Et avant cette introduction, je voudrais vous dire que de mon point de vue, le problème soulevé par les évènements du Xinjiang sont de quatre ordres :
- Une question de politique intérieure relevant exclusivement de la souveraineté de la République Populaire de Chine.
- Une question concernant le politique des nationalités telle qu’elle peut se poser partout dans le monde et, comparativement, dans un pays communiste.
- Une question ayant pour sujet l’existence d’une idéologie spécifiquement musulmane, la situation des Musulmans dans le monde, le rôle des religions et en particulier de l’Islam dans les politiques nationale et internationale.
- Un problème de relations internationales, en particulier des relations de la République Populaire de Chine avec les pays les plus développés du système capitaliste et impérialiste qui visent à saper le prestige et l’autorité du Parti Communiste Chinois et à démanteler la Chine comme ils l’ont fait avec l’URSS. Et s’ils échouent dans leurs tentatives, ils utiliseront les problèmes qu’ils ont contribué à créer pour stigmatiser « la politique des droits de l’homme en Chine ».
C’est donc un thème très important qui mérite une grande attention. Et je vous remercie de solliciter l’avis d’une personne aussi modeste que moi.
Introduction et généralités avant de répondre :
La civilisation islamique ou musulmane est née autour du bassin culturel méditerranéen. Elle y a participé à l’évolution des connaissances à un moment où le reste du monde était dans une situation d’obscurité. Puis elle a diffusé partout dans le monde et, actuellement, elle est représentée dans tous les continents où elle a toujours participé à un progrès de la civilisation humaine.
La civilisation islamique ou musulmane est beaucoup plus récente que la civilisation chinoise. Mais elle a apporté beaucoup au monde entier et y compris à la Chine. De même que la civilisation de la Chine, en passant par l’aire de civilisation islamique, a apporté beaucoup au monde musulman et au monde entier sans souffrir les humiliations imposées par l’Occident à partir du XVIème siècle.
Les civilisations connaissent des évolutions positives et négatives. Quand des civilisations ont connu des moments de grandes brillance, elles laissent des souvenirs très forts et un sentiment d’identité très puissant bien longtemps après, même quand les peuples considérés se trouvent dans l’arriération et la décadence.
Une telle situation est bien connue par le peuple Han qui a continué à croire en sa destinée et en sa propre grandeur malgré les reculs et les vicissitudes que lui a parfois imposé l’histoire.
Et heureusement pour le monde islamique, il dispose d’une démographie très dynamique. À long terme, la richesse, c’est l’homme !
Mais, le monde musulman se trouve dans une situation politique, économique et culturelle très difficile : il n’est plus à l’avant-garde dans aucun domaine de l’activité humaine. Son territoire dispose de grandes richesses naturelles, notamment en hydrocarbures utiles à la terre entière. Mais il l’est pas capable de gérer lui-même leur commercialisation ni en fixer les prix.
Les USA contrôlent des territoires musulmans, le Royaume-Uni contrôle des millions de personnes de culte musulman, la France aussi. La République Allemande pourtant héritière de la défaite de la Seconde Guerre Mondiale et soumise en principe à des restrictions militaires, entraîne ses armées à tuer des êtres humains dans un pays musulman qui s’appelle l’Afghanistan. Israël a été implanté par la force et de manière arrogante sur un territoire musulman, dans une région qui est porteuse de symboles identitaires essentiels. L’inde compte beaucoup de Musulmans. La Chine aussi compte beaucoup de Musulmans.
Quand un pays musulman compte parmi ses citoyens des Non-Musulmans et particulièrement quand il s’agit de Chrétiens, alors l’Occident organise des rébellions, des guerres de sécession : Timor oriental. Ou bien, des opérations militaires internationales sont menées afin que la minorité chrétienne dispose d’une position favorisée, sans rapport avec son nombre : Liban, Bosnie.
Beaucoup de pays possèdent aujourd’hui l’armement nucléaire. Et cela confère à leur territoire une sanctuarisation qui garantit leur indépendance nationale. Mais quand des pays musulmans veulent obtenir un tel armement ou tout simplement quand ils veulent maîtriser la technologie balistique, ils sont soumis à des pressions intenses pour rester faibles face aux intérêts étrangers.
De plus, la majorité des gouvernements, des élites de pays musulmans sont contrôlées par des pays impérialistes étrangers.
De fait, dans beaucoup de pays, les Musulmans sont, dans leur pays, le pays où ils sont nés, des citoyens de seconde zone ; leurs droits fondamentaux ne sont pas respectés dans la pratique. Leur dignité, leurs aspirations religieuses, culturelles, économiques, politiques ne sont pas prises en compte. Dans certains cas des efforts sont développés pour leur faire changer leur nom, pour les faire renoncer à leur religion sous la pression, pour leur faire oublier la réalité historique lumineuse de leurs ancêtres.
Bien sûr les pays musulmans sont très différents les uns des autres. Bien sûr les peuples musulmans sont très différents les uns des autres. Et bien sûr la situation des Musulmans minoritaires est très différente selon le pays considéré.
Mais, il existe chez les Musulmans, croyants ou athée, un sentiment commun d’appartenance à une civilisation très importante dans l’histoire de l’humanité. Que l’on soit Français musulman ou Britannique musulman ou Algérien ou Marocain ou Saoudien ou Iranien ou Bengali ou Kashmiri ou Pakistanais ou indonésien ou Philippin, etc.
Je pense que les Chinois, en particulier que le peuple Han qui fédèrent plusieurs peuples au sein d’une grande civilisation chinoise doit connaître ce sentiment.
Quand il est bien compris, ce sentiment d’appartenance à la communauté musulmane n’est pas un sentiment négatif, tourné contre d’autres peuples ou contre un État particulier : on est un meilleur ami quand on sait qui on est soi-même et qui est notre interlocuteur. Je pense que les Chrétiens, que les adeptes de Confucius, que les Bouddhistes éprouvent le même sentiment. La vie, c’est la diversité.
Maintenant, le problème du Xinjiang se pose au XXIème siècle. Le marxisme a eu la possibilité historique de prouver son bien-fondé : si on règle correctement les problèmes de classe, le reste et notamment la question des nationalités, est facile à régler.
Et en même temps, on sait que le fait de se dire marxiste ne garantit pas à lui seul le succès : l’URSS était marxiste. Les idéologues soviétiques ont même beaucoup parlé et écrit sur une entité nouvelle « le peuple soviétique », fusion harmonieuse de tous les peuples de l’URSS.
Or j’ai vécu en URSS. J’avais un préjugé très favorable au régime. Mais je constatais que le régime surestimait les Russes par rapport aux autres peuples. Le régime soviétique était nationaliste ! Moins que les autres régimes capitalistes. Mais il l’était un peu. Et dès qu’ils ont pu le faire, les peuples composant l’URSS sont partis à la recherche de leur destin dans l’indépendance… parfois en s’alliant à des ennemis du peuple frère russe !
L’URSS contenait-elle des peuples traîtres en son sein qui se sont révélés dès que la possibilité leur en a été donnée ?
La réponse est non.
L’URSS avait atteint l’âge de 70 ans ! Cela représente deux générations ; le régime soviétique avait éduqué tous les citoyens du pays depuis leur naissance, pendant deux générations. Le régime soviétique avait administré tous les citoyens soviétiques pendant deux générations. Il a alimenté lui-même les sentiments anti-soviétiques nationalistes.
Bien sûr, l’Occident capitaliste et impérialiste a dépensé des sommes pharamineuses pour aider les citoyens les plus nationalistes antisocialistes, pour donner une image paradisiaque du capitalisme, pour corrompre les élites soviétiques russes et des minorités nationales.
Mais cela n’explique pas tout.
J’ai participé à des meetings politiques en URSS où on les officiels soviétiques répétaient la thèse de « l’apport, de l’aide du grand peuple frère russe aux minorités nationales »…
Parfois, je suis personnellement intervenu contre cette thèse parce qu’elle était fausse. J’ai déclaré que le peuple russe en aidant les autres peuples s’aidait lui-même. Parce que sans ces peuples à ses côtés, aux moments les plus difficiles de son histoire, alors il aurait été vaincu par ses ennemis. Cela était valable lors de la Révolution d’octobre, de la Guerre civile et aussi lors de la Seconde Guerre Mondiale.
Les soviétiques ont aidé les combattants algériens dans la guerre anticoloniale. Personnellement, j’étais au maquis et j’y ai reçu des armes russes et des équipements chinois.
Mais le peuple algérien, en luttant pour sa dignité et son indépendance contre le colonialisme français par la chair de ses enfants morts par centaines de milliers a affaibli le système capitaliste mondial. Et ce faisant, il a aidé l’URSS. N’est-ce pas une conséquence du combat des Algériens quand de Gaulle a quitté l’OTAN ? Et cela n’a-t-il pas diminué les menaces sur l’URSS ?
Oui, dans des meetings à l’Institut Polytechnique de Kiev, en tant que communiste, j’ai déclaré à mes camarades soviétiques :
« Il n’y a pas de grand et de petit frère. Il n’y a pas de grand peuple et de petit peuple. Il n’y a jamais d’aide désintéressée.
« Il y a coopération autour de certains objectifs communs bien compris.
« Ne dites pas que vous aidez le peuple vietnamien. Vous devez les aider parce qu’il en va de l’intérêt de l’URSS, de l’Algérie, de tous les pays socialistes de la planète et de tous les pays en voie de développement.
« Nous y avons tous intérêt et il n’y a pas d’autre voie que la solidarité internationaliste. »
Les camarades soviétiques se sont trompés sur le rôle et la place du peuple russe au sein de l’URSS. Ils ont froissé le sentiment national, y compris chez des militants du PCUS. À la première crise sérieuse, l’URSS a éclaté.
Je considère que de nos jours, la Chine est le rempart marxiste le plus important pour protéger le développement harmonieux de l’humanité dans toutes ses composantes. Je n’ai jamais été en Chine. Je suis un Français. Je suis aussi un Algérien. Je suis un athée d’origine musulmane.
Je ne voudrais pas que les dirigeants chinois fassent les mêmes erreurs que les camarades soviétiques. Maintenant, les Russes regrettent de se trouver plus seuls, mais il est trop tard. Du moins pour changer les choses dans le présent.
Les questions et les réponses
1/ Comment voyez-vous les émeutes de Xinjiang ? Quels sont leurs origines ?
Je pense qu’elles ont deux origines distinctes :
a) Une origine nationaliste anti-chinoise.
Elle est le résultat d’une action concertée depuis l’étranger, moyennant des investissements financiers et médiatiques importants en direction de certains membres de l’élite musulmane du Xinjang qui ne voit que ses intérêts immédiats, c’est-à-dire sa rétribution par des intérêts étrangers opposés au développement, à la puissance et au rayonnement de la Chine.
Ici le nationalisme étroit, égoïste devient le complice de l’ennemi extérieur.
Les exemples à suivre de près sont ceux de l’Ukraine, de la Géorgie, de la Tchétchénie.
À mon avis, la Russie de Poutine a mal géré le dossier de la Tchétchénie par un sage exagéré de la force : il a semé les graines des vengeances des fils et des filles des deuxième et troisième générations de ceux qui ont été assassinés aveuglément par les forces fédérales.
Il n’est jamais trop tard pour réparer. Mais il faut vraiment réparer : en argent, en dignité, en souveraineté locale et en réelle participation à la souveraineté fédérale : si le gouvernement russe maintient de bonnes relations avec Israël, les Tchétchènes ne le ressentiront pas comme « leur gouvernement ». Ils seront alors prêts pour, tôt ou tard, s’engager dans la voie de la sécession.
b) Une origine de malaise populaire
Les idéologues racistes, nationalistes du Xinjiang n’ont pas pu avoir de succès auprès des masses populaires si les autorités chinoises n’ont pas commis de fautes : froisser les autochtones soit par une présence trop massive, soit par un statut inférieur de fait même si en droit tous les citoyens chinois sont égaux.
Il est évident que le progrès matériel doit précéder les mesures d’intégration démographique et non l’inverse.
La création du peuple soviétique aurait du être beaucoup plus progressive et tenir plus compte des spécificités nationales locales. Le pouvoir politique a parfois tendance à surestimer le taux de réalisation de ses objectifs non quantitatifs comme l’intégration culturelle ou démographique. Souvent la direction centrale de l’État dispose de données embellies par les autorités locales.
Ce malaise est en plus renforcé par un développement économique intensif, par des changements rapide du mode de vie qui appellent des investissements culturels et éducatifs plus importants.
2/ Le gouvernement chinois a déployé de nombreux moyens pour restaurer l’ordre. D’après vous, ces mesures sont-elles nécessaires ? Pourquoi ?
Au Tibet comme au Xinjiang, le gouvernement chinois a agi avec beaucoup de fermeté et de modération.
La faute aurait été de sur-réagir comme le fit Monsieur Poutine en Tchétchénie. Mais en même temps, il est absolument nécessaire de rétablir l’ordre. Il ne faut pas oublier que les ennemis extérieurs sont en observation et si jamais, ils décèlent une faiblesse à ce niveau, ils ne feront que redoubler d’effort jusqu’à la chute du régime de la République Populaire de Chine.
Ce qui est visé c’est en premier lieu, la mise en cause du pouvoir du Parti Communiste Chinois et son hégémonie pacifique sur toute la population de Chine. Par la suite, l’objectif serait de démanteler la Chine afin qu’elle ne présente plus de résistance aux intérêts étrangers.
L’enjeu est vital. Aucune faiblesse ne saurait être autorisée. Mais, comme on dit en français, il faut une main de fer dans un gant de velours. Je pense que le pouvoir chinois a su régler le problème à chaud et de manière adéquate : le président Hu Jintao a interrompu sa visite en Italie et est rentré pour s’occuper en personne du retour à l’ordre du Pays. Cette décision a montré à l’étranger et aux peuples de la Chine que le problème des nationalités occupe une place importante dans la politique des dirigeants du pays.
3/ Les émeutes de Xinjiang sont-elles comparables avec celles de la banlieue de Paris ? Pourquoi ?
Il n’y a rien de comparable entre les évènements du Xinjiang et les émeutes de la banlieue de Paris.
Les évènements du Xinjiang sont le fait d’une nationalité de la République Populaire de Chine qui dispose de son territoire, sa langue, sa religion, son administration. Les problèmes posés sont ceux du niveau de l’immigration des autres nationalités, du travail disponibles pour les uns et pour les autres, du niveau des responsabilités réservées aux uns et aux autres, du niveau de vie au Xinjiang et dans le reste de la Chine, de la rapidité des changements économiques et techniques dans le pays, de la mesure dans laquelle le gouvernement chinois tient compte des aspirations de la population de chacune des nationalités de la République Populaire de Chine.
La République Populaire de Chine est dirigée par le Parti communiste de Chine sur la base du marxisme-léninisme avec clairvoyance et souplesse dans le contexte historique du passage de la dictature de classe vers une société de l’aisance matérielle, dirigée par le PCC qui veille à l’hégémonie de la classe ouvrière, dans l’harmonie de toutes les classes laborieuses qui contribuent au bien-être social.
Le pays connaît actuellement de forts bouleversements économiques et sociologiques du fait d’un développement très rapides dans une période historique courte. Cela crée forcément des problèmes ici ou là, des formes d’inégalité entre les classes et au sein d’une même classe, selon la région.
Même si on peut dire que ces problèmes sont nés d’un manque de vigilance des cadres communistes ; en même temps on ne peut pas ignorer que ces problèmes sont naturels et inévitables : ce sont des problèmes de croissance de l’économie chinoise.
Ces problèmes sont accentués par les ennemis depuis l’étranger.
Les émeutes de la banlieue parisienne n’ont rien de commun avec cela.
Bien sûr dans les deux cas, les fauteurs de troubles sont des Musulmans. Mais cela ne suffit pas pour comprendre la nature des évènements. La presse capitaliste a présenté les troubles de la banlieue parisienne comme identique à d’autres cas de figure sans aucun rapport.
On parle du « problème de l’Islam », on accuse « le terrorisme islamique » et on continue une politique de domination, d’exploitation de classe en mettant tout le monde dans le même sac : les Palestiniens, les Kashmiris, les Talibans, les islamistes d’Afrique du Nord, etc., etc.
Ce n’est pas sérieux, c’est de la propagande, de la confusion pour dissimuler les vraies situations et les vrais problèmes.
La France est un pays capitaliste de traditions esclavagiste, puis coloniale, puis impérialiste, puis néocoloniale, puis postcoloniale. Le gouvernement français a tiré - et à plusieurs reprises dans le XXème siècle - contre les ouvriers.
Le système économique français est fondamentalement inégalitaire. Il est basé sur l’exploitation excessive d’une classe par les autres, regroupée autour de la grande bourgeoisie, du grand capital.
Qu’y a-t-il de commun entre un ouvrier au chômage et le revenu d’un PDG de grand groupe ou un actionnaire important d’un grand monopole ? Rien !
De plus, à la différence de la Chine, en France, c’est le grand patron de l’économie qui contrôle les politiciens. Le capital est au pouvoir.
La situation en France est que le capital trouve plus facile d’endormir la classe ouvrière en lui présentant comme concurrent et ennemi une autre partie de cette même classe ouvrière : les Musulmans.
Et de cette façon, des Français, parce qu’ils sont musulmans, sont privés de formation adéquate, de travail, de soins.
Ils s’énervent.
Alors des lois à visant leur groupe sociologiques mais formulées de façon universelles sont votées : lois vestimentaires (interdiction du foulard), lois sur les lieux de rencontre (interdiction de se réunir au bas de l’escalier où on habite), des couvre-feux visant les quartiers où habitent majoritairement des Musulmans, etc.
Ils s’énervent encore.
Alors la justice et la police interviennent : beaucoup de bavures policières avec des jeunes Français de culte musulman, décédés dans les locaux de la police, beaucoup de condamnations lourdes. Plus de 70% des prisonniers de France sont des Musulmans.
Dans les prisons, les conditions faites à ces prisonniers sont cruelles, inhumaines : cette année une centaine de jeunes prisonniers se sont suicidé. L’année n’est pas finie…
L’ancien Secrétaire Général de l’Onu, Monsieur Boutros Boutros Ghali, un Chrétien, ami de la France, ancien président de la francophonie, a déclaré : « la France reproduit dans ses banlieues le modèle colonial »
Le gouvernement français mène une politique étrangère pro-sioniste, anti-palestinienne sans tenir compte des sentiments de dix millions de Musulmans. La France compte en tout soixante millions de personnes. Or la télévision publique passe tout le temps des images israéliennes racistes. Les gouvernements musulmans qui sont présentés comme « des amis de la France » sont des gouvernements corrompus non représentatifs, des valets de l’Occident qui ne songent pas à développer leur pays et à instruire leurs enfants.
Les Français de culte musulman sont comme au XVIème siècle étaient les Français de culte chrétien réformé (les Protestants) : des sous-citoyens. La France vit une guerre civile larvée : déjà des jeunes Musulmans, dans leurs quartiers, lancent des pierres aux policiers et aux autres représentants de l’État. Il y eut des tirs d’armes de guerre isolés.
Alors ce qu’on appelle les émeutes des banlieues, ce n’est que le début. Si rien ne change, la France va vers une guerre civile explosive du type des « Blacks Panthers » aux Usa dans les années 1960 et 1970.
Il n’est pas question de sécession ni d’indépendance.
Ces jeunes sont Français et ils veulent le rester. Ils réclament sans le savoir des crédits pour l’Éducation Nationale dans leurs quartiers, des formations professionnelles sérieuses, ils veulent aller à l’université et dans les grandes écoles françaises, l’accès à des postes en rapport avec leur qualification.
La situation en France est beaucoup plus grave qu’au Xinjiang parce qu’elle conteste le système économique et politique du pays dans son ensemble. La devise de la France est : liberté, égalité fraternité. Or ces jeunes, n’en voit rien ! e qu’ils voient, c’est qu’ils ont mis au ban de la société pour satisfaire des accords de classes qui corrompent une partie de la classe ouvrière française dans des alliances sordides avec la petite et la grande bourgeoisie.
En France, on assiste à l’assimilation d’une exploitation de classe avec une exploitation de race ou de religion.
C’est une démarche volontaire des idéologues du capitalisme française pour dissimuler la nature de classe du régime. Et pour le moment ça marche : on trouve des ouvriers Chrétiens s’opposant aux ouvriers Musulmans sur tel ou tel problème sans aucun relation avec les rapports de production.
Voilà en quoi le problème des émeutes de banlieues en France – c’est un pur problème de lutte de classes – n’a rien à voir avec les problèmes de nationalité du Tibet ou du Xinjiang au sein d’une fédération dirigée par un parti communiste.
4/ Selon vous, la couverture des émeutes de Xinjiang par les médias occidentaux est-elle différente par rapport avec celles du Tibet ?
Non. Il n’y a aucune différence sur le fond. Le but est le même : d’abord affaiblir le rôle du Parti Communiste Chinois. À long terme, démanteler la Chine.
La spécificité de la couverture des évènements du Xinjiang par les médias occidentaux consiste en un rapprochement de ces évènements avec les mouvements politiques anti-impérialistes dans le monde musulman.
En gros : l’Islam est une religion terroriste. La Chine le découvre aujourd’hui. Donc, elle devrait s’associer à la politique post-coloniale des USA et de l’Occident en Irak, en Afghanistan, au Pakistan, en Palestine, etc., à la politique impérialiste en Afrique, etc.
Alors, nous les Occidentaux, nous sommes prêts à aider la direction chinoise si elle nous aide aussi.
C’est un piège qui est ouvert sous les pieds des dirigeants chinois : les médias occidentaux en décrivant ce qui se passe au Tibet ou au Xinjiang avec les mêmes termes que ce qui se passe dans les régions où des peuples se défendent contre l’impérialisme veulent d’une part présenter la Chine comme un pays impérialiste, un pays capitaliste.
Et d’autre part, ils sont à la recherche de dirigeants chinois qui acceptent de jouer ce rôle. Je pense qu’ils n’auront aucun succès pour mobiliser des dirigeants chinois aux côtés des dirigeants impérialistes dans des causes impérialistes.
5/ Face aux menaces de séparatistes de Xinjiang qui cherche toujours à déstabiliser la Chine, est-ce que vous pouvez faire quelques propositions ?
Je ne voudrais pas être prétentieux. Je pense que le gouvernement chinois sait bien ce qu’il doit faire. Je suppose que cette question est une forme de sondage. Et je veux bien vous donner mon point de vue en toute humilité et en toute camaraderie... si cela pouvait servir à quelque chose.
Les principes :
Le marxisme moderne est comme toujours une idéologie sans dieu, sans surnaturel, sans métaphysique. Le marxisme est une idéologie modeste et pratique : il y a des questions sur l’Univers et sur la vie qui sont profondes et sans réponse.
Mais l’homme sait déjà beaucoup de choses. Notamment sur la vie sociale où le marxisme excelle.
Le marxisme n’a rien contre les religions à condition qu’elles ne fassent pas de politique.
Le marxisme respecte les sentiments religieux et les sentiments d’appartenance à une communauté religieuse.
Le marxisme applique les principes humanistes à tous les êtres humains sans exception et de manière égale. Les Musulmans ne sont pas une exception. Il rejette le système de « deux poids deux mesures ».
La pratique :
Les citoyens chinois (de culte musulman ou d’un autre culte) doivent voir que le gouvernement respecte leurs traditions et leurs croyances religieuses quand ils en ont.
Chaque fois que possible, le gouvernement doit rechercher la collaboration sincère et transparente avec les clergés autochtones.
Dans le territoire de leur nationalité, les citoyens chinois de culte musulman ou d’un autre culte ne doivent pas se sentir dirigés par des citoyens d’une autre nationalité : en nombre et en niveau de responsabilité.
Le gouvernement chinois a la possibilité de trouver le nombre suffisant de cadres autochtones marxistes, disciplinés et idéologiquement solides : sur ce sujet Lénine s’est opposé à Staline.
Si Staline avait suivi les conseils de Lénine, l’URSS n’aurait pas éclaté en quelques années, comme une pastèque qui tombe par terre.
Le gouvernement chinois doit veiller à l’égalité de niveau de vie entre les territoires des différentes nationalités, entre les villes et les campagnes, entre les différentes classes sociales. Bien sûr l’égalité absolue est impossible ; mais les inégalités doivent rester dans des limites acceptables.
Pour le Xinjiang : quand des injustices sont commises dans le monde contre les Musulmans, le gouvernement chinois doit les dénoncer et faire savoir sa position à ses citoyens de culte musulman. Ils se sentiront plus solidaires de leur gouvernement. Plus particulièrement, il doit limiter au maximum ses relations avec Israël.
Les délits de propagande séparatiste ou dirigée contre une autre nationalité de la République Populaire de Chine doivent être très lourdement sanctionnés. D’une façon générale, l’État doit développer une pédagogie juridique au sein de la population et il ne doit pas hésiter à faire respecter le droit et à sanctionner les contrevenants.