Libye, obscurantisme et diplomatie

Tout le monde sait, et Kadhafi en premier, que les infirmières bulgares et le médecin palestinien condamnés à mort par la justice libyenne ne sont, en aucun cas, responsables de l’inoculation du Sida à 426 enfants.

Tout le monde, sauf les familles des victimes et une société vivant dans un obscurantisme consternant, savamment entretenu par les autorités pour lesquelles tous les maux dont souffrent le pays sont la cause de l’embargo décrété, en son temps, par le Conseil de sécurité.

En effet, notamment depuis l’attentat d’un DC 10 le 19 septembre 1989 à Lockerbie, la Libye est mise au ban de la communauté internationale. La signature d’un accord d’indemnisation a auguré un retour de la normalisation des rapports entre Paris et Tripoli. Totalement isolé, le chef de l’Etat libyen entend recouvrer une reconnaissance sur la scène diplomatique. Il a, ainsi, renoncé à toute velléité nucléaire en signant, fin mars 2004, le Traité de non-prolifération.

Mais une telle allégeance, qui apparaît comme une soumission aux diktats de l’Occident sans avoir obtenu de contrepartie tangible, fait le jeu des tribus les plus conservatrices du régime dont nombre des victimes de la contamination est issu. Aussi, la sentence doit-elle être, également, interprétée comme le gage donné aux plus radicaux de la révolution libyenne face aux plus modernistes représentés par Saïf el-Islam, fils du Guide, présenté comme son successeur.

Même si la Cour suprême confirmait le verdict, Mouammar Kadhafi n’aurait pas d’autre choix que de gracier les six soignants à la condition, toutefois, que les capitales occidentales fassent un geste suffisant lui permettant de ne pas perdre la face. Or, jusqu’à présent, elles avaient refusé de participer à un fonds d’aide aux victimes.

Parallèlement à l’indignation de nos diplomaties commencent de très serrées tractations financières et politiques, dont dépend la vie de six innocents.