Sénégal : Des élèves marchent 20 km pour étudier à un collège public
Incroyable, mais vrai. Malgré la multiplication des collèges publics d’enseignement moyen (Cem) de proximité au Sénégal, obtenue grâce à l’allocation par l’Etat de 40% de son budget de fonctionnement à l’éducation, des collégiens continuent de faire au moins 20 kilomètres à pied, en aller et retour, avant de bénéficier de l’un de leurs droits fondamentaux : le droit à l’éducation. Cela se passe dans la communauté rurale forestière de Boutoupa Camaracounda, une circonscription administrative située au sud-est de Ziguinchor, principale ville de la partie méridionale du Sénégal.
Le fait reste incroyable ou tout au moins surprenant. Car, dans ce contexte où l’Etat du Sénégal a alloué, selon les informations officielles, 40% de son budget de fonctionnement à l’éducation, on ne peut pas concevoir qu’il existe le moindre recoin du pays de
Selon M. Lucien Gomis qui nous a accordé un entretien à Ziguinchor, situé à
A titre d’exemple, le patron des élus locaux dira que « l’année dernière, trois élèves sont restés trois mois sans avoir de tuteur à Agnack, parce que le Cem le plus proche est à Agnack. Ils allaient le matin à pied pour revenir le soir ; ils l’ont fait pendant trois mois ». Rappelant leur volonté de maintenir les filles à l’école, le président du Conseil rural de Boutoupa Camaracounda évoquera, par ailleurs, le cas des filles qui « effectuaient cette distance chaque jour ». Découragées par la longueur du trajet, a-t-il ajouté, « beaucoup (d’entre elles) abandonnent ».
A qui la faute ?
A qui la faute relative à ce dérèglement de la carte scolaire dans la région sud du Sénégal ? On ne saurait y répondre avec exactitude. Mais deux choses sont claires. Ce sont d’abord la volonté affichée par Dakar de créer partout où cela est possible des collèges de proximité, mais aussi l’effort abattu par les populations de cette communauté rurale pour alléger la souffrance de leurs enfants. Sur ce, M. Lucien Gomis affirme : « cause pour laquelle l’année dernière, on a construit un collège, mais malheureusement, on a pas eu la chance de l’ouvrir cette année. On a tapé à toutes les portes, mais on nous a dit que nous étions en retard... On aurait dû nous comprendre, parce que, j’ose dire que nous sommes la seule communauté rurale au Sénégal, qui n’a pas de collège d’enseignement. C’est vraiment un handicap pour nous les parents et nos élèves ». En l’occurrence, ce Cem leur aurait été offert par des partenaires privés espagnols.
Rappelons que la carte scolaire de la communauté rurale de Boutoupa Camaracounda, très forestière, a été complètement endommagée à cause de la crise indépendantiste en Casamance. Treize écoles y existaient avant et pendant ce conflit qui a duré près d’un quart de siècle. A cause des affres de celui-ci, huit d’entre elles ont dû fermer. Actuellement la reconstruction des écoles de Laty et Niadiou situées dans la même zone, est en projet.
A retenir aussi que lors d’une réunion d’évaluation de l’année scolaire écoulée au Sénégal (1er octobre 2006 - 31 juillet 2007), présidée par le ministre de l’Education, Pr. Moustapha Sourang, il a été indiqué que la région de Ziguinchor comptait « 77 collèges d’enseignement moyen et 32 privés ». D’autre part, un document publié le même jour, fait état de ce qui suit : « l’enseignement moyen s’est développé dans le monde rural avec la création de collèges de proximité dans les chefs-lieux d’arrondissement et de communauté rurale mais aussi dans certains villages. On en a créé 20 pour cette année. Et nous projetons d’en ouvrir 12 à la rentrée prochaine » dans la région de Ziguinchor (sud du Sénégal).
Cette « rentrée prochaine » a eu lieu le 1er octobre 2007 pour le corps enseignant sénégalais et le 8 octobre 2007 pour les élèves. Mais Boutoupa Camaracounda, selon les termes de M. Lucien Gomis, reste toujours « la seule communauté rurale du Sénégal, qui n’a pas de collège ».
Selon un document officieux publié vendredi par le Syndicat des enseignants libres du Sénégal, authentique (Sels/a), les « 40% du budget de fonctionnement... représentent en chiffres 249 milliards (soit environ 415 millions de dollars US) dont les 106 milliards vont dans les salaires des enseignants et le reste est de 143 milliards : où sont ces 143 milliards qui ne vont pas dans les classes ? Disent-ils dans les investissements, les services de la dette contractée auprès des bailleurs de fonds,
Boubacar DIASSY
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