Le russophone Avigdor Lieberman devient un joueur incontournable en Israël
Le parti russophone et nationaliste « Yisrael Beiteinu » a été créé par des originaires d’ex-URSS. Avigdor Lieberman, personnage politique qui ne laisse personne indifférent, en est le chef. Lorsque les Israéliens iront à nouveau aux urnes le 10 février pour élire les 120 députés de la Knesset, le parti russophone « Yisrael Beiteinu » pourrait créer une petite surprise. Il accroîtrait sa présence de quelques députés : il est en effet crédité d’une quinzaine de sièges contre 11 dans la présente législature.
Quoi que nous puissions penser de l’extérieur d’Israël, l’intervention musclée à Gaza aura laissé sur le carreau les membres du gouvernement qui briguent les suffrages de la prochaine élection. Le Kadima (centre droit) de la ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, accuse un retard. Le parti travailliste d’Ehud Barak peine à se détacher dans les sondages. L’ancien ministre des Finances, Benjamin Netanyahu, chef du Likoud, serait celui qui récolterait les fruits de l’offensive israélienne dans la bande de Gaza.

Le Likoud de Benjamin Netanyahu et le parti « Yisrael Beiteinu » d’Avigdor Lieberman semblent rencontrer la faveur populaire. Le Likoud peut espérer accroître sa représentation à la Knesset en faisant élire 34 députés, alors qu’il n’a fait élire, aux dernières élections, que 12 sièges sur 120. Le parti laïc d’Avigdor Lieberman pourrait faire élire 16 députés, soit cinq de plus qu’aux dernières élections.
Le Kadima a été marqué par les scandales du Premier ministre Ehud Olmert. Olmert n’est ni le premier ni le dernier à être visé par la justice israélienne. M. Avigdor Lieberman fait l’objet également d’une enquête policière. Sept proches du président Lieberman, dont sa fille Mikhal et son avocat, Me Yoav Méni, ont été interrogés par la police. À l’époque où il était ministre, monsieur Lieberman aurait continué à percevoir des fonds par l’intermédiaire d’une société dirigée par sa fille. Les sommes en cause sont particulièrement élevées : 2,16 millions d’euros en provenance de l’étranger. Et les accusations en sont conséquentes : blanchiment de fonds, malversations et abus de confiance.
En 1999, Avigdor Lieberman avait fait l’objet d’une enquête pour fraude fiscale. Cette fois-ci, les enquêtes pourraient rendre Lieberman inapte à occuper des fonctions ministérielles, telles que la Justice, les Finances ou la Sécurité intérieure, au sein d’un gouvernement dirigé par Benjamin Netanyahu. Ce qui rendrait plus complexe la mise en place d’alliances stratégiques avec des tiers partis pour le futur premier ministre. Lieberman a, de 1996 à 1999, occupé la fonction de chef de cabinet de Netanyahou lorsque celui-ci était Premier ministre.
Parce que Benjamin Netanyahu entend exclure Kadima de son gouvernement. En cas de défaite, Tzipi Livni ne serait donc plus assurée d’occuper une fonction ministérielle au sein d’un cabinet dirigé par le Likoud. « Les gens comprendront que c’est un parti qui n’a pas lieu d’exister. Seul le pouvoir les unit. Il n’y a aucun ciment à Kadima. Sans le pouvoir, ils n’existent pas », aurait confié Netanyahu à des membres de son équipe de campagne. En contrepartie, le candidat au poste de premier ministre aurait promis au ministre de la Défense, Ehud Barak, chef du parti travailliste, d’occuper le même poste.
Tzipi Livni a beau donner une image de « dame de fer », la population israélienne ne parvient pas à lui faire confiance. La « dame de fer » ne rassure personne, semble-t-il. Elle subit les contrecoups de la campagne électorale de Benjamin Netanyahu qui martèle, à qui veut l’entendre, que « l’opération à Gaza s’est achevée trop tôt ». Nonobstant le fait que l’équipe de Barack Obama, composée de Joe Biden, d’Hilary Clinton, de Ram Emanuel ou de Dan Kartzer, soit considérée comme proche de l’État hébreu, l’électorat pourrait rechercher une personnalité qui saura tenir quand même tête aux États-Unis et protéger les acquis d’Israël : il semblerait que le mieux qualifié pour tenir tête aux pressions de l’Oncle Sam est celui-là même qui a fait avorter les accords d’Oslo en 1993.
Le discours de Benjamin Netanyahu, concernant la question palestinienne, est simple. Il faut terminer le travail à Gaza et frapper le territoire avec un poing de fer. Avigdor Liberman ne donne pas dans la dentelle, lui non plus. C’est ce même Liberman qui déclarait, à propos de Gaza : « Nous devons combattre le Hamas comme les États-Unis ont combattu les Japonais pendant la Deuxième Guerre mondiale ». Le député d’extrême-droite ajoutait : « La conquête du Japon alors n’avait pas été nécessaire ». Il convient de rappeler qu’Avigdor Liberman a été ancien ministre des Affaires stratégiques dans le gouvernement d’Ehoud Olmert. Le quotidien Maariv titrait à la une : « Vers un gouvernement Netanyahu-Lieberman ».
Ehud Olmert, Mahmoud Abbas et les équipes de négociateurs avaient décidé, en juin dernier, de préparer un document faisant état des progrès et divergences dans les négociations de paix. Si les deux parties étaient parvenues à des accords sur des questions secondaires, il existait néanmoins des « divergences importantes » sur les questions centrales, comme Jérusalem et les frontières. Les députés de droite, furieux de cette ouverture d’Ehud Olmert, l’ont accusé de vouloir détourner l’attention de l’enquête qui le visait dans une affaire de malversations financières. Et c’est le même Lieberman, aujourd’hui interrogé par la police, qui déclarait : « Il s’agit d’une manœuvre pour sa propre survie politique ». Il promettait dès lors que le prochain gouvernement ne reconnaîtra pas ce document.
Aujourd’hui, dans le cadre de la prochaine campagne électorale en Israël, Avigdor Liberman a engagé une bataille juridique pour empêcher le parti arabe « Balad » de se présenter aux prochaines élections. La Commission Centrale Électorale de la Knesset, composée justement d’Avigdor Lieberman, avait, le 12 janvier dernier, voté en faveur d’une motion présentée par deux partis d’extrême droite, « Yisrael Beiteinu » et l’Union nationale-Parti national religieux, interdisant la participation de deux partis politiques arabes, « Balad » et « Ra’am-Taal », aux élections législatives du 10 février. Vingt-six membres de cette commission avaient voté pour, 3 s’étaient opposés et un membre s’était abstenu. La Cour Suprême d’Israël a renversé cette décision et autorisé, le 21 janvier dernier, les deux partis arabes, « Balad » et « Ra’am-Taal », de présenter des candidats aux élections législatives du 10 février prochain. En 2003, la même Commission Centrale Électorale de la Knesset avait disqualifié le parti « Balad », mais la décision avait aussi été rejetée par la Cour Suprême.
Pour les plaignants, un parti qui soutient la lutte armée des ennemis d’Israël n’a manifestement pas sa place au parlement israélien. Avigdor Lieberman, qui préconise également la déportation des Palestiniens, arguait que les initiatives et les discours du parti arabe allaient à l’encontre des intérêts de l’État juif. Les partis en cause sont en effet représentés actuellement à la Knesset par sept députés.
Guysen News International rapporte que, pour Jamal Zahalka, du Parti Balad, « c’est un paradoxe qu’AvigdorLieberman qui représente la droite ultra-nationaliste et qui déverse quotidiennement sa haine, peut se présenter au Parlement alors que nous demandons l’égalité pour tous les citoyens. Mais ceci n’est pas une vraie démocratie, on nous empêche de nous présenter au Parlement ». Au moment où la Cour suprême avait été saisie du dossier, Avigdor Lieberman avait déclaré : « La question est de savoir si ces partis soutiennent le terrorisme, et j’espère que la Cour suprême respectera la décision prise par la commission électorale, ces organisations terroristes doivent être mises dehors ».
Comme le rappelait RFI, le 13 janvier dernier, la ministre des Affaires étrangères, Tzipi Livni, avait, il y a quelques semaines, affirmé elle-même que le million et demi d’Arabes israéliens devraient être expulsés d’Israël et réinstallés dans les territoires palestiniens. Les Arabes représentent 20% des 7,4 millions d’Israéliens et disposent de 10 députés sur 120 au sein du Parlement sortant.
C’était le 16 janvier 2008. Avigdor Lieberman démissionnait du Cabinet Olmert.
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