Taksim : la goutte d’eau
Le présent papier ne veut pas s’épancher sur les effets et les causes d’une contestation dont tout le monde aura peu ou prou compris de quoi il s’agissait. Rappelons juste que le mouvement n’oppose pas contrairement à ce que le réflexe dialogique fait souvent perler, un camp à un autre. C’est surtout la réaction longtemps réprimée d’une frange républicaine de la population contre un autocrate propagandiste qui utilise sournoisement quelques outils démocratiques pour asseoir la légitimation de son pouvoir. L’utilisation que fait l’AKP ( parti islamo conservateur ) de la police, de la justice et des médias est la marque des dictatures les moins complexées...
D’autant voudront arguer que le pouvoir s’appuie sur le résultat des dernières élections mais c’est ignorer (ou faire semblant de ne pas le savoir) que son électorat est d’abord envouté par la religiosité du parti. C’est en brisant le tabou religieux (la Turquie de Mustafa Kemal jusqu’aux années 90 fut, malgré toutes les difficultés éprouvées, laïque) qu’Erdogan a rallié la moitié de la population de son côté. Son électorat n’a pas pas ou peu de conscience politique au sens culturel du terme. Ce sont en majorité d’anciens prolétaires que l’ouverture des marchés a arrachés de leurs terres et sur lesquels Erdogan s’appuie pour faire rugir le moteur économique néolibérale ( les pauvres ont toujours été des réserves de main d’oeuvre bon marché). Ils sont convoyés par milliers au moindre de ses déplacements. Parfois ils sont rémunérés pour assister aux emphatiques discours du gourou.
Ne tombons pas dans le piège : la frange républicaine de la population ne manisfeste son opposition ni contre cet électorat ni contre l’Islam, religion à laquelle le peuple turque adhère en grande majorité. C’est un réflexe de survie démocratique contre un pouvoir clairement oligarchique.
Paradoxe des circonstances : Les retombées économiques du pays (bonne dans le sens paradigmatique énoncé par la logique des profits) n’arrosent pas les électeurs du parti qui eux resteront au final, avec leurs illusions, les grands perdants (la nature procyclique de l’économie turque et sa dépendance aux marchés extérieurs promettent une chute vertigineuse) mais bien au contraire profitent à ceux qui, diplôme en poche, sont capables de proposer leurs atouts sur le marché du travail. Elles profitent davantage aux manifestants de Gezi...
Mais elles profitent surtout au cartel qui gravite autour de la dynastie Erdogan et qui fabrique son petit marché son offre et sa demande pour lui même (le projet de réaménagement de la place Gezi en est une des illustrations parmi des centaines d’autres dans tout le pays).
Samedi en début de soirée, sur la place Taksim, des enfants présents sur les lieux parce que le gouvernement avait promis de ne plus avoir recours « aux armes de dissuasion » (gaz lacrymogène et lances à eau) ont été gazés. La police minutieuse dans sa fourberie a commencé par mettre hors de service le stand médical où des medecins bénévoles distibuaient des premiers soins. Ils ont ensuite arrosé le parc avec des lances qui projetaient à la puissance d’un Karcher un mélange d’eau et d’acide (les photos sont explicites). Le machiavélisme du pouvoir n’a de limites que son imagination. Même en temps de guerre, de tels pratiques seraient condamnées par un tribunal international...
Le prose médiatique en Europe est tout juste bonne à faire endormir les nourrissons. Une fois de plus, c’est l’internaute qui émet l’information dans sa réalité la moins impure. Ne vous gênez pour diffuser ces photos. Elles sont suffisament explicites pour ne pas manquer d’objectivité...
Turkish Jean d'Arc
Police attaquent même dans l'enceinte de l'hopital
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