Le gouvernement tunisien, sur la voie du changement ?
Ennahda, le parti majoritaire au Parlement semble prendre ses distances avec les salafistes
Le gouvernement tunisien lève l’ambiguïté sur ses relations avec les djihadistes. Le parti Ennahda, majoritaire au pouvoir, semble déterminer à lutter contre les islamistes extrémistes, qualifiés désormais de « terroristes ». Ennahda a longtemps laissé planer le doute sur ses intentions envers les partisans de la Charia. Les affrontements entre les forces de l’ordre et les partisans d’Ansar al-Charia dimanche 19 mai ont montré un nouveau visage du gouvernement, prêt à l’affrontement pour le respect de la loi et de l’Etat.
Confronté à des bandes armées affiliées à Al-Qaida à la frontière algérienne, à des menaces de « guerre » de la part d’Ansar al-Charia (les partisans de l’instauration de la Charia), le gouvernement a choisi de durcir le ton. C’est dans cette optique que le ministre de l’Intérieur, Ali Larayedh, a interdit le rassemblement de la mouvance islamiste prévu le 19 mai à Kairouan. Ne reconnaissant d’autorité que celle de dieu Ansar al-Charia a maintenu le rassemblement, le déplaçant dans les quartiers pauvres de Tunis. Les affrontements qui en ont résulté a entrainé plus de 200 interpellations et la mort de deux jeunes gens. Les dirigeants islamistes d’Ennadha justifient l’usage de la force contre les salafistes pour faire respecter la loi et l’autorité de l’Etat. Des responsables de l’opposition laïque, d’ordinaire très critiques ont salué la fermeté du parti.
Un long chemin à parcourir
Samir Dilou, ministre des Droits de l’Homme, reconnait qu’il y a un changement de ton de la part du gouvernement : « Le gouvernement a été laxiste. Je pense que la montée de la violence salafiste est le principal défi des mois à venir ». Le gouvernement tente de combattre les djihadistes dans les montagnes de l’Ouest tunisien mais les moyens sont limités et les pertes importantes. Cependant, reste à savoir si des actes politiques suivront les propos tenus par le gouvernement. En effet, en septembre 2012, après les attaques de l’ambassade américaine par des salafistes, une grande majorité des personnes interpellées avaient été libérées.
Pour Michael Ayari de l’International Crisis Group, la politique de répression engagée par le gouvernement pourrait se retourner contre lui et ne pas résoudre la question du terrorisme. « Le mouvement a réuni tous les déçus de la révolution et toute politique sécuritaire doit s’accompagner d’une politique sociale » selon M. Ayari. En effet, le phénomène djihadiste se développe dans les zones pauvres. Par ailleurs, tout comme durant le régime de Zine Abidine Ben Ali, le chômage et la pauvreté continuent à miner la Tunisie et la répression aveugle était aussi l’arme de l’ancien dictateur.
Le chemin vers la démocratie, la liberté de penser et de protester est encore long. L’emprisonnement d’Amina (jeune tunisienne membre de l’organisation féministe Femen) pour vandalisme et exhibition est selon l’organisation une « une répression politique grave en réponse à ses actions féministes anti-islamiques et anti-charia ». La jeune femme a osé manifester pour le droit des femmes tunisiennes en exhibant ses seins sur sa page Facebook, et en écrivant Femen sur le mur d’une mosquée de Kairouan pour manifester contre Ansar al-Charia. Amina risque plus de deux de prison pour avoir voulu protester.
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