La révolution pacifique
En ce temps de révoltes du monde arabe, Tunisie/Égypte/Algérie/Maroc/Syrie/Jordanie/Yémen… qui peuvent être véritablement qualifiées de révolutions, tant les citoyens de ces pays sont déterminés, quitte à mourir pour se libérer du joug de leurs dirigeants et oppresseurs, ce qui est déjà accompli en Tunisie et qui est en passe de l’être en Égypte, pour les autres pays, l’avenir nous le dira.
Considérant la gravité des faits, presque toute l’actualité de notre pays et du monde est dirigée vers ces événements historiques, et c’est justifié, mais en ce même moment, il y a une autre révolution qui se produit sereinement en Islande, en Europe, chez nous, et manifestement cette révolution pacifique n’intéresse personne, puisque personne n’en parle.
Le courage et la détermination des Islandais méritent aussi d’être salués médiatiquement, et surtout leur révolution pacifique mérite d’être prise comme exemple, afin que plus personne ne meure pour obtenir ce en quoi chacun aspire et dont chacun a droit par la Loi ;
la sécurité pour sa personne et ses biens, la liberté d’exprimer ses opinions et ses idées différentes de celles des autorités sans qu’il n'y ait ingérence des autorités publiques, la liberté d’aller et venir sans que quiconque ne soit inquiété par les autorités du pays, etc.
Malheureusement l’histoire nous apprend que toutes les révolutions finissent tragiquement dans le sang et la douleur, et non pas comme cela se produisit en Islande, démocratiquement par une prise pacifique du palais présidentiel et du pouvoir.
Cette révolution pondérée est l’exception qui devrait confirmer la règle et non l’inverse, elle devrait ouvrir la voie à toutes les pseudo démocraties, qui ne se souviennent du peuple que lorsque vient le moment de voter, ensuite, enorgueillis d’avoir été choisis pour accomplir les tâches de gouvernances, les élus forts de cette légitimité se permettent tout et n’importe quoi, prétendant toujours agir au nom du peuple, et les électeurs induits dans l’erreur culpabiliseront jusqu'à la prochaine élection, assumant les nouvelles dettes publiques (1) comme siennes, car après tout, n’en sont-ils pas les responsables, ne les ont-ils pas élus pour qu’ils agissent en leurs noms ?
Un peuple qui se réapproprie pacifiquement les institutions et qui impose un référendum pour s’exprimer sur les dettes contractées par les banques et cautionnées par leurs gouvernants, voilà qui est innovant, pertinent et d’une logique implacable, en d’autres termes, puisque le citoyen est mis à contribution pour le remboursement des dettes publiques qu’il n’a pas contractées personnellement, il est donc naturel et fondamental d’avoir son opinion sur la question. CQFD. C’est aussi simple que ça.
Le résultat de ce référendum est que 93 % des votants se sont prononcés pour le non-remboursement des dettes bancaires, limogeant impartialement au passage, non pas un gouvernement, mais deux, le premier de droite et le second de gauche.
Si d’aventure cette question était posée en France, je gage que le pourcentage obtenu lors du référendum islandais serait aussi important chez nous. Mais nous pouvons continuer à rêver, cela n’arriverait jamais en France et nous continuerons à rembourser les dettes contractées par nos dirigeants, qui après tout n’agissent que pour notre bien et pour nous assurer un avenir meilleur, cependant, vu les dettes astronomiques laissées par nos gouvernants de droite, comme de gauche, et qui s’accumulent démesurément, qui peut sérieusement croire une ineptie pareille ?
Autre point fort de cette révolution pacifique, l’élection d’une assemblée constituante issue de la société civile, dont la tâche sera de traduire constitutionnellement les aspirations d’un peuple en colère contre un capitalisme débridé.
Vu les effets dominos et boules de neige provoqués par la révolution tunisienne au Maghreb, on comprend que les voisins plus ou moins éloignés de l’Islande, dont la France, n’ébruitent pas cette prise de pouvoir par la société civile islandaise craignant que la contagion ne gagne d’autres pays européens endettés jusqu’au cou.
Les Islandais nous montrent ce qu’est véritablement la démocratie, par le peuple et pour le peuple, celle qui n’a rien à voir avec notre démocratie de papier, bonne dans les textes, mais pas dans la pratique, car elle est souvent bafouée outrageusement par des gens sans scrupules, comme nos politiciens carriéristes, qui sont pour nombres d’entre eux embourbés dans des affaires politico-financières, voir délictuelles, se cachant immédiatement derrière la fonction pour prétendre n’avoir rien à se reprocher.
Et malheureusement pour nous, l’État veille sur eux, ils sont continuellement sauvés par de providentielles paroles démagogiques, vantant les principes démocratiques qui doivent les protéger de la vindicte du peuple, arguant la présomption d’innocence et d’autres principes fondamentaux, une présomption d’innocence mise à mal lorsqu’il s’agit de simples citoyens accusés à tort.
Une fois de plus ce n’est pas l’intelligence ou le savoir qui sont fondateurs de cette révolution pacifique, mais c’est tout simplement le bon sens et c’est bien de cela que nos hommes politiques manquent cruellement, car du savoir et de l’intelligence toutes nos grosses têtes politiques ne doivent pas en manquer, mais à quoi peut bien leur servir tout ce savoir et toute cette intelligence sans bon sens ?
Les résultats des fins de mandats présidentiels parlent d’eux même ; à rien d’autre qu’à fabriquer de la dette financière que les gens du peuple devront rembourser sans rechigner, à moins de suivre l’exemple islandais.
Petit rappel du « cadeau » que nous ont laissé nos infaillibles Présidents censés résoudre les problèmes et non les créer :
En 7 ans Monsieur Giscard d’Estaing a endetté la France de 110,1 milliards d’euros (INSEE)
En 14 ans Monsieur François Mitterrand a endetté la France de 552,7 milliards d’euros (INSEE)
En 12 ans Monsieur Jacques Chirac a endetté la France de 546,1 milliards d’euros (INSEE)
En 3 ans Monsieur Nicolas Sarkozy a endetté la France de 382,7 milliards d’euros (INSEE) soit une moyenne de 127,5 milliards d’euros par an, à la fin de ce mandat la dette sera approximativement de 637,5 milliards d’euros.
Si par malheur un deuxième mandat échouait à Monsieur Nicolas Sarkozy, à lui tout seul, il aura fait mieux que les trois autres réunis, 1208,9 milliards d’euros pour Giscard/Mitterrand/Chirac et 1275 milliards d’euros pour Monsieur Nicolas Sarkozy (si cette progression constante de la dette se maintenait).
Merci à nos amis islandais de nous avoir donné une leçon de démocratie participative et citoyenne, qui à défaut d’être suivie par d’autres peuples mériterait d’être popularisée et beaucoup plus médiatisée, même s’ils n’ont pas besoin de cela pour se maintenir au 2e rang de l’indice de démocratie (2) crée par le magazine The Economist.
Et pour ceux que cela intéresse, la France n’est même pas dans la catégorie des démocraties qui se respectent, elle n’est située qu’à la 31e place de ce classement, et la régression est constante, en 2010 elle fut rétrogradée du 24e au 31e rang, pour aboutir dans la catégorie des démocraties imparfaites. Si nous ne prenons pas garde, un jour nous trouverons la France dans la catégorie des régimes hybrides et qui sait, peut-être serons-nous en fin de ce classement, côte à côte avec la Corée du Nord.
Dans un monde en évolution constante, tout est possible, et il n’est donc pas impossible non plus qu’une nouvelle Révolution française voie un jour le jour, mais sera-t-elle pacifique comme l’Islandaise, violente comme la Tunisienne et l’Égyptienne, ou sanglante comme la première Révolution française (3) ?
À mon sens, le réveil sera douloureux.
Pour en savoir plus :
http://www.reporterre.net/spip.php?article1511
http://www.parisseveille.info/quand-l-islande-reinvente-la,2643.html
Sources :
1) http://fr.wikipedia.org/wiki/Dette_publique_de_la_France
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