L’accord
trouvé entre le roi d’Arabie Saoudite Abdallah et le monarque bahreïni,
Hamad ben Issa Al-Khalifa, au sujet
de l’annexion virtuelle de l’île pétrolière par Riyad, a tellement
mis Téhéran en colère que des affrontements armés irano-saoudiens,
pouvant éventuellement déboucher sur une guerre de grande
ampleur, pourraient devenir inévitables, estiment les sources du
Golfe et iraniennes de Debkafile. L’Irak, dirigé par les Chi’ites,
pourrait soutenir Téhéran, dans l’explosion du premier baril de
poudre chi’ite-sunnite allumé par la vague d’agitation qui secoue le
monde arabe – par contraste avec la discorde intérieure qui fait rage
en Libye et au Yémen.
Au
cours de la 3ème semaine de mars, Debkafile a révélé que le roi Hamad a
donné son accord à la prise de contrôle,
par Riyad, de la défense du Bahreïn, et de ses affaires extérieures,
financières et intérieures. Les deux monarques ont confirmé le fils du
Roi saoudien, le Prince Mutaïb, comme Commandant des
forces saoudiennes et du Conseil de Coopération du Golfe, invitées à
entrer dans le petit royaume pour mâter le soulèvement conduit par les
Chi’ites, et ils se sont mis d’accord sur le fait que
l’Arabie Saoudite commencerait bientôt à construire une grande base
navale sur l’île qui fait face aux côtes iraniennes.
L’accord entre les monarques saoudien et bahreïni, est apparu pour la première fois, dans le n° 487 de
Debka-Net-Hebdomadaire du 25 mars. Il révélait alors que le roi Hamad avait permis que son royaume devienne, de facto, la 14ème
province d’Arabie Saoudite, dans le but
d’endiguer le soulèvement chi’ite contre lui et son impact, frappant
à la prochaine porte des deux millions de Chi’ites résidant en Arabie
Saoudite.
Ni
Riyad ni Manama n’ont rendu
ce pacte public. La province bahreïnie d’Arabie Saoudite différera
des 13 autres provinces en cela qu’elle ne sera pas gouvernée par un
prince saoudien comme les autres, mais par un membre de la
famille royale Al-Khalifa, qui jouira de privilèges égaux à ceux de ses pairs saoudiens.
Nos
sources rapportent que, lors de rencontres à huis-clos avec des princes
saoudiens de premier rang, le Roi
Abdallah a expliqué l’importance fondamentale de cette étape pour la
sécurité nationale du royaume. Il a fait mention du fait que l’Iran et
son supplétif, le Hezbollah, manipulaient activement
l’opposition chi’ite à Manama, comme représentant la première phase
visant à fomenter un soulèvement chi’ite contre le trône saoudien.
Le
21 mars, Riyad a résolu d’étendre les termes de référence de
l’intervention militaire des Saoudiens et de l’armée
du Golfe, requise à la demande du roi Hamad. Au lieu de seulement
veiller à sauvegarder le Palais royal et les installations stratégiques
contre le déchaînement des manifestants, rapportent nos
sources, il a été décidé d’étendre la mission à la défense des
frontières du Bahreïn contre toute attaque extérieure – c’est-à-dire,
venant d’Iran ou d’Irak.
A
cette fin, les renforts de
troupe saoudiens n’ont cessé d’affluer au Bahreïn, depuis la
dernière semaine de mars, comprenant des unités blindées et une grande
diversité de missiles. Les sources militaires de Debkafile
estiment que quelques 11 000 paires de bottes saoudiennes et des
Emirats Arabes Unis ont frappé le sol du Bahreïn depuis lors.
Quatre
jours plus tard, le 25 mars, Manama a annoncé que des avions au
décollage d’Irak ou du Liban ne seraient plus
autorisés à atterrir dans le Royaume, de façon à couper la voie
principale utilisée par l’Iran et le Hezbollah pour déployer des agents
de renseignement et des instructeurs militaires pour aider
et former l’opposition chi’ite.
La
seconde étape militaire importante mise en place, à présent, est le
transfert des unités de la flotte saoudienne
depuis le Golfe d’Oman et la Mer Morte vers la zone militaire du
port de Bahreïn, où la Vè flotte militaire américaine tient ses
quartiers-généraux et fait amarrer ses navires. C’est une
installation provisoire, servant aux Saoudiens, jusqu’à ce qu’ils
terminent la construction d’un port à Manama pour y parquer leur
principal centre de commandement naval du Golfe arabo-persique,
afin de répliquer aux installations en expansion sur le rivage
opposé, appartenant aux unités d’assaut des commandos marine et de la
flotte des Gardiens de la révolution iranienne.
Le
31 mars, la commission des affaires étrangères et de la sécurité du
parlement iranien a fermement condamné les
nouvelles mesures militaires saoudiennes : “L’Arabie Saoudite sait
mieux que n’importe quel autre pays que jouer avec le feu dans la région
sensible du Golfe Persique n’est pas dans son
intérêt », disait la déclaration.
Depuis
lors, les media iraniens n’ont pas cessé de dénoncer les actions
saoudiennes au Bahreïn, les comparant à la
conquête du Koweit par Saddam Hussein en 1990, qui a déclenché la
première Guerre du Golfe contre l’Irak. Riyad a même été accusé
d’accepter le soutien clandestin des Etats-Unis et
d’Israël.
Puis,
samedi 2 avril, le Premier Ministre d’Irak, Nouri al-Maliki a mis son
grain de sel en injuriant la politique
américaine au Moyen-Orient comme discriminant entre les mouvements
populaires en ballotage contre les différents régimes arabes
dictatoriaux. « Quelle que soit la décision prise concernant
la Libye, elle devrait être appliquée à tout gouvernement qui
réprime son peuple d’une main de fer et tire dessus », a-t-il déclaré.
Dimanche
3 avril, les récriminations et les menaces venant de Téhéran et Bagdad
ont poussé le Conseil de Coopération
du Golfe à tenir une rencontre exceptionnelle des Ministres des
affaires étrangères. Il a voté une résolution qui « condamne sévèrement
l’ingérence iranienne dans les affaires internes du
Bahreïn, en violation de tous les accords internationaux ».
On
n’avait jamais entendu un langage aussi tranchant de la part des
dirigeants du CCG. On peut l’attribuer, selon
nos sources du Golfe, à la résolution inflexible du roi saoudien
Abdallah de défier Téhéran de plein fouet sur tout problème affectant la
sécurité de la région du Golfe, au point de faire
intervenir l’armée saoudien si nécessaire – même au risque de
précipiter une confrontation armée entre l’Arabie Saoudite et l’Iran.
La
République islamique s’est sentie confrontée à son premier défi franc
et direct, dénué d’absurdité dans ses
répliques : s’il plie devant l’activisme militaire saoudien, les
communautés chi’ites à travers la région devront en conclure que l’Iran
est, à la fois, incapable et, pas plus, n’a la volonté
suffisante pour se tenir aux côtés d’une révolte arabe-chi’ite
contre les régimes sunnites – que ce soit au Bahreïn, dans d’autres
émirats du Golfe ou au Yémen et même au Liban.
Le Premier Ministre irakien al Maliki est confronté au même dilemme, scruté par les chi’ites d’Irak, qui considèrent
leurs coreligionnaires bahreïnis comme étant partie intégrante de leurs tribus et de leurs clans.
Il
est considéré comme acquis
par l’Arabie Saoudite, les capitales du Golfe et les observateurs
occidentaux des armées et du renseignement, que Téhéran a été repoussé
dans ses cordes, à partir desquelles il ne peut pas se
permettre de battre en retraite face à son engagement prédominant de
parrainer les chi’ites bahreïnis. On s’attend, par conséquent, à ce que
les Iraniens lancent, très prochainement, leurs
réseaux chi’ites du Bahreïn dans des actions terroristes contre des
cibles militaires saoudiennes. Riyad se prépare déjà activement à ces
attaques – et pas seulement au Bahreïn, mais dans
d’autres états du CCG, incluant l’Arabie Saoudite elle-même. Elles
ne se dérouleront pas sans représailles ; d’où les prédictions extrêmes
parmi les observateurs chevronnés, que des
hostilités armées entre l’Iran chi’ite et l’Arabie Saoudite sunnite
peuvent, à un certain point, être devenues inévitables.