Le spectre du terrorisme hante la Belgique
Au bout de la piste italienne, deux anciens militants des CCC ont été arrêtés vendredi à Bruxelles. Les questions affluent...

Bertrand Sassoye, ancien membre des Cellules communistes combattantes (CCC), a-t-il contribué à fomenter des attentats avec une organisation terroriste italienne, le Partito comunista politico-militare (PCPM) ? Son arrestation musclée, jeudi matin à Bruxelles, a en tout cas fait ressortir le spectre du terrorisme dans une Belgique qui peine à s’en libérer. L’ancien membre des CCC Bertrand Sassoye a été placé sous mandat d’arrêt, ainsi que trois autres personnes : la journaliste de la RTBF Wahoub Fayoumi, le gangster Constant Hormans et un Libanais du nom d’Abdallah Ibrahim Adballah. Ils sont soupçonnés d’avoir pris part aux activités du PCMC, lequel projetait, selon les premières informations disponibles, des attentats contre, entre autres, Silvio Berlusconi. Dans un premier temps, l’ancien chef des CCC, Pierre Carette, a lui aussi été arrêté, mais il semblerait qu’aucune charge ne puisse être retenue contre lui. L’enquête sur les activités du PCPM durait depuis plusieurs mois, et 15 membres de l’organisation italienne avaient été arrêtés le 2 février dernier. Ce sont des écoutes téléphoniques qui auraient dirigé les enquêteurs vers Bertrand Sassoye, sorti de prison en 2000 après avoir été condamné à perpétuité en 1989 pour une série d’attentats commis en 1984 et 1985.
Les années de plomb
On se rappelle que durant « les années de plomb » belges (1984-1985), une vague d’attentats (28 au total) avait révélé au public l’existence d’un groupuscule belge d’activistes d’extrême gauche, les Cellules communistes combattantes. Agissant dans l’ombre des « glorieux » aînés tels Action directe (France), la Rote Armee Fraktion (Allemagne) ou Brigate Rosse (Italie), ils avaient défrayé la chronique en s’attaquant à quelques symboles du capitalisme (banques, partis politiques, installations militaires...). Jusqu’au 1er mai 1985, les CCC n’avaient fait aucune victime. Elles prenaient soin de prévenir des attentats, ce qui leur conférait une réputation de Robins des Bois presque sympathiques. Et ce, malgré le traumatisme causé par l’affaire des « Tueurs du Brabant » (toujours pas élucidée), qui elle avait fait des dizaines de morts dans des circonstances véritablement tragiques. Las, lors de l’explosion d’une camionnette piégée au pied du siège de la Fédération des entreprises de Belgique le jour de la Fête du travail, célébration prolétaire par excellence, deux pompiers avaient malencontreusement perdu la vie dans l’explosion. Arrêtés stupidement en train de manger un hamburger dans un Quick, les CCC se retrouvaient aux Assises.
Le spectre du terrorisme
Condamnés à de lourdes peines (la perpétuité pour Sassoye et Carette), ils étaient libérés sous condition en 2000 et 2003. Mais à peine libres, ils clamaient haut et fort n’avoir en rien renoncé à leur lutte. Ce qui étonne n’est donc pas qu’on les retrouve là aujourd’hui. Non, ce qui interpelle, ce sont deux détails apparemment anodins : pourquoi a-t-on arrêté Pierre Carette à grand renfort de publicité puisqu’il n’avait, semble-t-il, rien à voir dans l’affaire ? Pourquoi cette arrestation spectaculaire intervient-elle au lendemain de la manifestation des marins-pêcheurs à Bruxelles ? En Belgique, plane depuis longtemps le spectre d’une volonté occulte d’instaurer un Etat fort, pour protéger les symboles du capitalisme occidental que sont l’Otan, le SHAPE et les Institutions européennes, sans oublier l’implantation de nombreuses multinationales. L’hypothèse la plus solide pour expliquer l’affaire des « Tueurs du Brabant » est d’ailleurs celle d’une action de déstabilisation orchestrée par la CIA, à l’époque où la population manifestait contre l’installation des missiles Pershing II. On n’a pas oublié non plus l’étrange alerte terroriste de décembre dernier, qui avait provoqué l’annulation du traditionnel feu d’artifice de la Saint-Sylvestre. De là à subodorer que l’opération choc de jeudi soit destinée à refroidir les velléités de révolte des laissés pour compte du pouvoir d’achat dans une Belgique politiquement fragilisée, il n’y a qu’un pas. Que certains n’hésitent pas à franchir, à mots couverts.
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