Mali : le gouvernement d’IBK, derrière le massacre des Peuls ?
Violences, meurtres, parfois massacres, sous la présidence du président sortant Ibrahim Boubacar Keïta, les conditions de vie de la communauté Peul au Mali se sont gravement détériorées. De leurs côtés, associations humanitaires et observateurs étrangers pointent du doigt l’implication du gouvernement et de militaires maliens dans les attaques, sous couvert d’instrumentalisation de l’élection présidentielle.

À moins d’une semaine du second tour de l’élection présidentielle au Mali, il est des sujets qui marquent comme une tâche d’huile le quinquennat du président sortant. Le bilan sécuritaire déjà sombre d’Ibrahim Boubacar Keïta, dit IBK, s’est en effet noirci avec l’émergence de la question Peul, quelques mois avant la présidentielle.
En effet, depuis trois ans, les Peuls du Mali font les frais de violences intercommunautaires d’une rare brutalité, en provenance notamment des dozo, ces chasseurs traditionnels de l’ethnie dogon. Ces violences ont connu une escalade rapide ces derniers mois, faisant craindre le spectre d’un massacre ethnique dans le centre du pays. Jusqu’aux incidents du 23 juin, à Koumaga, qui se sont soldés par la mort d’une trentaine de civils sur base ethnique.
Selon Abdoul Aziz Diallo, le président de Tabital Pulaaku (la principale association peule au Mali), « des gens habillés en dozo » ont « encerclé le village, isolé les Peuls des autres communautés et, froidement, tué au moins 32 civils. Dix autres sont portés disparus ».
Des chasseurs armés par le pouvoir ?
Problème, les liens entre les chasseurs, prétendument dogon, et le gouvernement malien ont toujours fait l’objet de suspicions. « Les hommes étaient habillés en tenue dozo, mais on se demande s’ils étaient tous » a ainsi déclaré au Monde Afrique un élu de la région, précisant que femmes et enfants ont également été tués, indistinctement. Une information que semblent également valider les observateurs étrangers sur place, à l’image du Canada qui a, par le biais de son ambassadeur, fait part de son inquiétude.
« Le Canada est profondément préoccupé par les graves violations des Droits de la personne impliquant les forces militaires maliennes » a déclaré Son Excellence Louis Verret, en faisant référence à d’autres massacres commis dans la région du Mopti. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a également fait état d’une « augmentation des conflits intercommunautaires », en évoquant par ailleurs « la multiplication des allégations faisant état d’exécutions sommaires et d’exactions commises par les membres des forces maliennes ».
Du côté du gouvernement malien, on relativise. « C'est un conflit entre deux communautés. Nous savons également qu'il y a des ennemis, des terroristes qui se trouvent dans ces localités et qui essayent d'instrumentaliser les deux communautés », a déclaré Amadou Koïta, le porte-parole du gouvernement.
Une posture qui ne rassure ni les Peuls, ni la communauté internationale. D’autant que des rumeurs persistantes font état de liens serrés entre le pouvoir et les chasseurs. Des informations, parues sur un groupe Whatsapp malien, font ainsi part d’une livraison de munitions des FAMA (Forces armées maliennes) aux chasseurs dozos qui auraient eu lieu le samedi 04 août, sur ordre du chef d’état-major des armées le général Bemba Moussa Keita.
Avec consigne, pour les soldats en charge de la sécurité de la région, de retarder le temps d’intervention des forces de sécurité de deux heures afin de ne pas inquiéter les chasseurs sur place...
Les Peuls privés de vote
Vérité ou intox, les informations qui se disséminent sur les réseaux sociaux et les messageries mobiles font état de la véritable angoisse de la communauté Peul face à un sentiment d’abandon des pouvoirs publics. Il faut dire que les troubles dans la région du Mopti arrangent le pouvoir. Avec plus de 1,3 million d’électeurs sur 8 millions, le vote à Mopti et à Gao représente plus de 10% des voix de l’élection présidentielle malienne. Autant de voix qui sont logiquement appelées à se déporter vers le rival du président IBK, Soumaïla Cissé. Mais le pouvoir ne semble pas vouloir donner les mêmes chances à tous les électeurs, notamment Peuls, dont les voix sont pour la plupart acquises à Cissé.
Ainsi, dans le cercle de Douentza, à près de 200 km au nord-est de Mopti, « les sous-préfets et les membres des bureaux de vote ont déployés les urnes dans certains villages à dominantes dogons, mais aucun bureau n’a ouvert ses portes dans les villages peuls considérés sous contrôle jihadiste comme Yamassadiou et Ondé, ainsi qu’une partie de Mondoro. Aucun bureau de vote n’a ouvert ses portes à Boulikessi, alors que l’armée malienne est bien présente dans ce village » a révélé à Jeune Afrique une source bien introduite dans les milieux de défense malien.
Un indiscret qui renforce les inquiétudes des citoyens Peuls, qui entre massacres ethniques et absence de vote, semblent être devenus, de facto, les parias du Mali.
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