au Mali ou en Centrafrique, on aurait risqué la prise de pouvoir dans ces pays par les djihadistes ou la fin de ces Etats, ce qui n'est pas souhaitable particulièrement pour les pays du Maghreb.
Mythe et obsolescence
La notion de "Françafrique" est largement obsolète et relève aujourd'hui de la légende urbaine. On accuse la France de vivre en volant les richesses de l'Afrique... D'abord, la majorité des pays qui n'ont jamais été colonisés par la France à l'instar du Kenya, du Soudan, de la Somalie ou du Mozambique, sont encore plus misérables que des pays dits de la Françafrique. Seraient-ils plus pénétrés par la France ? Leurs dirigeants sont-ils achetés par la France ? Non. Par conséquent, désigner la France comme le responsable des malheurs des Africains est une grossière escroquerie. Ensuite, il est nécessaire de s'en tenir aux faits : l'Afrique toutes nations confondues, ne représente que 5% du commerce extérieur français et moins de 1% pour les 14 pays de la zone Franc... Areva au Niger et Bolloré ne sont que des arbres qui cachent la forêt par rapport à toute l'économie française. La majorité de l'énergie consommée en France, dont l'uranium et les hydrocarbures ne proviennent pas non plus d'Afrique mais est diversifiée entre l'Asie centrale, l'Australie, les USA et les pays du Golfe.
La France ne vit absolument pas sur le dos de l'Afrique qui est elle-même improductive avec la corruption généralisée, l'analphabétisme, le tribalisme qui est cause d'instabilité, etc. Si l'économie française pèse 3000 milliards de dollars, ce n'est certainement pas en volant les Africains, mais par le travail de ses citoyens et habitants. L'honnêteté oblige à le reconnaître. En revanche, la France accorde annuellement plus de 2 milliards d'euros d'aides au développement pour les pays africains. Si des entrepreneurs français, Bolloré par exemple, profitent de la corruption pour se "sucrer" en Afrique, ce n'est pas la France en tant qu'Etat-nation qui faut accuser, mais le système kleptocratique qui règne dans ces pays et dont toutes les puissances en profitent.
Entre ces discours enflammés et la réalité économique, la France n'est un bouc-émissaire et un coupable idéal pour le ressentiment anti-colonial, mais force est de constater que la responsabilité de la France aujourd'hui est limitée et largement caricaturée. On peut affirmer pour finir que l'effondrement de la France n'est pas dans l'intérêt de ces pays puisqu'elle est le premier partenaire commercial et le premier pays de leur diaspora.
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