Midterms, la réalité des sondages
A lire la presse française, on pourrait presque se demander si ce ne sont pas les démocrates qui aux États-Unis font la course en tête.
Dur de ne pas percevoir cette prise de position pro-démocrate partout présente : la moindre nouvelle un tant soit peu positive pour le camp de Barack Obama est reprise par une presse française en admiration, tandis que tout ce qui est Républicain est diabolisé. Pourtant, la situation non seulement est mauvaise pour les démocrates, mais surtout empire. Retour sur quelques exemples de grand écart entre les chiffres et la présentation faite par la presse française.
Lisons par exemple la présentation de l’actualité faite par Le Monde : "Les démocrates américains rattrapent leur retard avant les élections", "Républicains sous pression", "Etats-Unis : un candidat républicain photographié en uniforme SS", "Obama attaque le programme "usé jusqu’à la corde" des républicains" et "Le mouvement Tea Party peut-il faire perdre les élections aux républicains ?". L’AFP fait preuve de la même objectivité de ton en titrant "Obama et son épouse acclamés à deux semaines des législatives". Dur d’imaginer que l’on prédit aux Démocrates leur pire défaite depuis 1994... Attardons nous à titre d’exemple sur cet article d’Audrey Fournier sur le site du Monde, paru il y a une dizaine de jours :
Le Washington Post, par l’intermédiaire d’un sondage réalisé en collaboration avec ABC News, vient de mettre à mal la belle assurance des républicains. Les démocrates seraient en train de rattraper leur retard : "Les démocrates ont réduit de moitié l’avance détenue par le Parti républicain depuis début septembre sur la question de savoir pour quel candidat les électeurs voteront le 2 novembre."
Et d’ajouter :
Les résultats de cette enquête tendent toutefois à démontrer l’efficacité de la stratégie de campagne démocrate, celle-là même qui a porté Barack Obama à la Maison Blanche en 2008. [..] "Il y aura une vague. Les républicains reprendront des sièges au Parlement et au Sénat. La question est de connaître l’ampleur de cette vague. Or, celle-ci semble en train de perdre de l’ampleur."
Vous avez bien lu. La presse française arrive à dire qu’on peut voir "une efficacité démontrée de la stratégie de campagne démocrate". On admirera le wishful thinking, mais les sondages prédisent au contraire tous une augmentation de l’avance des républicains alors que le scrutin se rapproche. Prenons la référence, RealClearPolitics, qui fait la synthèse de tous les sondages des instituts américains pour donner un chiffre reconnu comme le moins mauvais. Voici l’évolution des anticipations de siège pour démocrates (bleus) et républicains (rouges) à la chambre des représentants, intégralement renouvelée :
Une dégringolade permanente qui, comble de l’ironie (ou de la mauvaise foi si l’on suppose que les journalistes français sont de parti pris), montre un effondrement des démocrates au moment où le journal du soir nous promet quasiment leur victoire face aux nazis du parti républicain !
Mais comment les journalistes français font-ils pour déformer ainsi les faits ? La recette est simple, ne prendre ses sources que dans le "bon" camp, et en radicaliser le propos. Reprenons l’exemple de l’article d’Audrey Fournier :
- Washington Post, de centre gauche. Si le journal a la décence de noter "Democrats gain in poll but GOP still leads as midterm elections near", pour un journaliste français cela donne "Les démocrates seraient en train de rattraper leur retard"
- Slate.com, qui ne cache pas son soutien aux démocrates. Pareillement, quand le site écrit "Examining the Democratic claim that the race is tightening" et conclut de façon équilibrée, le journaliste français traduit en "Les résultats de cette enquête tendent toutefois à démontrer l’efficacité de la stratégie de campagne démocrate"
- Une citation insipide du très néo-conservateur Weekly Standard est vite effacée par un retour à une valeur sure de l’Internet démocrate (Huffington Post), ou des renvois vers le très démocrate New York Times et son camarade britannique, le Guardian. Ne cherchez pas de sources conservatrices ou libertariennes comme Townhall, National Review, Reason ou Humane Events, ils ne pensent pas comme il faut et les journalistes français ne connaissent tout simplement pas...
Dans ces conditions, cela promet une cruelle désillusion probable pour les journalistes français quand tomberont les résultats des élections. Gageons que ce sera la faute du grand capital apatride qui aura fait chuter le sacro-saint Obama. Alors pour vous informer vraiment, reste Internet
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