Le Venezuela de Chavez est-il devenu une colonie cubaine ?
L’association entre le régime d’Hugo Chavez et le régime cubain des frères Castro est de notoriété publique. Mais dernièrement alors que la situation interne du Venezuela se dégrade, cette association est de plus en plus questionnée. Ci-dessous la traduction de l’éditorial de Tal Cual du mardi 9 février 2010 rédigé par Teodoro Petkoff. Après cette traduction quelques brefs commentaires pour expliquer mieux le contexte. Il est important de noter que cet éditorial est toujours publié en première page de Tal Cual, un très influent faiseur d’opinion au Venezuela et par conséquent très poursuivi par le pouvoir absolutiste de Chavez qui a déjà cherché à le faire taire, ainsi qu’a Petkoff qui fut forcé hors de son poste d’éditeur de El Mundo (ce qui le mena a fonder Tal Cual). Tal Cual sait très bien le risque de publier de tels éditoriaux qui ne peuvent être démentis par le régime, celui-ci préférant les menaces, la censure et la fermeture.
Des fonctionnaires du gouvernement cubain sont présents chez les notaires et les registres [les notaires et services associés dépendent de d’état], ainsi que dans des domaines stratégiques d’une grande sensibilité, telles que les armées et les agences de renseignement, sans compter les services l’identité. On les trouve même à l’immigration, à Maiquetía [aéroport de Caracas]. Cela, oui, constitue une cession réelle de la souveraineté. Aucun pays qui se respecte ne peut accepter une ingérence étrangère dans ses institutions les plus cruciales. En plus de cela, la présence de « conseillers » Cubains dans les ministères de santé et d’éducation, ainsi que CANTV et Corpoelec [équivalent France Telecom et EDF, récemment nationalisé au Vénézuéla], est si osée et encombrante qu’elle en devient offensive aux mêmes chavistas [supporters de Chavez], qui sont précisément ceux qui nous font parvenir les données sur cette situation anormale et scandaleuse. Il y a des ministres Cubains qui se sont installés ici depuis des mois et conduisent leurs affaires comme s’ils étaient à La Havane. Quelle souveraineté ?
Nous avons déjà narré l’épisode injurieux d’un citoyen vénézuélien qui, suite à un problème avec son passeport, fut convoqué au quatrième étage de l’Onidex [service d’identité nationale], Plaza Miranda, où il fut interrogé pendant trois heures, par deux fonctionnaires Cubains.
Récemment, un de ses participants nous a parlé d’une réunion de haut niveau de la FAN [armée], dirigée par un général, où trois civils se seraient présentés, dont deux jamais n’ouvrirent la bouche, alors que le troisième, qui se révéla être un colonel cubain - accueilli obséquieusement et identifié comme tel par le général -, immédiatement pris la direction du conclave en avertissant que ce qui s’y discuterait, soi-disant, il en ferait directement rapport aux Hautes Oreilles [sic ?, au plus haut niveau, c’est à dire Chavez]. Quelle souveraineté ? Il se peut que Chacumbélé, dans son infinie aliénation cubanoïde, croie que cela fait partie de la "solidarité" entre les gouvernements « révolutionnaires », mais nous le commun des mortels qui en souffre voyons ceci d’un regard sans la moindre indulgence.
Quand un gouvernement autorise la présence de fonctionnaires étrangers dans les grands domaines de la sécurité nationale il est tout simplement entrain de faire un transfert de souveraineté, quel que soit l’adjectif pompeux et "bolivarien" qu’il veuille lui donner. C’est aussi simple que cela. Puisque Chacumbélé utilise fréquemment le terme « trahison » pour faire référence à la situation, dit-il, qui existait avant son accession au pouvoir, nous n’avons aucune objection de notre part, a utiliser ce terme comme un descriptif de ce qui se passe aujourd’hui.
Entre [crochets] des éclaircissements qui n’existent pas dans l’original. Cet original peut se lire en espagnol ici (un blog de documents sur le Vénézuéla car Tal Cual est payant). Pour la traduction j’ai pris quelques libertés car Teodoro Petkoff utilise certains maniérismes vénézuéliens difficiles à traduire.
L’observation de l’ingérence scandaleuse de Cuba dans les affaires vénézuéliennes n’est ni originale ni récente. Si Teodoro Petkoff fait un éditorial sur ce sujet aujourd’hui, d’autres, de l’intellectuelle Elizabeth Burgos à l’auteur de ces commentaires considèrent depuis quelques temps que le Venezuela est en fait devenu une colonie de Cuba. Un nouveau style de colonie peut-être, mais une colonie en bonne est due forme, dont le principal objectif est d’envoyer à très peu de frais un flot continu de richesse à la métropole. Comme exemple voyez les termes des ventes pétrolières à Cuba, tellement avantageux que Cuba se permet d’en revendre une partie à prix international sans être inquiétée sur le solde de sa dette au Vénézuéla, dette qui ne pourra et donc ne sera jamais payée, comme le pensent les experts.
Ce qui est nouveau maintenant est que l’abus des cubains au Venezuela est désormais suffisant pour faire oublier toute aide bénéfique du passé, d’autant plus que cette aide sanitaire, sportive et éducative ne semble pas avoir réussi comme la propagande chaviste voudrait nous le faire croire. Vous n’avez qu’à voyager en dehors de Caracas pour observer de vous-même la quantité de modules de « Barrio Adentro » aujourd’hui fermés, faute de personnel et de ressources, la conséquence naturelle d’un programme sanitaire établi à des fins électorales de glorification de Chavez sans avoir calculé sa capacité d’endurance à l’épreuve du temps et des moyens changeants.
Ce naissant mouvement anti cubain a surpris Chavez lui-même par la force du rejet à la venue de Ramiro Valdes. Personne n’avala la couleuvre de son arrivée pour aider le Venezuela à résoudre la crise électrique actuelle : tous le virent non comme un des grands de la révolution cubaine, mais comme un de ses grands assassins, instigateur de la répression dont soufre l’ile depuis l’établissement du régime totalitaire de Fidel Castro (1 , 2 et 3). Que l’opposition politique à Chavez se sente aujourd’hui capable d’utiliser l’argument anti cubain montre à quel point le régime de Chavez se dégrade, même de son intérieur secret comme le montre cet éditorial.
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La caricature qui vient avec ce texte est de Weil, à Tal Cual. La légende : Pitiyankis, traitres, vous devriez avoir honte !
Pitiyankis est une insulte routinière de Chavez contre son opposition accusée sans ambages et uniformément d’être à la solde des USA (yankis !). Chavez est toujours représenté par Weil en chemise rouge et botte militaire comme tête parlante. Et derrière lui le Vénézuela peint sous les couleurs du drapeau cubain.
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