Oui, Mahmoud Abbas, Prix Nobel de la paix
Mahmoud Abbas, futur Prix Nobel de la paix ? C’est une idée magnifique ! Un internaute soumet à la discussion cette proposition sur AgoraVox. Il nous faut propager cette idée partout où cela est possible. Face à l’impuissance des Etats à résoudre le conflit israélo-palestinien, les citoyens du monde sont et se sentent concernés. Ils peuvent et doivent prendre la parole. Ils sont en capacité de peser, car la résolution de ce conflit est avant tout, aujourd’hui, affaire de morale. Le monde contemporain n’ira nulle part tant que ce sujet ne sera pas apuré.
L’échec des accords d’Oslo, puis les attentats du 11 septembre 2001 ont servi de prétexte aux dirigeants israéliens et américains pour mettre en œuvre une stratégie de tension politique et militaire internationale mortifère, dont le Moyen-Orient est le centre, er qui concerne l’ensemble de la communauté internationale. Cette politique sécuritaire repose sur un discours public mensonger, ayant pour finalité apparente de défendre et de rassurer les citoyens du monde face au terrorisme, mais dont la réalité est inverse, puisqu’elle ne fait qu’entretenir l’inquiétude et la surenchère. Cette politique a, en tout cas, un fondement idéologique inavoué, qui est celui de l’exercice d’un droit à la violence du fort contre le faible. L’évidence de l’anachronisme de cette idéologie, à l’heure de la globalisation économique, s’est illustrée par le retour officiel, au sein de la démocratie américaine, du droit de torturer, ce qui est un déni de toute l’histoire de la conquête des droits humains des derniers siècles. C’est éminemment grave, c’est le signe d’une régression profonde, morale et politique des sociétés contemporaines. Nous vivons un temps de retour à la guerre comme forme d’expression politique.
Tout avait bien commencé pourtant : au lendemain de la chute du Mur de Berlin, les idéologues de la droite ont proclamé la fin de l’Histoire avec un grand "H ". Désormais nous vivrions forcément heureux et forcément en harmonie au sein d’un eden... forcément libéral. Les idiots se sont empressés d’applaudir. Mais " l’Histoire " est en train de rattraper ces - nombreux - idiots. L’Amérique, hyperpuissance planétaire, l’Amérique berceau du culte planétaire contemporain de la liberté individuelle, l’Amérique bouffie de certitudes, va de défaite en défaite face aux réalités d’un monde interdépendant. Il y a pourtant une explication simple : liberté et égoïsme sont certes deux mots qui parlent d’un même sujet, mais ce sont deux termes antagonistes. Nous vivons un temps d’autisme dans lequel chacun d’entre nous serait le nombril d’un monde dans lequel... " l’autre ", les six milliards d’autres n’existent... pas. Difficile, dans ces conditions, de se construire un avenir commun.
Les dangers du monde ne viennent pas de la violence des faibles, ils sont plutôt le fruit des névroses et des insuffisances des puissants. Les bombes qui représentent un réel danger pour la planète Terre ne sont pas celles des terroristes, mais celles que les puissants du monde disséminent en notre nom et de manière inconsidérée, un peu partout à la surface du globe. Le corollaire de cela, c’est que les mêmes considèrent que les faibles devraient vivre derrière des barbelés, au seul prétexte qu’eux, les puissants, construisent un monde fragile et dangereux. Le mur de la honte qui séparait le monde en deux est tombé en 1989, mais Américains et Israéliens se sont empressés d’en construire de nouveaux, derrière lesquels ils veulent enfermer les autres et s’enferment eux-mêmes. C’est de nous-mêmes que nous avons peur. La croisade antiterroriste à laquelle nous assistons depuis vingt ans est un mensonge et un puits sans fond.
L’ampleur, la violence, l’injustice, l’inutilité des destructions que l’armée israélienne a fait subir au peuple libanais est l’illustration de cette irresponsabilité et de cette inégalité destructrice. Cette loi du plus fort, cette terreur revendiquée, aura eu au moins une vertu, elle aura montré que si négation de " l’autre " il pouvait y avoir effectivement des deux côtés des barricades et des barbelés, cela ne faisait pas pour autant le même genre de dégâts des deux côtés de la frontière. Cet épisode désastreux aura aussi montré que la complaisance internationale face à l’irresponsabilité israélienne fait de nous ses complices. Le déchaînement de violence imposé par l’armée israélienne au Liban est une faute morale majeure, que rien ne pourra excuser, parce qu’il aura été mené au nom de tous. Il est temps pour les puissants du monde de comprendre que dans une société à la fois interdépendante et déséquilibrée, il n’y a pas de place pour l’arrogance. C’est aux forts de tracer les chemins de la concorde et de la paix. Le chaos irakien actuel est l’illustration de l’impasse de la violence pour résoudre les problèmes du monde.
Mahmoud Abbas, Prix Nobel de la paix ? Oui, mille fois oui. Lors de la signature des accords d’Oslo, il y a vingt ans, il y avait deux partenaires à la table des négociations, et c’est à ces deux partenaires que l’on a remis le Prix Nobel. Il n’en reste plus qu’un aujourd’hui, et il n’y a qu’une seule issue à cette situation : dire haut et fort qu’Israël n’est plus, depuis vingt ans, sur le chemin de la paix. Il y a huit mois à peine, le peuple d’Israël élisait un gouvernement d’union nationale dans lequel se retrouvaient tous ceux, de droite et de gauche, qui souhaitaient, nous disaient-ils, retrouver le chemin de la concorde. Ils n’ont pas réussi. Huit mois plus tard, un membre de la droite la plus extrême qu’on puisse imaginer siège à ce même gouvernement. Il n’y a pour l’heure nul projet, nul espoir, hormis la haine et plus de 1500 morts supplémentaires. Jusqu’à quand cela peut-il durer ? Les Israéliens sont responsables de leurs échecs.
Ce qui est vrai de l’Amérique et d’Israël l’est aussi de l’Europe. Le droit d’ingérence est un concept qui s’est développé timidement aux débuts des années 1980 et que l’on ne sait plus réellement qualifier aujourd’hui, notamment depuis que les Américains l’ont instrumentalisé à leur profit au moment de la deuxième guerre d’Irak. C’est en tout cas un concept fourre-tout, que l’on n’a songé à appliquer pour l’heure qu’aux " autres ", ces étrangers à nous-mêmes, ces " faibles " de " l’autre " monde, ceux du pays des " dictateurs ". L’Europe aura eu l’occasion de s’interroger sur la nécessité de l’ingérence, mais elle aura peu agi. Face à la Serbie de Milosevic, elle n’aura cessé de tergiverser. Finalement, c’est la résistance des Bosniaques et l’engagement militaire des Américains au moment du Kosovo qui auront fait la différence et permis de progresser sur la voie d’un règlement. L’Europe politique aura été absente de la fabrication de sa propre histoire. Je crois que ce manque de courage aura eu de grandes et multiples conséquences dont on évite soigneusement de parler. Je crois, par exemple, que Georges Bush n’aurait pas réussi à imposer sa vision du monde en Irak, si l’Europe ne s’était montrée si pusillanime en Europe centrale au moment de la crise des Balkans. Le terme méprisant de " vieille Europe ", prononcé par Donald Rumsfeld quelque temps avant le déclenchement de la Guerre d’Irak, avait une origine. Il exprimait très bien, en tout cas, la réalité du rapport de force et l’état d’esprit des Américains face à l’Europe. Je crois aussi que ces deux événements cumulés (Balkans et Irak) ont certainement joué un rôle éminent dans le comportement erratique des électeurs qui se sont détournés, avec une si soudaine violence, de l’Europe et de ses institutions au moment du vote sur la constitution européenne. Nous vivons un temps d’immense impuissance des structures politiques et des Etats. Cette impuissance présente de multiples aspects qu’il serait trop long et hors de propos d’expliciter ici. Mais il en est un qu’il est important de dire, concernant la capacité des citoyens à peser sur le devenir du monde.
La Guerre d’Irak aura révélé aux citoyens du monde leur interdépendance politique. Ce sont trois cents millions d’électeurs américains qui auront réélu leur président au lendemain de la guerre, mais des milliards d’yeux regardaient vers l’Amérique et auraient souhaité mettre un bulletin dans l’urne pour chasser cet homme. Nous vivons à l’heure de la globalisation économique, et l’Amérique en est le moteur. Mais elle ne veut pas entendre parler de globalisation politique. C’est cela, le sens de la guerre que Georges Bush a menée contre le reste du monde en Irak. Il a perdu. Mais ce faisant, il a mis en évidence les immenses difficultés qui nous attendent pour faire bouger les frontières de l’organisation politique du monde. Pour que les choses changent, il faut que les citoyens du monde s’emparent de l’espace politique à l’échelle de la planète entière.
La victoire du Hamas aux élections palestiniennes, l’échec militaire évident des Israéliens au Liban, l’impasse irakienne, l’insoluble problématique nucléaire iranienne sont les signes, désormais visibles par tous, de l’impasse d’une idéologie qui occupe le centre de la scène politique depuis vingt ans. La chute de la droite américaine en est la traduction politique. Le seul chemin réaliste pour un retour au dialogue au Moyen-Orient passe par la case Palestine. Il y a plus d’un demi-siècle que ce dossier brûlant est à l’agenda de la société des nations. C’est l’occasion pour la communauté internationale d’affirmer qu’elle existe. Il n’est qu’un seul chemin pour faire vivre une démocratie planétaire : le multilatéralisme. A l’heure de la globalisation économique, L’Otan doit reculer, l’Onu doit s’affirmer, et non l’inverse. C’est cela, le vrai défi posé à la communauté internationale par la chute du Mur de Berlin.
Mahmoud Abbas, Prix Nobel de la paix ? Ce serait le signe d’une nouvelle donne au Moyen-Orient. Ce que les Etats n’arrivent pas à faire doit être fait par les citoyens.
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