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Le Pakistan dans le chaos : l’ombre de la Mosquée Rouge et d’Al Qaeda

Le Pakistan, pour le découvrir, il faut se plonger dans sa culture, sa vie politique, ses courants religieux, sa presse locale. On y découvre la part d’ombre de son régime, les peurs d’un peuple mais aussi ses espoirs... Aujourd’hui, plus encore, alors que le Pakistan a déclaré l’état d’urgence, il est important de mieux comprendre les tenants et aboutissants d’une situation qui peut malheureusement dégénérer. Tout semble avoir dérapé lors de la tragédie de la Mosquée Rouge qui ensanglanta Islamabad en juin dernier. Cette date est manifestement un tournant majeur de la politique de ce pays qui sombre dans une guerre civile programmée par les mollahs, mais également par des puissances étrangères. Ce texte veut rassembler l’ensemble des données nécessaires pour comprendre une nation « nucléaire » plongée dans une histoire douloureuse et minée par le terrorisme international.

Introduction

Le Pakistan est en train de vivre des moments délicats. Sorti « de la cuisse de l’Inde » en 1947, cette jeune nation islamique a eu à affronter des partitions meurtrières. On se rappelle des mots du jeune BHL visant à alerter la communauté internationale de la catastrophe Bangladhi. À l’époque, le Pakistan désespéré tentait de reprendre par une brutalité toute militaire un quart de son territoire qui lui échappait. Après cette cuisante débâcle, le Pakistan lorgna sur le Kashmir à dominante musulmane et sous l’autorité de l’Inde... Là, s’ensuivirent d’interminables escarmouches qui débouchèrent parfois sur des péripéties humiliantes pour le Pakistan : on rappellera la retraite de l’armée pakistanaise qui pourtant avait mené une campagne victorieuse au Kashmir en 1999 sous la pression internationale. Erreur fatale qui décida notamment le général Musharraf à évincer le chef de l’État Nawaz Sharif dont le pouvoir se confondait avec une corruption sans précédent couplée à des réformes islamisantes très anxiogènes pour l’Occident.

Mais le Pakistan reste également le premier pays musulman à s’être doté de l’arme nucléaire le 28 mai 1998 dont le concepteur Abdul Qadeer Khan est élevé en gloire nationale... Particularité donc d’un pays qui arrive à une excellence technologique et dont la population conserve un mode de vie quasi-médiéval. Contradiction d’un pays qui conduisit une femme, Benazir Buttoh, aux plus hautes fonctions exécutives alors que certains mouvements politiques soutiennent des positions très radicales ouvertement proches d’Al Qaeda.

Rappelons également l’étanchéité relative de la frontière Afghano-pakistanaise... Christophe de Pontfilly, reporter international, était d’ailleurs intarissable sur le sujet. Il mentionnait notamment « les avions pakistanais bombardant les troupes du général Massoud en juillet et en août 2000 autour de la ville de Taloqan ». Inversement il ajoutait que « des observateurs virent plus tard des hélicoptères faire des allers-retours entre des poches de combattants talibans et le Pakistan afin d’exfiltrer hors du champ des caméra la présence logistique pakistanaise et des islamistes de l’Afghanistan ». Enfin, les NWFP pakistanaises (régions tribales) servent toujours de position de repli aux Talibans à la suite de la bataille de Tora-Bora comme l’indique l’ambassadeur Robert Black Hill qui voyait en ces zones montagneuses « des sanctuaires terroristes et des provinces totalement ingouvernables » (21 octobre 2001). Elle fut un levier majeur de la survivance de la résistance talibane et surtout de l’autogénération des partisans d’Al Qaeda.

I- Un panorama politico-religieux pakistanais :

1-Les origines ethno-religieuses du Pakistan

Pour comprendre le Pakistan d’aujourd’hui, il faut scruter son « histoire immédiate ». Ainsi, le fondateur du Pakistan, Mohammed Ali Jinnah, fut un des pionniers de la « désislamisation » du Pakistan et de l’orientation du pays vers une forme de laïcité. Ceci n’était pas simple car 75 % de la population pakistanaise est sunnite. Ces derniers se divisent eux-mêmes en « Déobandi » et en « Barelvis ». Les premiers descendent spirituellement d’un courant né en Inde, au nord de Delhi au sein d’une madrasa (école coranique) établie dans la ville de « Deoband ». Dès 1867, cette madrasa influença la spiritualité des musulmans locaux dans une forme de prostration austère. Cette philosophie voyait la technologie, les influences extérieures comme néfaste à un islam recroquevillé sur lui-même. À partir de la création du Pakistan, les Déobandi bien qu’opposés à l’idée d’un État politique islamique pakistanais affluèrent vers les provinces du Balochistan, du Punjab, du Sindh ou enfin dans les zones tribales (NWFP). C’est d’ailleurs de ces madrasas à majorité Déobandi que sont issus les étudiants « talibans » et l’ossature du mouvement qui ravagea l’Afghanistan dès 1996. On rappellera la passion de certains dirigeants religieux Déobandi, comme Sami Ul Haq, issu de la fameuse madrasa Haqqaniya, qui se disait prêt à fermer son école coranique pour mener le Jihad en Afghanistan... Idem aussi pour les campagnes de « rééducation coranique » visant à nettoyer la ville de Baloch en 1998 de tout ce qui pouvait ressembler à un poste radio, à un magnétophone, à un téléviseur et de toute représentation incohérente avec la logique coranique radicale. Campagnes en effet récurrentes... Encore récemment les massacres de la Mosquée Rouge démarrèrent par une épuration des quartiers chauds d’Islamabad.

Face à ce fondamentalisme, une large majorité de Pakistanais se trouve plutôt assimilée au mouvement Barelvis. Il a vu jour dans la ville de Bareilly et plus précisément au sein d’une madrasa, la « Mullah Ahmad Raza Khan Barelvi ». La particularité de ces Barelvis est de s’accoutumer à l’islam classique et modéré, tout en acceptant des formes de vieilleries paganistes, permettant des croyances en des bienfaiteurs plus ou moins magiques. Au-delà de ces différences entre Barelvis et Deobandis, il faut souligner que les dirigeants politiques ont toujours su sentir les limites de réformes acceptables ou non par la population. Ainsi, lorsqu’un dirigeant désire se rapprocher du gouvernement américain, il tient compte de la réaction Déobandi qui ne se fait jamais attendre. Elle se limite le plus souvent à des manifestations relativement musclées. Mais rien de bien méchant car la large majorité des Pakistanais aime son confort, sa musique et les bons côtés de la vie. Même au fond des provinces les plus reculées, les Pakistanais savent écouter d’une oreille les activistes Déobandi ou les rengaines des mollah Barelvis tout en « faisant leur vie ».

L’étude de Richard Kurin permet de bien comprendre les réactions paradoxales et explosives de quelques courants pakistanais et d’apprécier la sagesse de la majeure partie la population. Richard Kurin a navigué pendant des années dans les villages les plus reculés du Pakistan. Chaque micro-société semble être une miniaturisation de cette volonté générale de vivre bien et de « faire avec » des particularismes sectaires que nous décrirons plus loin. Là, encore, il y a toute une dimension locale à ne pas négliger : ainsi dans certaines localités du Sindh un adultère ou un acte contraire à loi coranique conduira à une résolution expéditive et brutale du problème, ce qui ne sera pas le cas dans d’autres vallées qui auront des interprétations plus humaines du Coran. Les assemblées de villages (jirga) sont alors toutes puissantes, mais sont perçues par les Pakistanais comme une forme démocratique respectée.

2- Les particularismes religieux et les dirigeants pakistanais

Bon nombre de responsables politiques comme Mohammed Ali Jinnah voulurent une séparation de la religion et de l’État. On retrouve ainsi un texte daté du 11 août 1947 qui se révèle incontournable pour l’ensemble de la classe politique de l’époque. Ali Jinnah devant l’Assemblée nationale déclara « Vous êtes libres, libres d’aller à vos temples, libres d’aller à vos mosquées et n’importe où au sein du Pakistan. Vous pouvez appartenir à n’importe quelle caste, croyance, religion. Mais ceci n’a rien à voir avec les fonctions de l’État. Nous entamons un principe fondamental qui suppose que nous sommes tous des citoyens et des citoyens égaux d’un seul État ». Cette déclaration est donc cruciale dans la vision du Pakistan moderne, même si quelques dirigeants, portés par des résurgences islamiques radicales, ont tenté d’établir un État islamique, ont facilité le retour à la Charia, ont assoupli les mesures restrictives concernant l’éducation au sein de madrasas un peu trop extrémistes. Dès 1949, on note les diatribes du Mullah Sabbir Ahmed qui fustigeait ouvertement le principe « laïcisant » d’Ali Jinnah... Pour lui, l’islam n’est pas un code privé entre un « créateur » et son fidèle. Il est un code de vie, un code politique, religieux, social. Les deux mentalités modernistes et radicales étaient ainsi plantées très tôt dans le décor politique du jeune Pakistan. Le général Ayub Khan, en 1958, traita d’ « obscurantistes » les religieux qui voulaient « frustrer » de tous les progrès la population pakistanaise. Ayub critiqua les mœurs polygames qui menaient à la misère des villages entiers en s’appuyant sur le fait que trop d’hommes avaient abusé d’un pouvoir qui reposait essentiellement sur la capacité d’un être à faire vivre une descendance décemment. Il tenta même de changer le nom de la République islamique pakistanaise en République pakistanaise... Mais il se heurta à une série de poussées populaires orchestrées par des groupuscules très implantés et très structurés (rapport du général Lamballe) que nous aborderons plus loin. Face à ces montées de puritanisme et de religiosités tatillonnes, les successeurs d’Ali Jinnah et d’Ayub Khan eurent des attitudes différentes. Au cours des années 70, Zulikar Ali Bhutto joua sur les particularismes religieux pour prospérer et lâcha du lest en direction des instances cléricales les plus radicales. D’autres dirigeants choisirent de pactiser totalement avec les religieux et en vinrent à être plus « royalistes que le roi ». Le général Zia ul Haq, préoccupé par l’avancée des troupes soviétiques en Afghanistan, s’appuya sur les intégrismes et laissa progressivement le pouvoir des mollahs se redresser. Il alla même jusqu’à proposer une taxe, la « Zakat » basée sur une idée de redistribution financière émanant du Coran. On réécrivit les livres de classe à l’adresse des petits Pakistanais, la burqa fut largement plébiscitée au grand dam de ceux qui rêvaient d’un Pakistan moderniste. Au début des années 1990, la situation héritée par Benazir Bhutto et Nawaz Sharif obligea la classe politique à des compromis systématiques avec les religieux. Benazir Bhutto ne se focalisa pas le moins du monde sur la réduction des féodalismes religieux, mais perdit son énergie à justifier sa compétence en tant que femme. L’impact de Nawaz Sharif fut politiquement largement plus discutable. Outre le fait qu’il fut incapable de diriger son pays, il préconisa un retour à nouveau vers des fondamentaux religieux. Nawaz issu d’une famille de conservateur se rallia naturellement aux souhaits des mollahs. Il lança une réforme constitutionnelle visant à promulguer la Charia comme pierre angulaire du droit pakistanais. Ceci provoqua une inquiétude grandissante dans l’armée qui voyait aussi d’un très mauvais œil les atermoiements de Sharif dans la situation de Kargil au Kashmir. Aussi, le coup d’État de Musharraf puis plus tard la déflagration du 11-Septembre vinrent-ils changer la donne aux confins de Lahore, de Quetta, de Karahchi ou d’Islamabad. L’enjeu actuel est donc de maintenir le Pakistan dans une forme de régime stable et progressivement indépendant des structures religieuses radicales. Musharraf lui-même se considère comme progressiste. Il abhorre les partis islamiques et les résurgences d’un monde musulman archaïque. Ainsi, on rapporte l’anecdote d’une interview de Pervez à la BBC. Le journaliste demanda au Premier ministre s’il priait 5 fois par jour. Musharraf lança sereinement : « quand un père ne prie pas cinq fois par jour, pourquoi voulez-vous que le fils le fasse ». La modernité de Musharraf éclatait et sûrement faisait oublier le peu de marge de manœuvre que lui laisse la réal-politique pakistanaise.

3- Des partis politiques subversifs

Au-delà des différences ethnologiques existant entre Deobandis et Barelvis, le Pakistan doit composer avec des courants politiques internes très actifs voire des influences sectaires qui reposent sur des différences plus connues entre sunnites et shiites. Ainsi, par exemple, on compte des groupes comme le SSP (Sipah-e-Sahaba Pakistan), le TJP (Tehrik-e-Jafria Pakistan), le SMP (Sipah-e-Pakistan) qui ont le point commun de flirter avec la lutte armée et les coups de force violents. La violence par attentat a d’ailleurs été multipliée par 20 entre 1989 et 2001 au fur et à mesure de l’apparition de ces groupes... Plus violent encore, le Lashkar-e-Jangvi, issu du SSP, conduisit des campagnes militaires réitérées pour éliminer Nawar Sharif en 1999 et montra une détermination stupéfiante dans la poursuite de ses actions qui culmina dans un bain de sang en avril 2000. La mosquée de Rawalpindi fut ainsi la cible d’un groupe d’assaillants armés de grenades et d’armes automatiques... avec un bilan sombre, 19 morts et une trentaine de blessés. Enfin, pour compliquer la politique intérieure pakistanaise, on peut citer des partis religieux officiels qui canalisent une partie des radicalités du pays. L’Ulema-e-Islami (JUI) et le Jamat-e-Islami couvrent les régions des provinces tribales (NWFP) et la Balochistan, le premier ayant une implantation plus rurale que le deuxième. L’Ulema-e-Pakistan (JUP) qui après une série d’échecs électoraux s’est transformé en un groupe de pression islamique plus ou moins résilient. Chacun de ces partis apprécie les aberrations de la Charia... et se spécialisent dans des formes d’actions précises. Ainsi, le Jamat-e-Islami s’est spécialisé dans des mouvements d’opinions qui finissent souvent par des drapeaux américains brûlés sous la clameur des « Allah Akbar ». Mais encore une fois, ces foyers d’islamisme dur ne sont pas assez coalisés pour faire craindre une révolte populaire, les Pakistanais étant majoritairement proches du modernisme prôné par les instances dirigeantes actuelles. Ainsi, la politique pakistanaise est aussi complexe que nos groupuscules politiques européens. La nébuleuse des partis islamiques est aussi impressionnante que la noria de groupuscules d’extrême droite français qui existait au cours des années 30 ; rappelons l’Action française, les Croix de feux, les Volontaires nationaux... Cette analogie permet de se faire une idée globale de la variété du paysage politique pakistanais.

4- L’ISI, acteur principal de la « démocratie pakistanaise »

Un organe majeur de la stabilité politique du Pakistan réside en l’ISI, agence de renseignement nationale. Élément majeur du Pakistan moderne, vase communicant à l’infini, courroie de transmission politique, influençant ou influencée, infiltrée ou infiltrante. Que ce soit à Karachi, à Lahore ou Peshawar, elle est implantée. Elle est. Elle veille et surveille. L’Agence est redoutée par les Pakistanais. Personne n’aime à la nommer tellement elle est puissamment ancrée dans l’esprit des gens. Elle est également l’ossature de ces conflits politico-religieux. C’est elle qui rythme la vie de chaque habitant, qui s’immisce dans chaque madrasa, chaque Mosquée... Au courant de tout et au cœur de toute la politique actuelle du Pakistan moderne, l’ISI est incontournable, mais reste marquée par ses contradictions toutes pakistanaises. Ainsi, le chef de l’ISI en 2001 séjournait à New York le 11 septembre et fut démissionné très rapidement pour avoir des sympathies très poussées avec le Mollah Omar. L’agence de renseignement pakistanaise est elle aussi influencée par les partis islamiques et on ressent l’opacité de cette structure capable de faire condamner Omar Sheik, tout en assurant la survie des chefs de guerre talibans au sein de madrasas reculées du Wasziristan. Là encore, BHL montre combien l’ISI fut responsable d’un deal avec Omar Sheik dans son ouvrage vérité sur la mort d’un journaliste dont le seul travers était d’être né juif et Américain. Dans cette histoire, on découvre que pour l’ISI, une bonne vérité est celle qui l’arrange ou qu’elle arrange. Elle orchestre incessamment des pare-feux méandreux camouflant des compromissions avec Al Qaeda. L’ISI donc s’affirme comme une pieuvre responsable directement ou passivement d’attentats sur l’ensemble de la région indo-pakistanaise. En effet, elle fut d’ailleurs soupçonnée dans le maelström qui déchira une ville du sud de l’Inde qui vit exploser plusieurs camions piégés en simultané.

5-Les Madrasas

Mais, plus encore que l’ISI, il est important d’aborder le rôle des Madrasas. La question fondamentale du poids des madrasas revient incessamment dans la vie quotidienne des Pakistanais. Elles sont parfois le creuset d’un intégrisme dont les soubresauts se font ressentir autant dans les articles du Dawn que dans le Boston Globe ou l’International Herald Tribune. Ces écoles religieuses étaient pourtant estimées seulement à 250 au temps de l’indépendance du Pakistan. Avec l’invasion soviétique en Afghanistan, la situation et leur nombre changèrent. Elles fournirent les combattants les plus motivés contre l’armée rouge : ces célèbres Moudjahidins qui vinrent à bout du pouvoir communiste au fil d’une érosion des spetsnaz et autres bataillons soviétiques. Les madrasas alors virent des fonds étrangers affluer provenant de la CIA, des émirats, de l’Arabie saoudite... En 1987, on comptait environ 2 800 madrasas produisant déjà 30 000 « étudiants » chaque année. Un véritable cursus de Jihad organisé et structuré sous le regard approbateur de l’Occident... En 1995, une étude de la question des madrasas montra qu’elles étaient au nombre de 2 500 dans la seule région du Punjab. La croissance exponentielle continua jusqu’à l’avènement de Pervez Musharraf qui en 2001 fit état de 7 000 à 8 000 écoles produisant entre 700 000 ou 800 000 adeptes. Dans un article de Pervez Houdboy paru dans le Daily Times en juin dernier, le décompte frôlait les 10 000 structures religieuses totalement libres et globalement peu surveillées. Sur cet ensemble, Owen Bennet Jones (Pakistan, eye of the storm) fait néanmoins un rappel intéressant : le faible réseau d’écoles religieuses des années 47 s’est transformé en « système d’éducation parallèle » touchant un nombre très substantiel d’enfants pakistanais. Là où l’État de droit démissionne, les groupes religieux s’installent.

L’éducation proposée par certaines madrasas est bien évidemment orientée sur des principes religieux austères et anachroniques. Ainsi Owen Bennet Jones aime à rappeler que dans quelques écoles coraniques la médecine y est enseignée comme au XIe siècle et les manuels de géométrie sont calqués encore sur ceux du IIIe siècle... Un vrai retour aux sources, Euclide quasiment dans le texte... Bien sûr, un enseignement totalement inadapté pour une activité professionnelle quelconque. Pour la plupart des candidats au Jihad, la perspective d’un petit salaire suffit à les convaincre de traverser les frontières pour se battre contre des ennemis d’Allah. On retrouve également la clause ultime d’une prime de quelques centaines de dollars pour soulager les familles de martyres. Le prix d’une mort violente, déchiqueté par un obus ou partagé en deux par une rafale de mitrailleuse lourde. Abus de confiance ou d’inculture par une religion prise dans les méandres du jusqu’auboutisme. On est loin des cavaliers de Kessel toujours sur leurs montures glorieuses qui traversent l’Hindou Koush jusqu’aux confins du Pakistan voisin, criant « Allah » avec la joie de virtuoses équestres. Mais rappelons encore qu’il ne faut pas banaliser et associer l’extrémisme radical à toutes les madrasas. Ce ne serait pas correct vis-à-vis du Pakistan. D’ailleurs Christophe de Ponfilly, dans sa lettre ouverte à Joseph Kessel, mettaient en garde sur les raccourcis d’éditorialistes ou de reporter trop focalisés sur un point de thématique intégriste. Pontfilly dénonçait ainsi « ces journalistes qui allaient jusqu’à payer pour tourner dans les madrasas. Il fallait montrer l’image du mal, l’incarnation du méchant. Le mollah hystérique, celui qui avait la plus longue barbe et la plus sale gueule était au hit parade des sujets chocs... On annonçait (en 2001) déjà avec une sorte de jubilation malsaine l’imminence d’une explosion du monde musulman ». De même, il rappelle que « la moindre manifestation d’extrémistes bruyants, de provocateurs illuminés, de tarés vociférants, était aussitôt filmée sous tous les angles, de préférence au moment où les effigies de Georges Bush étaient piétinées et le drapeau américain brûlé ». Pontfilly conclut d’ailleurs que « les extrémistes sont partout minoritaires, les filmer c’est faire leur propagande »... Je retiendrai personnellement cette dernière remarque gravée dans l’imaginaire de nombreux journalistes. Néanmoins, il est toujours utile aussi d’enrichir cette réflexion de celle de BHL qui fit une incursion dans la madrasa de Binori Town (Qui a tué Daniel Pearl ?) : l’ambiance lourde d’une zone de non-droit avec des militants religieux armés, des dignitaires religieux ambigus et menaçants.

II-Le tournant historique du Pakistan et de la péninsule indo-pakistanaise.

1- La tragédie de la Mosquée Lal Masjid (Mosquée Rouge)

Il y aujourd’hui un problème avec les madrasas. Cette réalité est revenue à la surface en juin dernier au cours de la tragédie de la Mosquée Rouge et constitue probablement un tournant politique pour l’ensemble du Pakistan. Un reportage de Matthews Pennington, du 13 juillet dernier, montre l’intensité de l’assaut qui a eu lieu dans la Mosquée Rouge, plus connu sous le nom de Mosquée « Lal Masjid »... 87 victimes et trente-cinq heures de combats acharnés à la suite d’un mois de tergiversations ; bilan militaire aussi, 9 morts dans les services de sécurité et 40 blessés... Les journalistes ont visité les lieux des combats, ont d’abord traversé la « Jamia Hafsa », école de jeunes filles. À l’intérieur, les impacts de balles ont tout ravagé... Des fresques ont éclaté sous les tirs des commandos spéciaux, les sols, les plafonds, les murs sont constellés d’éclats, des bris en tout genres. Les militants religieux avaient sûrement préparé leur siège, prévoyant des chicanes bien fortifiées, des murs de sacs de sable encore présents et ayant amorti quelques charges sourdes des unités d’élites de l’armée pakistanaise. Une petite ville confinée dans un théâtre de guerre improvisée en plein Islamabad... Il faut alors imaginer ces chaussures en vrac dans les petites salles de classe, les livres déchiquetés par la mitraille, les échanges de coup de feu entre retranchés et troupes pakistanaises et au milieu des militantes, des fanatiques et des innocentes... Le major-général Waheed Arshad mentionnait aux journalistes quelques lieux bien tristes... tel endroit où une bombe humaine avait emporté six otages, empêchant toute reconnaissance des victimes pulvérisées par l’explosion en milieu confiné. Là, dans ces lieux d’études religieuses évidés par tant de heurts, seules les mouches continuaient à former des nuages gloutons et voraces... Encore, là, Arshad mû par une forme de somnambulisme hébété, arpentant les lieux connaît chaque recoin qui a vu partir en morceaux plusieurs kamikazes ceinturés par des kilos d’explosifs... Effarant, consternant... des explosifs artisanaux, des canettes de soda transformées en bombes infernales, des mitrailleuses, des lance-roquettes, des douzaines de pistolets de tous calibres, des dizaines d’AK-47, des radios, un arsenal lourd, arsenal réfléchi permettant de résister pendant ces deux jours furieux. Les lieux les plus retranchés et ceux qui auront été les plus durs à « nettoyer » ont été ceux occupés par Abdul Rashid Ghazi, l’un des deux frères qui avaient menés la rébellion islamiste en plein cœur d’Islamabad... Rappelons au passage que ce sont ces deux frères qui auront lancé une campagne de « vertu »... dénonçant la présence de « masseuses chinoises » très consciencieuses et menacées d’être défigurées à l’acide... Tout cela avec l’assentiment du grand dignitaire de la Mosquée Rouge, Maulana Abdul Aziz... Ce dernier, juste avant l’assaut final, avait d’ailleurs quitté cette mosquée en se déguisant en femme, mais avait été très aisément repéré par les forces de l’ordre. Cette anecdote mémorable avait fait sourire les Pakistanais dans leurs chaumières. Mais, plus sérieusement, pour Abdul Rashid, la mort avait été le choix, la seule solution acceptable, à l’image de son père Maulana Muhammad Abdullah qui périt pour cette même mosquée quelques années plus tôt...

Ce choix d’ailleurs avait été bien anticipé par une reporter du Herald Tribune qui quelques jours avant l’assaut avait fait un article sur l’angoisse des familles qui avaient envoyé leur progéniture étudier l’Urdu, la langue officielle, dans une école coranique digne, sévère et respectée... Ainsi, Carlotta Gall avait bien décrit le sentiment d’inquiétude montante de Manzur Ahmed, anonyme d’un jour mis en lumière par la prise d’otage de sa fille. Celui-ci avait voyagé et traversé tout le Punjab pour avoir des nouvelles de sa fille de 19 ans, Sumaya Tabbasum retenue prisonnière. Idem pour Misraddin, qui lui venait du Kashmir pour soutenir un frère blessé au pied dès les premiers échanges de tirs. Enfin, un dernier témoin du désastre, Malik Muhammad Ayub, 58 ans, originaire du fin fond du Waziristan qui avait envoyé son petit-fils travailler ses langues, devenir un honnête homme dans ces écoles, mais pas pour se battre contre un gouvernement ou des idées. La tragédie est donc ainsi, des enragés jouant sur la crédulité, l’innocence de gens sans histoire envoyés là pour faire leur éducation. Les quatre coins du Pakistan représentés dans un article fleuve d’une reporter américaine très « pro ». La suite est connue. Quelques images restée dans les mémoires. D’un côté, le général Musharraf se recueillant symboliquement devant la dépouille d’une colonne des forces spéciales tuée dans un assaut décisif. La mosquée criblée de balles qu’on repeindra en jaune pour effacer le passé. Dans la tension du moment, d’ailleurs, mettant en terre son frère dans son village en plein cœur du Penjab, le survivant Ghasi prédit au Pakistan une « révolution islamique imminente ». Le tournant politique du Pakistan est ainsi enclenché. En écho à cela, une série d’attentat aux camions piégés fut perpétrée aux quatre coins des régions du Sindh, Balochistans... réactions sourdes qui s’opèrent dans le « Pakistan féodal » dès que le pouvoir se fait trop stringent. Une querelle de chiffre plus macabre s’ensuivit. Qazi Hussain Ahmed, chef du Parti islamique, « le Jamaa-e-islami », déclara d’ailleurs qu’on pouvait pleurer entre 400 et 1 000 étudiants avec leurs professeurs. Il faut savoir pour corroborer ces chiffres légèrement surévalués que la madrasa réunissait jusqu’à 1 300 jeunes filles de 4 à 20 ans. La centaine de victimes officielles ne correspondait pas au va-et-vient des obsèques orchestrées en catimini par les agents très officiels de l’ISI...

2- Les origines internationales du drame de la Mosquée Rouge

Oui, le désastre de Lal Masjid est donc à l’interface de plusieurs intérêts, internationaux, locaux, particuliers... Certaines explications de cette tragédie sont en effet à rechercher à l’échelle internationale. D’une part la gesticulation de la Chine a poussé le gouvernement pakistanais à l’assaut sanglant. L’ambassadeur chinois contesta énergiquement le fait que ces jeunes « masseuses » chinoises prises en otages par les frères Ghazi puissent être des prostituées. La Chine mit la pression sur Musharraf pour les faire délivrer et régler durement le conflit. On rappellera que la Chine apprécie les régimes radicaux islamistes et qu’elle a déjà un passif soudanais que tout le monde connaît. Voudrait-elle déséquilibrer Musharraf pour mieux négocier avec un régime plus compréhensif ? Série de questions sans trop de réponse...

L’attitude trouble des chancelleries étrangères voyant d’un bon œil un divorce entre Musharraf et les islamistes est frappante. En effet, un pacte de non-agression plus ou moins tacite était toujours en vigueur depuis 2001 vis-à-vis des madrasas trop zélées en matière d’islam radical. Idem d’ailleurs pour la politique très laxiste du gouvernement pakistanais vis-à-vis des salafistes réfugiés au sein des zones tribales en direct contact avec l’Afghanistan. Ceci était donc mal vécu par les Américains et les Occidentaux qui espèrent beaucoup de la situation de crise au Pakistan pour expurger les régions tribales de leurs militants.

Le besoin de puissance des frères Ghazi est aussi un facteur clé... Essayant de renouer inconsciemment avec l’aura de leur père sacrificiel, les Ghazi sont allés délibérément « au contact ». Ces islamistes étaient convaincus de leur devoir de diriger la vie de leurs compatriotes... En face, la nécessité de régler le problème des extrêmes par Musharraf aura fait le reste. Musharraf petit homme au tempérament brutal, peu doué pour communiquer ce qu’il sent politiquement et ce qu’il veut, mais homme profondément persuadé que le chemin vers la démocratie dans son pays sera long et difficile...

3- Les répercussions du massacre de Lal Masjid

Désormais, la brutalité s’immisce dans tout au Pakistan. Ainsi, un hélicoptère d’escorte présidentielle explosa lors du dernier voyage éclair de Musharraf à Rawalimpi. Un dernier attentat retentissant a visé le retour triomphal de Benazir Buttho... Le carnage de Karachi a fait plus de 100 morts et 400 blessés dans la procession joyeuse venue accueillir l’exilée politique. Y a-t-il également une peur des islamistes radicaux devant la coalition Buttho-Musharraf, ces deux derniers étant déterminés à en découdre avec Al Qaeda et à en finir avec Ben Laden, probablement replié dans les régions tribales ?

En sourdine, il faut se souvenir des propos de Fran Towmsen, éminence grise du comité de sécurité à la Maison-Blanche, qui exigeait du Pakistan une politique plus active contre le terrorisme. Le 8 et 9 juillet dernier, elle prit la parole sur Fox New pour prévenir que si Musharraf ne prenait pas les devants contre Al Qeada, elle proposerait l’incursion de forces spéciales américaines au Pakistan... Message apparemment bien reçu étant donné qu’elle vient de féliciter le mois dernier le gouvernement pakistanais pour ses efforts dans la guerre contre le terrorisme. On a pu entendre ces derniers jours qu’une trentaine de militaires avait péri lors d’un assaut contre des talibans embusqués dans un nid d’aigle des régions tribales.

Faut-il d’ailleurs douter d’une autre analyse de Fran Townsen qui fut diffusée dans le Herald Tribune récemment ? Pas vraiment : en septembre dernier, l’attentat avorté qui se préparait dans la ville d’Ulm remontait rapidement dans les méandres des camps d’entraînement pakistanais. Ainsi Daniel Mathieu Schneider et Fritz Gelowitz, respectivement 22 ans et 28 ans, qui projetaient de mener un attentat avec plus de 400 kg de peroxyde contre les bases américaines en Allemagne et qui furent appréhendés par le GSC9 dans la localité de MedeBach Oberschleden, avaient fait quelques séjours de formation terroriste à Damas, en Ouzbekistan et enfin au Pakistan. Même chose pour les proches de Mohammed Atta qui furent souvent en discussion avec des membres de l’ISI. Idem enfin pour les médecins anglais qui ont tenté de se faire exploser le 11/9 à l’aéroport de Glasgow. Idem pour Mohammed Irfan Raja, Akbar Butt et Usman Ahmed Malik qui selon le Daily Telegraph du 25 juillet dernier projetaient de faire un séjour actif au Pakistan. De même pour un jeune Anglais de 21 ans qui a été condamné la semaine dernière à huit ans de prison pour avoir surfer de trop près sur des sites de confection de bombes et qui fut appréhendé alors qu’il s’apprêtait à prendre un vol pour le Pakistan. Ces stigmates terroristes confirment donc l’importance du Pakistan dans la régénération systématique d’Al Qaeda et des groupes salafistes les plus durs.

Le 9 octobre dernier, un rapport, à l’écriture duquel Fran Townsend a participé, fut profondément scruté par le monde du renseignement. En effet, les régions tribales pakistanaises auraient vu une recrudescence de l’activité de militants plus aguerris et déterminés visant à fondre sur des cibles occidentales. La deuxième partie du rapport laissait entendre que des infiltrations étaient déjà en cours au cœur même du Waziristân. Face à ce chaos originel, il est peut-être important de se focaliser sur le moyen terme. Ainsi, les propos de Pervez Hoodbhoy (Daily Times, juin 2007) montrent combien la prévention peut être efficace contre les dérives des madrasas ou d’extrémistes. Il rappelle l’évidence d’une politique de sécurité adaptée. Ainsi, comment le processus d’armement de la Mosquée Rouge a-t-il pu passer inaperçu ? Comment se fait-il que les sites web de la Mosquée Rouge ou des madrasas talibanes aient pu être réactualisés au plus fort de la crise de juillet dernier ? Comment se fait-il qu’une radio talibane puisse dicter des fatwas appelant à l’insurrection générale en émettant de cette funeste madrasa... Pervez Hoodbhoy, en bon physicien, souligne que si des principes de pure logique avaient été suivis la tragédie d’Islamabad aurait pu être évitée et le recrutement de jihadistes internationaux aurait pu être freiné. A la fin octobre, Hoodbhoy avec son courage d’universitaire titrait son article du Dawn (octobre 2007) : « C’est notre guerre ». Dans cet article qui fait écho à celui de juin dernier, il montre l’importance de lutter frontalement contre la « talibanisation » du Pakistan. En effet, depuis Lal Masjid, les régions tribales sont en ébullition et des centaines de soldats ont été faits prisonniers. Pervez critique ouvertement l’inaction de l’armée qui aurait dû riposter rapidement. En effet, « comment mobiliser une armée si on ne va pas à son secours lorsqu’elle est en péril » ? Hoodbhoy mentionne Israël qui avait déployé une opération gigantesque pour retrouver ses fantassins kidnappés par le Hezbollah...

3- L’insurrection du Swat et l’Etat d’urgence

Comme pour donner raison à Pervez Hoodbhoy, des informations concernant la vallée du Swat, qui coule paisiblement au cœur des régions tribales, mettent en relief la descente aux enfers du Pakistan depuis Lal Masjid. A la une du Herald Tribune du 2 novembre, un taliban armé de son AK47 propose fièrement un billet à une petite échoppe destinée à recevoir les dons de soutien aux proches d’Al Qeada. Jane Perlez et Ismael Khan, journalistes au NY Times, rapportent aux lecteurs que la guérilla s’est intensifiée depuis juin dernier. Alors que 2 000 soldats pakistanais investissaient la vallée, une bombe humaine emporta une vingtaine d’entre eux pour leur souhaiter la bienvenue. Malgré l’appui d’hélicoptères attaquant la position de 500 militants, quarante militaires ont été faits prisonniers du côté de Kwazakhela. Plus sordide, les têtes de deux agents gouvernementaux ont été exhibées dans les rues de Matta, un village situé à une trentaine de kilomètres de Saidu Sharif, capitale du Swat. Ainsi, selon Sher Mohammad, juge dans la région du Swat et vivant du côté de Peshawar, les talibans « détiennent environ 10 % du territoire, mais ils arrivent à terroriser l’ensemble de la vallée ». L’ambiance cruelle compose également avec les sermons de Maulana Fazlullah. Proche du mouvement radical local « Tehreek Nafaz-e-Shari at Muhammadi », Fazlullah prône souvent sur les radios la création d’un califat. Il s’oppose à l’éducation des filles, mais surtout il bannit la vaccination anti-polio. Le résultat est que la plupart des gamins du Swat n’ont plus de couverture vaccinale. La plupart des lots vaccinaux envoyés par l’Univef sont désormais stoppés aux portes de cette région jugée trop instable et hostile. Selon Rukhshanda Naz, directeur de la fondation Aurat, qui travaille sur le droit des femmes, une douzaine d’écoles de jeunes filles a été détruite par les talibans, celles qui restent encore ouvertes ont reçu l’injonction de faire porter la burqa à l’ensemble des élèves. Ainsi, pour finir, on comprend donc la constatation de Farook Adam Khan, juge très influent au Pakistan : « Le Pakistan est en état de siège ». Prémonition évidente car le 4 novembre, le président Musharraf a décrété un état d’urgence. Le pouvoir est à nouveau dans ses mains. Il devra alors se lancer dans une rééducation du Swat avec tout ce que cela comporte de risques, de sacrifices humains. On notera le jeu politique de Benazir Buttho, qui reste en retrait pour reprendre l’Etat en main dans le cas précis où Musharraf serait emporté par un attentat islamiste. Elle est, avec ce petit général qui vise à en finir avec le féodalisme religieux et Al Qaeda, la dernière carte démocratique du Pakistan.

En conclusion

L’enjeu des suites de la Mosquée Rouge est international. Il y a l’arme nucléaire et sa technologie. Il y a l’ombre de Ben Laden. Il y a aussi l’échec de Bush dans sa guerre mal pensée contre un terrorisme qui n’espérait pas une position de repli aussi facile. Il y a aussi tapie dans un mutisme calculateur la Chine limitrophe qui a soif d’une porte vers le pétrole au prix d’un pacte de non-agression avec le fasci-islamisme. Cette semaine Pervez Musharraf a déclaré l’état d’urgence dans le but de résoudre le problème des extrémismes. En aura-t-il le temps ? Les Etats-Unis lui permettront ils de stabiliser le pays ou préféreront-ils jouer la carte Buttoh ? Contre ces forces à géométries variables, il faut compter sur le fond « Barelvi » pakistanais. Des hommes qui aspirent avant tout à la paix.

Bibliographie :

- Bangla-Desh : nationalisme dans la révolution, Maspéro, 1973 réédité sous Les Indes Rouges en Livre de Poche)

- http://sara-daniel.blogs.nouvelobs.com/archive/2007/06/05/7-tora-bora-ou-pas.html

- Général Alain Lamballe, Terrorism in South Asia, RR3, november 2005 http://www.cf2r.org/fr/activites/rapports-recherche.php#rr_3 - http://www.svabhinava.org/IndoChina/AlainLamballe/PakistanSeVendALaChine-frame.php

- Lettre ouverte à Joseph Kessel sur l’Afghanistan. Christophe de Ponfilly ISBN-13 978-2869700611

- http://www.jamestown.org/terrorism/news/article.php?articleid=2370168

- http://www.iht.com/articles/2007/11/03/asia/pakistan.php

- http://www.iht.com/articles/2007/11/01/asia/militants.php

- Pakistan : The Eye of the Storm. Owen Bennett Jones. ISBN-13 : 978-0300097603

- Pervez Hoodbhoy. http://www.chowk.com/writers/495

- Preventing More Lal Masjids. Pervez Hoodbhoy, Daily Times. July 2007 http://www.zmag.org/content/showarticle.cfm?ItemID=13276

- It Is Our War. Pervez Hoodbhoy. The Dawn. http://www.zmag.org/content/showarticle.cfm?ItemID=14113


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30 réactions à cet article    


  • morice morice 8 novembre 2007 10:13

    Musharraf fait un second coup d’état, rien d’autre. Il est forcé. On se retrouve avec la même situation qu’en... Irak, avant l’intervention américaine : une dictature pour maintenir tout sa en place... ou le chaos tribal ou s’imisce qui veut. En Afhganistan, un gouvernement croupion est dans les mêmes draps. Le problème, comme vous le signalez, c’est la détention de l’arme nucléaire par le Pakistan.


    • Yannick Comenge Yannick Comenge 18 novembre 2007 08:38

      Meme si Musharraf a fait un coup d’état contre Nawaz Sharif en 99, j’ai du mal à ne pas me dire que c’est une des meilleures solutions politique que le Pakistan aie vécu. En effet, Sharif etait sur le point de remettre la Charia en vigueur, il avait poussé l’armée pakistanaise dans une offensive contre l’Inde pour se retirer sans meme négocier un traité qui aurait établi une paix durable dans toute la région. Musharraf est donc parvenu au pouvoir pour le bien d’un Pakistan. Il faut ajouter que son coup d’état n’a pas fait une seule victime et que Sharif a été exilé sans subir le meme sort que le pere de Benazir Buttho.

      Rappelons aussi qu’il y a une sorte de jeu entre Benazir et Musharraf, j’y vois une complicité. On se s’y prendrait pas autrement pour rendre « attractif » un opposant politique qui plait enormément aux américains. Benazir s’est engagé à livrer Ben Laden avant la fin du mandat de Bush... un trophée en quelque sorte. Voilà ce qui oripile l’administration américaine, savoir que les cadres d’Al Qaeda sont réfugiés tranquillement dans le Swat ou les régions tribales...

      Aujourd’hui, dans la stratégie de Musharraf, on sent l’homme qui reve d’une démocratie. Dans un reportage récent sur Arte, j’ai pu voir l’intimité affichée de Musharraf qui prenait un repas avec sa mère et la journaliste invitée. Il a eu les mots qu’il a toujours. Sa volonté de pousser le Pakistan vers la démocratie et sa réalité qui le pousse à comprendre que les tourbillons de l’islamisme radical ne sont pas loin. Voilà donc l’enjeu... un adminrateur de la Turquie démocrate des années 70 et un homme les pieds sur terre.

      Au dela il y a l’appétit des USA qui voient leur profit et leur petite politique façon Washington...

      Yannick Comenge


    • jako jako 8 novembre 2007 10:28

      Un article remarquable merci à l’auteur.


      • Yannick Comenge Yannick Comenge 18 novembre 2007 08:39

        Merci. N’hesitez pas à me contacter pour tout document qui vous interesserait. Il y en a que je n’ai pas cité pour ne pas alourdir le texte.


      • fouadraiden fouadraiden 8 novembre 2007 12:33

        « Il y a aussi tapie dans un mutisme calculateur la Chine limitrophe qui a soif d’une porte vers le pétrole au prix d’un pacte de non-agression avec le fasci-islamisme. Cette semaine »

        Mais est-ce que les Etats-Unis en célebrant au sortir de la seconde guerre mondiale leur alliance avec la famille saoudienne en échange de leur protection n’illustrait-il pas déjà le pacte avec ce que les idéologues français appellent le fascisme vert ?

        la famille saoudienne ,depuis la fin de la seconde guerre mondiale, en quoi se différencie- t-elle des islamistes qui semble vous gêner ?

        cette question mériterait plus qu’une addition de poncifs,non ?

        il semble que nous apprenons en decryptant les « analyses » géopolitiques occidentales qu’il existerait deux types d’islamistes.

        le« roi » d’Arabie(titre affublé par les Anglais) viste en ce moment même quelques capitales occidentales ainsi que le Vatican.


        • morice morice 8 novembre 2007 14:45

          Et Kouchner dans tout ça ? Un bon résumé de son action ici à la dernière ligne de la page : http://www.aujourdhui.ma/international-details57849.html « service après vente ». Notre bon docteur au SAV !


          • caius 8 novembre 2007 15:31

            à l’exception d’Israël et du Pakistan, il n’existe aucun autre état au monde qui ait été créé pour des raisons uniquement religieuses.

            Selon la « théorie des deux nations » de Jinnah, les musulmans indiens sont des pakistanais qui habitent aux Indes.

            Pourquoi la religion serait-elle un motif suffisant pour diviser une nation ? Le terme même de Pakistan se veut une insulte envers les Indiens, puisque PAK signifie ‘’être pur’’, en opposition aux indiens surnommés najis (les sales).

            un extrait significatif du discours de Jinnah : « Il est très difficile de comprendre pourquoi nos amis hindous ne peuvent saisir la nature réelle de l’islam et de l’hindouisme. Ce ne sont pas des religions au sens strict du terme, mais en réalité des ordres sociaux distincts. C’est rêver que de croire qu’hindous et musulmans puissent jamais fonder une nationalité commune. Cette idée fausse d’une nation indienne a dépassé les limites. Elle est responsable de la plupart des troubles que nous connaissons, et mènera l’Inde à la ruine si nous ne révisons pas à temps nos conceptions. Les hindous et les musulmans appartiennent à deux philosophies religieuses, à deux systèmes de pratiques sociales, à deux mondes littéraires différents. Ils ne se marient pas entre eux, ils ne mangent pas entre eux, et en réalité appartiennent à deux civilisations différentes fondées sur des idées opposées. Leurs conceptions de la vie, leurs façons de vivre sont différentes. Hindous et musulmans tirent clairement leur inspiration de sources historiques différentes. Ils se réfèrent à des épopées différentes, leurs héros sont différents. Très souvent, le héros de l’un est le vilain de l’autre et de même, victoires et défaites s’inversent. Associer deux telles nations, l’une minoritaire, l’autre majoritaire, en un seul Etat, mènera nécessairement à un mécontentement grandissant et à la destruction finale de ce que le Gouvernement d’un pareil Etat aurait pu construire ».

            Jinnah se considérait comme un laïc mais il était surtout un opportuniste ambitieux qui refusait l’idée d’une Union Indienne démocratique où il ne serait pas le maître.

            Un jour peut-être, les Pakistanais réaliseront le mal que Jinnah leur a fait, ils cesseront de le vénérer et réaliseront qu’il est reponsable de leur malheur.



            • Prêtresse Prêtresse 8 novembre 2007 17:36

              Si tu savais ma belle, combien il est difficile, à notre époque, de se procurer de l’argent !

              ___


            • adeline 8 novembre 2007 17:59

              Bonsoir Madame toujours impeccable....


            • Prêtresse Prêtresse 8 novembre 2007 18:33

              Deux pensées se sont croisées dans votre esprit ; c’est un phénomène courant et avec lequel je ne suis moi-même que trop familiarisé.

              ___


            • Prêtresse Prêtresse 8 novembre 2007 18:56

              Quoi ? Qui te l’a interdit ?

              ___


            • EricB 9 novembre 2007 14:22

              à Thierry Jacob : « ISRAEL a vu le jour il y a 3000 ans, sous le régne du roi DAVID, la (recon)naissance d’ISRAEL en 1948 est d’ordre politique, elle correspond à la légitimité de l’état d’ISRAEL. »

              Bah, vous savez, en 3000 ans, il s’en est passé des choses ! Des états se sont fait et défaits, au gré des invasions guerrieres ou culturelles, au gré des aléas climatiques... Alors, la légitimité de l’Etat d’Israel basée sur une histoire d’il y a 3000 ans... on s’en branle un peu.


            • EricB 9 novembre 2007 23:43

              « Et la légitimité de la FRANCE qui a ...1500 ans (CLOVIS)...on s’en branle aussi ? ? ? »

              N’importe quoi. C’est quoi le parallèle ? Justement, la France existe depuis Clovis, voire même avant, et si les frontieres ont fluctué au gré des alliances familiales et royales, il y a toujours eu une continuité dans l’évolution d’une culture, d’un peuple français.

              Dans le cas d’Israel, quelques nations ont décidé de reprendre des territoires à des gens qui y habitaient, pour le donner à d’autres, sous le prétexte que ces derniers y habitaient il y a 2 ou 3000 ans. Vous ne percevez pas la « subtile » différence ?


            • dan 8 novembre 2007 16:04

              Je félicite l’auteur pour cet article remarquable.


              • paugral 8 novembre 2007 16:22

                Un point de vue intéressant d’une spécialiste du Pakistan :

                http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0,36-975024,0.html

                d’après l’auteure, les USA auraient été manipulés par Musharraf ...


                • Yannick Comenge Yannick Comenge 18 novembre 2007 08:43

                  J’ai parcouru l’article que vous citez. J’ai préféré orienter le sujet en plongeant dans la literrature anglosaxone, etant donné que les articles du Monde ou du Monde diplomatique sont aisément accessibles.

                  Pour Musharraf, il a pu manipuler les USA ou jouer la montre. En tout cas, il faut avoir une forme de génie politique pour pouvoir reussir cela. Les USA eux sont dans une logique assez « perso » et auraient tendance à vouloir recuperer Ben Laden, au prix d’une guerre civile tres sanglante... Ben Laden n’est pas d’une grande santé et il sera probablement fini d’ici quelques petites années... le cynisme veut qu’il se retrouve esseulé et détesté « au fond de sa grotte ».


                • adeline 8 novembre 2007 17:54

                  Bonsoir, trés interessant , merci à l’auteur et je dirais pour copier Gasty « le Pakistan pour les nuls..... »


                  • Forest Ent Forest Ent 9 novembre 2007 00:01

                    Je n’avais aucune idée de tout cela. C’est fort érudit et instructif. J’ai appris quelque chose ce soir. Merci AV et l’auteur.


                    • anarkali 9 novembre 2007 02:53

                      J’ai un double sentiment devant votre papier, il est plein d’approximations et d’erreurs, mais il apporte beaucoup d’éléments de compréhension peu cités autre part par d’autres « journalistes » ou blogueurs, etc.

                      Juste l’introduction par exemple (je vous cite entre guillemets) : « Le Pakistan est en train de vivre des moments délicats. Sorti « de la cuisse de l’Inde » en 1947, cette jeune nation islamique a eu à affronter des partitions meurtrières. »

                      Bon, le Pakistan ne sort pas de la cuisse de l’Inde, cela ménerait à croire qu’il y eut en 1947 deux pays dont le Pakistan a fait sécession, or il y a bien eut Partition de l’empire des Indes, et donc, deux Etats indépendants dès 1947.

                      « On se rappelle des mots du jeune BHL visant à alerter la communauté internationale de la catastrophe Bangladhi. À l’époque, le Pakistan désespéré tentait de reprendre par une brutalité toute militaire un quart de son territoire qui lui échappait. »

                      La Sécession du Pakistan Oriental mériterait évidemment un article à lui tout seul. Je précise seulement que le Pakistan oriental représentait la moitié de la population, elle-même musulmane mais avant tout bengalie, parlant bengali et revendiquant la culture bengalie. La sécession du Bangladesh fut l’échec de la théorie des deux nations.

                      « Après cette cuisante débâcle, le Pakistan lorgna sur le Kashmir à dominante musulmane et sous l’autorité de l’Inde... Là, s’ensuivirent d’interminables escarmouches qui débouchèrent parfois sur des péripéties humiliantes pour le Pakistan : on rappellera la retraite de l’armée pakistanaise qui pourtant avait mené une campagne victorieuse au Kashmir en 1999 sous la pression internationale. Erreur fatale qui décida notamment le général Musharraf à évincer le chef de l’État Nawaz Sharif dont le pouvoir se confondait avec une corruption sans précédent couplée à des réformes islamisantes très anxiogènes pour l’Occident. »

                      Bon, le Pakistan n’a pas attendu 1971 pour s’intéresser au Cachemire, et dès 1947-1948, la première guerre indo-pakistanaise porte sur ce point de tension.

                      « Mais le Pakistan reste également le premier pays musulman à s’être doté de l’arme nucléaire le 28 mai 1998 dont le concepteur Abdul Qadeer Khan est élevé en gloire nationale... Particularité donc d’un pays qui arrive à une excellence technologique et dont la population conserve un mode de vie quasi-médiéval. »

                      Je passe sur le mode de vie quasi-médiéval, cela relève du mensonge pur et simple, ou de la simplification abusive. Je veux bien décrire un « retard technologique » (avec toutes les connotations progressistes et pas forcément positives que cela charrie), mais pas un mode de vie médiéval. Dommage que vous tombiez facilement dans le cliché.

                      « Contradiction d’un pays qui conduisit une femme, Benazir Buttoh, aux plus hautes fonctions exécutives alors que certains mouvements politiques soutiennent des positions très radicales ouvertement proches d’Al Qaeda. »

                      Point essentiel, trop souvent oublié, le Pakistan est bâti sur une contradiction, état fondé pour des musulmans pour les protéger, mais devant resté « progressiste » dans son esprit. On observe très bien cette schizophrénie aujourd’hui où on a les talibans d’un côté et les avocats de l’autre.

                      « Rappelons également l’étanchéité relative de la frontière Afghano-pakistanaise... Christophe de Pontfilly, reporter international, était d’ailleurs intarissable sur le sujet. Il mentionnait notamment « les avions pakistanais bombardant les troupes du général Massoud en juillet et en août 2000 autour de la ville de Taloqan ». Inversement il ajoutait que « des observateurs virent plus tard des hélicoptères faire des allers-retours entre des poches de combattants talibans et le Pakistan afin d’exfiltrer hors du champ des caméra la présence logistique pakistanaise et des islamistes de l’Afghanistan ». Enfin, les NWFP pakistanaises (régions tribales) servent toujours de position de repli aux Talibans à la suite de la bataille de Tora-Bora comme l’indique l’ambassadeur Robert Black Hill qui voyait en ces zones montagneuses « des sanctuaires terroristes et des provinces totalement ingouvernables » (21 octobre 2001). »

                      Une faute continue dans l’article, vous assimilez NWFP aux zones tribales, or ce sont deux entités bien différentes. La NWFP est l’une des 4 provinces du Pakistan (Punjab, Sind, Balouchistan, NWFP) ; les zones tribales, à l’intérieur de la NWFP sont des zones administratives spéciales avec des lois différentes. Peshawar est la capitale de la NWFP mais n’est pas une zone tribale.

                      « Elle fut un levier majeur de la survivance de la résistance talibane et surtout de l’autogénération des partisans d’Al Qaeda. »

                      Bon, je pourrais faire tout l’article comme cela, mais ce n’est pas le but, peut-être un peu plus de rigueur serait bienvenu, mais je ne peux que saluer votre effort réussi de décrire ce pays si complexe. De la, à considérer que Lal Masjid fut le tournant historique de la péninsule indo-pakistanaise, je laisse cela à votre appréciation.

                      Cordialement,
                      - anarkali


                      • caius 9 novembre 2007 08:21

                        A anarkali :

                        Les lois sur le blasphème du Pakistan sont médiévales à l’extrême et discriminatoires. Par exemple, les membres de la secte musulmane connue sous le nom d’Ahmadiyyah ont, en application des sections 298-B et 298-C du code pénal, l’interdiction de se dire musulmans et de se livrer à la prédication et au prosélytisme sous peine de trois ans de prison et d’une amende.

                        En application de la section 295-C du code pénal du Pakistan (PPC), quiconque insulte ou se moque du prétendu « prophète » de l’Islam peut être condamné à la peine de mort. Dans le texte initial de la loi, la section 295-C donnait aux juges la possibilité de condamner soit à la peine de mort soit à la prison à perpétuité. Au début des années 90, la section 295-C a été amendée pour faire de la peine de mort la seule sanction possible.

                        L’article 295-B de ces lois sur le blasphème a été fréquemment employé pour persécuter les chrétiens du Pakistan. Cet article énonce que « quiconque souille, dénigre ou profane une copie ou un extrait du saint coran ou l’emploie de façon inappropriée ou pour tout autre but illégal est passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité. »

                        Une grande partie de ceux qui sont arrêtées en application de cette loi sont chrétiens. En vertu des lois sur le blasphème, quand quelqu’un est dénoncé, l’accusé doit immédiatement être placé en état d’arrestation et ce avant même qu’une enquête ait eu lieu.

                        Selon la National Commission for Justice and Peace, au moins 23 personnes ayant été impliquées dans des cas de blasphème ont été par la suite assassinées par des fanatiques musulmans. Quoique les chrétiens du Pakistan comptent pour moins de 2% de la population, un quart de ces personnes assassinées étaient chrétiennes.

                        En juin de l’année passée, Shahbaz Bhatti, le Président de la All Pakistan Minorities Alliance (APMA), a appelé le Chief Justice du Pakistan à modifier les lois sur le blasphème. Il a déclaré : « la loi sur le blasphème est employée comme une arme pour régler des comptes personnels. Beaucoup d’innocents sont tués et incarcérés en raison des abus que permet la loi sur le blasphème. De même, dés qu’il est question de blasphème les familles des accusés sont également menacées et doivent faire face aux harcèlements et aux persécutions. »

                        Tant que les lois sur le blasphème existeront, le Pakistan ne pourra en aucun cas être considéré comme une société civilisée.


                        • ZEN ZEN 9 novembre 2007 09:51

                          Merci à l’auteur pour cette solide synthèse


                          • mcm 9 novembre 2007 10:13

                            [...] Avant les invasions musulmanes, l’Inde jouissait d’une des civilisations les plus élaborées dans le monde. L’Hindustan du 10ème siècle égalait ses contemporains de l’Est et de l’Ouest dans les domaines de la philosophie, des mathématiques et des sciences naturelles. Les mathématiciens indiens avaient découvert le zéro, sans oublier l’algèbre et d’autres théories, qui furent transmises plus tard au monde musulman auquel on en attribua faussement le mérite. L’Inde médiévale, avant l’invasion musulmane, était une culture richement imaginative, une des cinq ou six civilisations les plus avancées de tous les temps. Ses sculptures étaient vigoureuses et sensuelles, son architecture richement ornée et envoûtante. Et tout ceci était une réalisation purement autochtone et non, comme c’est le cas de nombre des plus fameux hauts-lieux de la culture musulmane, des reliquats de civilisations pré-islamistes dont les musulmans s’étaient rendus maîtres.

                            Les envahisseurs musulmans commencèrent leurs incursions au début du 8ème siècle, sous le règne de Hajjaj, le gouverneur de l’actuel Irak. [...] En 712, sous le commandement de Mohammed Kasim, les auteurs des raids démolirent les temples, brisèrent les sculptures, pillèrent les palais, tuèrent un nombre incalculable d’hommes - le massacre des habitants de Debal se prolongea pendant trois jours - et emmenèrent les femmes et les enfants en esclavage, certains réservés aux pratiques sexuelles. Après la vague de violence initiale, Kasim tenta toutefois de rétablir la loi et l’ordre sur ces terres nouvellement conquises, et à cette fin, il autorisa même un certain degré de tolérance religieuse. Mais quand Hajjaj, son maître, entendit parler de ces usages pleins d’humanité, il objecta : « Il apparaît dans votre lettre que l’ensemble des règles que vous avez promulguées pour le confort et le bien-être de vos hommes est en parfait accord avec la loi religieuse. Mais la manière d’accorder le pardon prescrite par la loi est différente de celle que vous avez adoptée, puisque vous accordez votre pardon à chacun, riche ou pauvre, sans faire aucune distinction entre ami et ennemi. Le Grand Dieu dit dans le Coran [47.4] : “O Vrais Croyants, quand vous rencontrez des incroyants, coupez-leur la tête.” Ce commandement du Grand Dieu est un commandement supérieur et doit être respecté et suivi. Vous ne devez pas être trop indulgent et montrer de la pitié, ceci pourrait anéantir la portée de l’acte. Désormais, n’accordez de pardon à aucun ennemi et n’en épargnez aucun, car si vous le faites, tous vous considéreront comme un homme à l’âme faible. » Dans une communication ultérieure, Hajjaj répéta que tout homme valide devait être tué, et que les fils et filles en bas âge devaient être emprisonnés et retenus en otages. Kasim obéit, et en arrivant à la ville de Brahminabad, il massacra entre 6 000 et 16 000 hommes. La portée de ces événements ne se limite pas seulement à l’horreur qu’inspire le nombre de personnes massacrées, mais étend sa signification au fait que les auteurs de ces massacres n’étaient pas les soudards d’une armée désobéissant aux enseignements éthiques de leur religion, comme l’étaient les croisés européens en Terre Sainte, mais bien qu’ils faisaient exactement ce que leur religion enseignait. (On peut noter que le Christianisme a évolué et ne prêche plus les croisades, ce qui n’est pas le cas de l’Islam. Il est abondamment prouvé que la jihad a été prêchée depuis les centres officiels de l’Islam et non pas seulement par des groupes marginaux d’extrémistes fanatiques.) Les exploits de Kasim le précurseur se poursuivirent au début du 11ème siècle, quand Mahmoud de Ghazni « traversa l’Inde comme une tornade, détruisant, pillant et massacrant », appliquant avec zèle l’injonction coranique qui demande la mort des idolâtres qu’il avait juré de châtier chaque jour de sa vie. Au cours des dix-sept vagues successives de cette invasion, du propre aveu de l’érudit Alberuni que Mahmoud avait emmené en Inde, « Mahmoud ruina complètement la prospérité du pays, et accomplit de merveilleux exploits, dignes de figurer dans la mémoire du peuple, telle une ancienne légende, réduisant les hindous en atomes de poussière éparpillés dans toutes les directions. Les restes dispersés [de cette population] nourrirent de ce fait, une aversion invétérée à l’encontre des musulmans. » Doit-on s’en étonner ? À ce jour, les citoyens de Bombay, New Delhi, Calcutta et Bangalore vivent dans la crainte du Pakistan, pays politiquement instable et détenteur de l’arme nucléaire, qui contrairement à l’Inde (mais comme tout pays musulman), n’a pas réussi à maintenir la démocratie depuis l’indépendance.

                            Mathura, la ville sainte du dieu Krishna, fut la victime suivante : « Au milieu de la ville se trouvait un temple plus grand et plus finement ouvragé que tout le reste, impossible à décrire par un texte ou une peinture. » Le sultan Mahmoud pensait qu’il avait fallu plus de 200 ans pour le construire. Les idoles, parmi lesquelles « cinq statues d’or rouge de cinq mètres de haut » avaient les yeux sertis de pierres précieuses inestimables. « Le sultan donna l’ordre de brûler tous les temples par le naphte et le feu, et de les raser jusqu’au niveau du sol. » Conséquences de cette invasion, dans les antiques cités de Vanarasi (Bénarès), Mathura, Ujjain, Maheswar, Jwalamukhi et Dwaraka, pas un seul temple intact ou complet ne subsistait. C’est comme une armée qui marcherait sur Paris, Rome, Florence et Oxford et qui annihilerait tous ces trésors architecturaux. Il s’agit d’un acte qui dépasse le nihilisme ; un négativisme absolu, une haine de la culture et de la civilisation.

                            Dans son livre « Histoire de la Civilisation », le célèbre historien Will Durant s’affligeait des conséquences de ce qu’il nommait « probablement l’épisode le plus sanglant de l’Histoire ». Il considérait cette invasion comme « une histoire décourageante, puisque l’évidente morale qui s’en dégage nous assène que la civilisation est un bien précieux, dont la liberté et l’ordonnancement délicat et complexe peuvent à tout moment être balayés par des barbares déferlant de l’extérieur et se multipliant de l’intérieur ». Les envahisseurs musulmans « détruisirent et brûlèrent tout ce qu’ils rencontrèrent de beau dans l’Hindustan », affichant le ressentiment de guerriers sous-développés, intimidés par la confrontation avec « une culture plus raffinée », comme le souligne un commentateur indien. « Les sultans musulmans construisirent des mosquées sur l’emplacement des temples détruits, et de nombreux hindous furent vendus comme esclaves. Ils étaient des kafirs, des païens par excellence. À la différence des chrétiens et des juifs, ils n’étaient pas des peuples « du Livre », et ils furent les victimes toutes désignées - les pacifiques bouddhistes également mais dans une moindre mesure - de l’injonction de Mahomet contre les païens : « Tuez ceux qui rejoignent d’autres dieux que Dieu, où que vous puissiez les découvrir. » (Non pas que le fait d’être « du Livre » ait beaucoup aidé les juifs et les chrétiens contre d’autres agressions musulmanes, mais ceci est une autre histoire.) Depuis cette époque, les abords montagneux du Nord-Ouest de l’Inde se nomment Hindu Kush, « le massacre des hindous » en souvenir du temps où les esclaves hindous du sous-continent mouraient dans les rudes montagnes d’Afghanistan sur le chemin de la déportation vers les cours musulmanes d’Asie centrale. La boucherie de Somnath, sur le site d’un temple hindou célèbre, où 50 000 hindous furent tués sur l’ordre de Mahmoud, a donné le ton pour des siècles.

                            Les paisibles bouddhistes furent les victimes suivantes à être désignées pour les massacres de masse en 1193, quand Mohammed Khilji incendia également leur célèbre bibliothèque. À la fin du 12ème siècle, après la conquête musulmane de leur bastion du Bihar, ils perdirent toute présence significative en Inde. Les survivants se retirèrent au Népal ou au Tibet ou s’échappèrent vers le Sud du sous-continent. Les restes de leur culture s’éparpillèrent dans des contrées aussi lointaines que le Turkestan. À la merci des conquérants musulmans et de leurs héritiers, ces témoignages furent systématiquement anéantis, comme le furent, de nos jours encore, les quatre statues géantes des Bouddhas d’Afghanistan en mars 2001.

                            Le fait qu’une disposition à la culture et une sensibilité développée puissent aller de pair avec la bigoterie et la cruauté trouva son illustration avec Firuz Shah, qui gouverna le Nord de l’Inde à partir de 1351. Ce chef musulman tyrannique, bien qu’éduqué, surprit un jour une célébration hindoue dans un village, et ordonna que toutes les personnes présentes soient exécutées. Il raconta fièrement qu’après avoir perpétré le massacre, il détruisit les temples et fit ériger des mosquées à leur place. L’empereur Moghol Akbar a laissé le souvenir d’un monarque tolérant, du moins selon les standards musulmans en Inde : au cours de son long règne (1542-1605), on ne peut porter à son actif qu’un seul massacre, quand, le 24 février 1568, il ordonna la mise à mort de près de 30 000 prisonniers rajpoutes après la bataille de Chitod. Mais si Akbar accepta les autres religions et toléra la célébration publique de leurs cultes, s’il abolit l’impôt sur les non-musulmans, son intérêt pour les croyances différentes ne reflétait pas un quelconque esprit de tolérance musulman. Bien au contraire, cette attitude indiquait une propension à la libre-pensée dans le domaine religieux qui l’amena finalement à une apostasie complète. Ses plus hautes actions consistèrent en une déclaration formelle de son infaillibilité en matière religieuse, sa promulgation d’un nouveau credo et son adoption des fêtes et pratiques hindoues et zoroastriennes. C’est un modèle dans l’histoire musulmane que l’on ressasse encore et toujours, y compris à l’heure actuelle : pour peu que l’on découvre un musulman raisonnable, éclairé et tolérant, un examen plus minutieux laisse apparaître qu’il s’agit de quelqu’un qui a commencé par être musulman, et qui progressivement s’est éloigné de l’orthodoxie de cette foi. En d’autres termes : les meilleurs musulmans sont souvent les moins musulmans (un théorème qui ne semble pas s’appliquer aux autres religions.) Les choses reprirent un cours normal avec Shah Jahan (1593-1666), un petit-fils d’Akbar le Grand et le cinquième empereur Moghol. La plupart des occidentaux se souviennent de lui comme le commanditaire du Taj Mahal, mais n’ont aucune idée de la cruauté de ce roi qui engagea quarante-huit campagnes militaires contre les non-musulmans en moins de trente ans. Sur le modèle de ses coreligionnaires ottomans, à l’occasion de son couronnement, il tua tous les membres mâles de sa famille sauf un qui réussit à s’enfuir en Perse. Shah Jahan avait 5 000 concubines dans son harem, ce qui ne l’empêchait pas d’entretenir des rapports incestueux avec deux de ses filles, Chamani et Jahanara. Au cours de son règne, rien qu’à Bénarès, 76 temples hindous furent détruits, ainsi que des églises chrétiennes à Agra et Lahore. À la fin du siège de Hugh (une enclave portugaise près de Calcutta) qui dura trois mois, dix mille habitants furent « déchiquetés par la poudre, étouffés par noyade ou brûlés. » Quatre mille captifs furent emmenés à Agra où on leur offrit de choisir entre l’Islam ou la mort. La plupart refusèrent de se convertir et furent tués, à l’exception des jeunes femmes qui rejoignirent des harems.

                            Ces massacres perpétrés par les musulmans en Inde n’ont pas de parallèle dans l’histoire. En valeur absolue, ils sont plus importants que l’holocauste des juifs, la Terreur soviétique, les massacres japonais sur les Chinois pendant la seconde guerre mondiale, les dévastations de Mao contre la paysannerie chinoise, le génocide des Arméniens par les Turcs, ou que tout autre de ces fameux crimes contre l’humanité du 20ème siècle. Hélas, ils restent pratiquement ignorés à l’extérieur de l’Inde. Plusieurs raisons expliquent ce fait. À l’époque où ils dirigeaient l’Inde, les Britanniques, fidèles à leur politique du « diviser pour régner », blanchirent les archives musulmanes pour que les membres de cette communauté puissent contrebalancer politiquement le poids de leurs administrés hindous plus nombreux. Dans la période de la lutte pour l’indépendance, Gandhi et Nehru minimisèrent l’étendue historique des atrocités afin de présenter la façade d’une unité hindou-musulmane contre les Britanniques. (Bien entendu, cette façade s’évanouit immédiatement après l’indépendance, et plusieurs millions de personnes furent tuées dans les violences religieuses qui accompagnèrent la partition de l’Inde britannique et la création du Pakistan.) Après l’indépendance, les écrivains indiens marxistes, aveuglés par leur idéologie, supprimèrent la vérité des registres musulmans, parce qu’elle ne correspondait pas à la théorie marxiste de l’histoire. Aujourd’hui, l’équivalent indien de la mode du « politiquement correct » passe sous silence les crimes des musulmans qui sont devenus une « minorité opprimée » dans une Inde majoritairement hindoue. Enfin, les intellectuels de gauche du pays ne cessent de blâmer l’Inde et haïssent leur propre civilisation hindoue, de la même manière que leurs congénères de Berkeley condamnent sans relâche les États-Unis et l’Occident.

                            À la différence de l’Allemagne qui a présenté des excuses à ses victimes juives et de l’Europe de l’Est, contrairement au Japon qui a au moins su se tenir depuis la seconde guerre mondiale, et même comparé aux États-Unis qui sont allés jusqu’au paroxysme de la culpabilisation pour les actes commis à l’encontre d’un nombre bien plus réduit d’Amérindiens, les agresseurs musulmans de l’Inde et leurs successeurs n’ont même jamais cessé leurs tentatives pour finir le travail qu’ils avaient commencé. À ce jour, les militants islamistes considèrent encore l’Inde comme « une affaire non réglée », et le problème est inscrit tout en haut de l’agenda de certains pays musulmans enrichis par leur pétrole, comme l’Arabie Saoudite, qui dépensent des millions chaque année pour tenter de convertir les hindous à l’Islam. Une petite satisfaction nous est laissée : ils trouvent que cela avance plutôt lentement.

                            Sources : http://www.jaia-bharati.org/histoire/ind-victim-islam.htm


                            • EricB 9 novembre 2007 23:47

                              Merci pour ces rappels historiques et cet éclairage passionnant sur l’islam en Inde.


                            • docdory docdory 9 novembre 2007 13:36

                              @ Yannick Commenge

                              Si la qualité de vos recherche microbiologiques est égale à celle de votre article ( et je n’en doute pas ) , une belle carrière de checheur s’ouvre devant vous ... et pourquoi pas un prix Nobel ?!

                              Evidemment , au vu de l’énormité de la complexité du problème ayant abouti à cette situation chaotique , sa résolution ( si possible rationnelle ) s’apparente aux travaux d’Hercule !

                              @ mcm

                              Merci pour cet instructif rappel d’histoire ancienne , qui apporte un éclairage indispensable aux problèmes du moment ...


                              • mcm 9 novembre 2007 14:00

                                Docdory,

                                Je vous remercie moi-même pour votre amabilité sans faille, bien que nous ne soyons pas d’accord sur tous les sujets, vos positions, que je respecte, sont toujours énoncés clairement dans un souci de débat constructif et intègre.

                                C’est donc toujours un plaisir de débattre avec vous, un des rares gentilshommes rescapés de nos siècles de vulgarité.


                              • Yannick Comenge Yannick Comenge 18 novembre 2007 08:44

                                Merci pour votre mot...


                              • Yannick Comenge Yannick Comenge 18 novembre 2007 08:47

                                Merci pour votre commentaire. A vrai dire, la recherche est plus capricieuse que l’écriture. Quand on ecrit, on sait demain comment sera l’article ou la synthèse. La recherche, elle, vous pousse vos retranchements intellectuels, elle vous pose dans des dilemmes nouveaux chaque jour... c’est elle qui ecrit sur sa page planche et vous transforme en lecteur assidu des derniers soubresauts de la vie... ce n’est pas le chercheur qui fait la découverte... c’est la nature qui l’a créée...


                              • dan 9 novembre 2007 14:36

                                Merci à mcm de rapporter à la connaissance du grand nombre ces génocides pratiqués par les musulmans en Inde,ivres de conquêtes et fanatisés,ignorants du fond de la religion et ne s’attachant qu’à l’apparence.-------------Il faut noter que le massacre d’une ville de 50000 h à l’époque correspond aujourd’huis au massacre d’une ville de 5 millions d’habitants.


                                • vinvin 10 novembre 2007 21:24

                                  Bonjour.

                                  Le pakistan est sorti de la cuisse de l’ Inde ?

                                  C’ est quoi cette expression a la mord-moi le noeud ?

                                  la cuisse de Dinde ?.... ; mais c’ est excellent et très gouteux, ça !

                                  Cordialement.

                                  VINVIN.

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