Présidentielle algérienne : la possibilité Benflis (peuple d’Algérie, réveille toi !)
La deadline approche, et n'aura jamais aussi bien porté son nom. Abdelaziz Bouteflika, plus mort que vivant, a de grandes chances d'être "réélu le 17 avril. Pourtant, tout est encore possible. Les jeux ne sont pas faits. Les Algériens doivent s'en convaincre. Bouteflika n'est pas incontournable. Des alternatives existent. L’une d'entre elles, plus particulièrement, semble à même de désincruster le président sortant du trône sur lequel il a mis le grappin. Elle porte le nom d'un ancien chef du gouvernement : Ali Benflis.
La vidéo du passage d'Abdelaziz Bouteflika devant le Conseil constitutionnel a fait jaser. On y voit un vieil homme se lancer dans un galimatias sans queue ni tête, destiné à prouver qu'il est encore doué de raison, de parole et de gestes, AVC ou pas, mais produisant l'effet inverse : l'homme est visiblement au bout du rouleau, il se meurt plutôt qu'il ne se meut. Un pantomime grotesque qui aura pourtant suffit au Conseil constitutionnel. Emballé c'est pesé, sa quatrième candidature à la magistrature suprême a été enregistrée.
Sitôt l'annonce de cette candidature officialisée, on a assisté à une levée de bouclier d'un certain nombre de membres de l'opposition. Soufiane Djilali a ouvert le bal, en annonçant qu'il annulait sa participation à la présidentielle. Jugeant le scrutin joué d'avance, l'ancien premier ministre Ahmed Benbitour et le général à la retraite Mohand Tahar Yala lui ont emboîté le pas. Même son de cloche pour les partis Rassemblement pour la culture et la démocratie, Mouvement de la société pour la paix et Nahda, qui appellent également à bouder les isoloirs.
En marge de ces mouvements de protestation passifs, une rumeur enfle au sein des élites d'Alger, incarnée par le mouvement Barakat (ça suffit !). Composée de membres de l'intelligentsia algéroise, cette lame de fond rencontre un bel écho dans la Ville blanche et dans les médias étrangers, mais n'invite pas les Algériens à se ruer sur les urnes.
Voici donc une élection dont l'un des candidats, grabataire, est désigné partout comme le tenant d'un système gérontocratique périmé, et dont la simple annonce de la candidature suffit à écoeurer l'opposition. Et que fait-elle, cette opposition, plutôt que d'encourager à voter massivement contre Bouteflika ? Elle persuade les électeurs contestataires de se détourner des urnes, c'est à dire de ne pas faire avancer le schmilblick. Incompréhensible.
Cette attitude ne peut avoir qu'une explication : la résignation. On peut comprendre ce sentiment. On peut aussi s'en révolter. Si Bouteflika a concentré plus de 90 % des votes en 2009, après avoir déjà été élu haut la main lors des deux précédentes présidentielles, l'espoir n'a jamais été autant permis qu'aujourd'hui. L'homme est fantoche. Les Algériens ne peuvent pas ne pas s'en rendre compte. Il est par ailleurs ébranlé par la présence sur la ligne de départ d'un sérieux candidat, présenté partout comme son principal rival : Ali Benflis.
Benflis, c'est bien simple, prend le contrepied de Bouteflika sur à peu près tous les points. Alors que la politique du candidat-président se résume à exploiter les réserves déclinantes d'hydrocarbures du pays, Benflis souhaite rompre avec ce système rentier, pour encourager une économie diversifiée et l'ouverture du marché algérien à l'international, bilatéralement. Adieu, ainsi, la règle du 51/49 % (qui consiste à limiter la part du capital étranger investie) dans les secteurs de l'industrie manufacturière, de la transformation agroalimentaire, du tourisme, de l'hôtellerie et de la chimie, par exemple. Mais Benflis entend également « réformer le règlement de la Banque d’Algérie régissant la circulation des capitaux afin de permettre, dans un cadre défini et des critères clairs et transparents, les prises de participation d’entreprises algériennes dans des entreprises étrangères ».
L'homme milite aussi pour une justice et des médias plus libres et indépendants, un renforcement des libertés syndicales et d'association, une limitation à deux mandats présidentiels, un meilleur accès aux soins, au logement, à l'éducation, et veut partir en croisade contre la corruption. Bref, tous les ingrédients semblent réunis pour opérer une transition salvatrice, et passer d'un Etat empêtré dans les sables mouvants du passé à une République moderne, tournée vers l'avenir.
Une question reste en suspens. Qu'attend le peuple algérien ? La possibilité lui est offerte de changer la donne, de s'inscrire de plain-pied dans l'histoire, de faire bouger les lignes. Qu'est-ce qui l'empêche de s'en saisir ? Rien. Si Bouteflika passe, il ne pourra s'en prendre qu'à lui-même.
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