Les flics de Bouteflika

En Algérie, les opposants au régime éprouvent des difficultés à se faire entendre, et pour cause :
Une énorme armada policière est déployée à chaque occasion opposant jusqu'à 30 000 mercenaires face à 3000 manifestants.
Bouteflika est malin : il aurait réussi à infiltrer la CNDC (coordination nationale pour le changement et la démocratie) représenté par Mustapha Bouchachi.
Certains membres auraient été achetés, et pour tenter d’éteindre le feu, il a décidé le 24 février dernier de lever enfin l’état d’urgence décidé depuis 1992.
Le pouvoir essaye donc d’avoir toujours un tour d’avance, et si les tensions subsistent, il sacrifiera le premier ministre Ouyahia.
Un gouvernement de transition dans lequel siègerait l’opposition est déjà défini, allant jusqu’au remplacement du Président lui-même.
Car ce sont, au sein de ce régime corrompu, deux clans qui se partagent l’Algérie comme un gâteau : celui de Bouteflika, et celui du général Toufik.
Pour l’instant ils s’entendent, et celui qui est pris le doigt dans le pot de confiture est lâché, au nom d’une règle traditionnelle locale : « qui tombe est perdu ». lien
Un câble de Wikileaks a dévoilé récemment un commentaire de l’ex-ambassadeur français à Alger, Bernard Bajolet écrivant « la corruption qui remonte jusqu’aux frères de Bouteflika, a atteint un nouveau sommet et interfère dans le développement économique ».
Un diplomate américain, M. Ford enfonce le clou en affirmant : « les deux frères (du président Bouteflika) Saïd et Abdallah sont particulièrement rapaces ».
Ils ne sont pas les seuls, Ahmed Gaïd-Salah, chef d’état major de l’ANP est cité comme étant « peut-être le fonctionnaire le plus corrompu de l’armée ». lien
L’aventure d’Abdelaziz Bouteflika a commencé en 1956 lorsqu’il a rejoint l’armée de libération nationale, il va devenir ministre à 25 ans, dans l’Algérie indépendante, pour être enfin élu au poste suprême en avril 1999. lien
Mais l’addition commence à être lourde : en 2010, le pays a connu pas moins de 9700 émeutes, provoquant la fuite de nombreux algériens : ils sont 43 000 universitaires algériens à s’être installés au Québec, et 13 000 en Ile de France.
Le taux de chômage algérien dépasse les 35% chez les moins de 30 ans.
On apprend aussi, grâce à un autre câble de wikileaks, que le taux de participation des citoyens aux élections de 2009 était de 25% et non pas de 75% ainsi que l’affirmait Yazid Zerhouni, ministre de l’intérieur ? lien
Election saluée par le chef de l’état français qu’il a qualifiée de « succès ». lien
Il avait d’ailleurs fait de même avec Ben Ali. lien
Quelle est donc cette démocratie qui interdit les manifestations publiques depuis juin 2001.
A part le CNDC il y a aussi le RCD (rassemblement pour la culture et la démocratie) et d’après Saïd Sadi, son président, Bouteflika en est à son troisième coup d’état : 1962, 1965, et novembre 2008.
Il va plus loin que le câble de wikileaks en affirmant que le taux de participation des élections de 2009 avoisinait les 11%. lien
On peut visiter le site face book du RCD sur ce lien et celui du mouvement sur cet autre lien.
Il affirme que 13 ministères sont (ou ont étés) occupés par des personnes issues de sa tribu, avec la bénédiction de l’armée.
Une autre association mérite d’être évoquée : c’est ACA (Action pour le Changement en Algérie). C’est la nouvelle génération algérienne qui s’exprime dans ce groupe non violent, et sous la houlette de Sofia Limane, initiateur du groupe, ils entendent réunir les associations, les syndicats, les partis, avocats, médecins, journalistes, militants de droits de l’homme, enseignants autour d’un seul projet de changement.
L’astuce que Bouteflika a mise en place pour se maintenir au pouvoir est assez ingénieuse.
Il a crée un « ministère des anciens combattants » (des anciens Moudjahidines) en 1962, et de généreuses pensions leurs sont attribuées.
Jusque là, rien d’anormal.
Ce qui l’est par contre, c’est que le nombre des pensionnés a été, d’après Saïd Sadi, multiplié par 12, et que ces pensionnés semblent être devenus immortels.
Or ces pensionnés sont en réalité un véritable clan de soutien au pouvoir ; ils se partagent les marchés, attribuent les chantiers à leurs amis, en en faisant du coup de nouveaux soutiens au pouvoir.
Sur leur site, ils font partie des entreprises algériennes, et figurent sur l’annuaire des entreprises. lien
Il s’agit donc d’un pouvoir occulte qui détient toutes les rênes et se partage le gâteau algérien sur le dos des populations.
En effet, l’Algérie n’est pas sans ressources, mais le problème est toujours le même : un pouvoir et ses amis qui ramassent le pactole, et une population qui souffre.
Mais Bouteflika a bien compris le danger, et pour rester au pouvoir, il envoie maintenant des milliers de mercenaires pour soutenir Kadhafi, apportant la preuve, s’il en fallait encore une, qu’il est bien un dictateur. vidéo
La somme est alléchante entre 700 et 14 000 € par jour pour ces mercenaires. lien
Mais non content de cette scandaleuse contribution, ce sont aussi des avions (vidéo) qu’il a mis à disposition pour aider Kadhafi,(lien) ainsi que l’affirme El Husseini, 2ème secrétaire de l’ambassade de Libye à Pékin. lien
Ces mercenaires ne viennent pas tous d’Algérie, mais aussi du Mali, de Mauritanie, du Tchad, du Nigéria, de l’Ouganda, du Niger. lien
Mais revenons à l’Algérie.
Sur ce lien, on découvre de quelle manière Bouteflika recrute ses mercenaires, avec la complicité de quelques financiers.
Quant à ceux qui ont vendu des armes, et des avions que Bouteflika prête au dictateur Libyen, ont-ils seulement quelques états de conscience ? lien
Outre avoir vendu des armes à la Libye, la France n’a pas oublié l’Algérie ( lien) et au « top 100 » des vendeurs d’armes, on trouve en 2009, 6 entreprises françaises dont les ventes cumulées ont atteint près de 25 milliards de dollars, en augmentation de 8% par rapport à 2008. lien
En attendant la France se drape dans sa dignité et réclame « l’arrêt immédiat des violences en Libye » ( lien) et Sarközy propose sans rougir « que soit examinée la suspension des relations économiques, commerciales et financières avec la Libye, jusqu’à nouvel ordre. » lien
Dans cette phrase on notera qu’il ne s’agit que d’une proposition, qui « devrait être examinée »…et que si elle était appliquée, ce serait « jusqu’à nouvel ordre ».
La question étant : le chef de l’état ayant quasi les pleins pouvoirs, qu’est-ce qui l’empêche de décider, au lieu de seulement proposer ?
On évoque aujourd’hui la mort d’au moins 6000 libyens. lien
Combien en faudra-t-il de plus pour que la décision soit prise ? vidéo en direct Aljazeera
Quant à l’Algérie, la chape de plomb qui s’est installée sur le pays empêche pour l’instant le peuple de manifester sa colère.
Jusqu’à quand ?
Car comme dit mon vieil ami africain :
« Même si le gnou mange l’herbe, elle continue de pousser ».
L’image illustrant l’article provient de « les manants du roi.com »
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