Rébellion libyenne : après l’euphorie, la modération
Après l'approbation unanime de Bruxelles et d'Istanbul, les émissaires des insurgés se sont vu ouvrir, mercredi 20 juillet, les portes de l'Elysée, mais doivent tout de même faire face à un niet modéré de Moscou.
Le Comité national de transition, l'organe officiel de la rébellion libyenne, multiplie, depuis plus de deux semaines, les démarches pour être reconnu comme la seule et unique représentation politique et militaire de la Libye. Après le oui de Bruxelles et d'Istanbul, les émissaires des insurgés se sont vu ouvrir, mercredi, les portes de l'Elysée, mais doivent tout de même faire face à un niet modéré de Moscou.
A Istanbul, le 15 juillet 2011, ils étaient en tout 35 Etats à reconnaître le CNT comme le seul et unique représentant des intérêts de la libye.
Les Etats-Unis qui étaient, jusqu'ici, assez réticents à l'idée d'une reconnaissance du CNT, ont finalement décidé de reconnaître celui-ci « après un exposé convaincant de l’un des dirigeants du Conseil devant le groupe de contact », dira Mark Toner, porte-parole du Département d'Etat américain.
Une reconnaissance apparemment bien accueillie au pays de l'oncle Sam où des sénateurs américains, notamment républicains - dont John McCain qui dès le début du conflit avait manifesté son soutien à la rébellion - ont publié un communiqué saluant la décision américaine de reconnaître le CNT, avant d'appeler à une représentation diplomatique des Etats-Unis à Benghazi, fief de la rébellion.
Ce qui laisse entendre qu'ils entreprendront des démarches pour débloquer une partie des 30 milliards de fonds propres libyens gelés par les autorités américaines au début du conflit.
Et l'Elysee...
Ce mercredi 20 juillet 2011 au matin, deux chefs militaires de la rébellion libyenne de Misrata, le général Ramadan Zarmouh et le colonel Ahmed Hachem, étaient reçus à l'Elysée.
Une rencontre à huit clos dont Bernard-Henry Lévy, qui a organisé leur venue à Paris, dira quelques mots, soulignant que les deux chefs rebelles étaient venus demander à la France de convaincre les Etats arabes d'accepter de leur apporter leur soutien en leur fournissant « ce dont ils ont besoin pour faire face aux colonnes infernales dont dispose encore Kadhafi ».
« S'il y a des émissaires du CNT, c'est parce qu'ils viennent présenter leur projet, leur politique, leurs ambitions immédiates au gouvernement français, qui est le premier gouvernement a les avoir reconnus... », déclarera plus tard, Gérard Longuet, le ministre français de la Défense.
La France, faut-il le rappeler, avait, fin juin dernier, reconnu avoir violé la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l'Onu en parachutant des armes aux insurgés du Djebel Nafoussa, dans l'ouest libyen.
Modération de Moscou
Les pays qui ont pris part à la réunion du groupe de contact sur la Libye, vendredi à Istanbul, reconnaissaient donc le CNT comme la seule instance représentative du peuple libyen. Seule la Russie, encore convaincue qu'une solution diplomatique peut-être trouvée, a, jusqu'ici, opposé un niet modéré à l'idée de cette reconnaissance unilatérale.
Et ce mercredi 20 juilllet, au moment où les rebelles étaient reçus à l'Elysée, le ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, recevait son homologue libyen. Le communiqué publié à l'issue des discussions de cette rencontre laisse entendre qu'un « compromis est toujours possible entre le régime de Mouammar Kadhafi et les rebelles » . La Russie réaffirme sa position, selon laquelle l’ingérence de certains pays et le largage d’armes aux rebelles restent une alternative qui n’aidera pas à résoudre le problème.
Une position que le ministre libyen, Abdulatif al-Obeïdi, dans sa déclaration aux agences de presse russes, qualifiera de « sage et pondérée ».
Mais si le ministre libyen, lui, affirme que le départ de Kadhafi « n'est pas sujet à discussion », la Russie, elle, en dépit de sa position « sage et pondérée », se prononce pour le départ du guide libyen.
En somme, tout le monde reste bien d'accord, aujourd'hui, que l'avenir de la libye se jouera sans Kadhafi. Mais après l'annonce assez controversée de la prise de Bréga par la rébellion, il ne fait aucun doute que tout dépendra de l'issue des combats entre les forces loyalistes et les insurgés dont les nombreuses démarches, ces derniers jours, ne semblent pas tout à fait justifier l'enthousiasme affiché par une certaine presse.
Abdoulaye Jamil Diallo
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