Peter Mandelson et Louis Michel à Yaoundé : l’Afrique n’est pas à vendre...aux APE
« Sans intégration régionale, pas d’accord de partenariat possible avec l’Europe qui, elle, est intégrée », « Africa is not for sale », « nous voulons la subvention de l’agriculture »... Les slogans ont fleuri à l’esplanade opposée au Hilton hôtel de Yaoundé le 16 juillet dernier, lors d’une manifestation dite citoyenne de la Plate-forme des acteurs non étatiques d’Afrique centrale.

A l’intérieur de l’hôtel, les ministres et chefs de délégations d’une dizaine de pays de l’Afrique centrale sont réunis ce jour-là autour de deux commissaires européens au Développement et à l’Aide humanitaire (Louis Michel) et au Commerce (Peter Mandelson). Ce dernier, Peter Mandelson, coprésidait ce Comité ministériel commercial conjoint élargi aux ministres ordonnateurs nationaux du FED (Fonds européen de développement) de l’Afrique centrale, avec le ministre camerounais de l’Economie et des Finances, Polycarpe Abah Abah, en sa qualité de président du Conseil des ministres de la Cemac.
Il s’agissait pour les deux commissaires européens, selon les termes du communiqué final, de « faire le point sur l’état d’avancement des négociations de l’Accord de partenariat économique (APE) entre l’Afrique centrale et la Commission européenne, à la lumière des conclusions et orientations du Comité ministériel commercial conjoint élargi tenu à Bruxelles le 6 février 2007, et de donner les orientations nécessaires pour permettre la poursuite de la préparation du futur accords d’ici la fin 2007 ».
Dehors, mené par l’ACDIC (Association citoyenne de défense des intérêts collectifs), la Plate-forme des acteurs non étatiques de la société civile, préalablement réunie à Douala le 5 juillet 2007 pour dégager des recommandations relatives aux négociations de l’APE.
Pour ces associations de la société civile, les commissaires européens sont venus « mettre la pression » sur les négociateurs africains (ministres et équipes de techniciens), dont le Comité s’est tenu le 13 juillet à Yaoundé. Elles estiment que les pays africains ne sont pas favorisés dans ces accords, car l’Union européenne met l’accent plutôt sur le commerce et néglige le développement des pays de l’Afrique centrale qui ne sont pas encore prêts à ouvrir leurs marchés à la rude concurrence régionale, et a fortiori européenne, en conformité avec les accords de l’OMC : économies fragiles pour se laisser envahir par les produits européens et en retour attaquer les marchés occidentaux ; inexistence de biens et services d’origine africaine à proposer pertinemment aux marchés européens.
L’Afrique (h)APEé
Il reste également que l’Afrique, elle-même, au sein de ses regroupements sous-régionaux, n’est pas encore assez intégrée pour être un interlocuteur de poids de l’Union européenne.
Face à ces inquiétudes, les commissaires européens et le Comité ministériel a rappelé l’engagement pris de définir un APE compatible aux règles de l’OMC avec une forte asymétrie en faveur de l’Afrique centrale, notamment l’accès libre et total sans droits de douane ni contingents aux produits originaires de l’Afrique centrale, dans le cadre de l’APE, conformément à l’engagement pris par l’Union européenne lors d’une réunion le 6 février 2007. En contrepartie, l’Afrique devra fournir en septembre prochain une liste de produits à démanteler, couvrant 60 % des importations originaires de la Communauté européenne ainsi que la liste de produits restants.
Comme mesure d’accompagnement de la mise en place de l’APE, le Comité ministériel a arrêté les domaines d’intervention du Fonds régional APE (Forape), fonds qui devrait, en attendant l’accord de l’UE, être logé auprès de la Banque de développement des Etats de l’Afrique centrale. En attendant la prochaine réunion du Comité ministériel prévue à Bruxelles entre le 25 et le 29 octobre 2007, la société civile d’Afrique centrale, conduite par l’ACDIC de Bernard Njonga devra rester mobilisée, pour éviter que les commissaires européens et les négociateurs en chefs de l’Afrique centrale ne se grisent d’avoir entre les mains un chèque en blanc, sur le contenu définitif des accords de partenariat économique que l’Union européenne tient à voir signés avant la fin de l’année, accords dans lesquels, l’Afrique centrale, sans économies fortes, semble mal partie !
François BIMOGO
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