Tensions en Ukraine
Le 9 septembre 2008 aura lieu à Evian un sommet entre l’Union européenne et l’Ukraine afin de préparer un accord de partenariat. C’était l’un des sujets abordés lors de la rencontre entre Viktor Iouchtchenko et Nicolas Sarkozy à Paris le 20 février 2008. La guerre en Géorgie a compliqué la situation, car Viktor Iouchtchenko, dans un discours prononcé lors d’une parade militaire célébrant le 17e anniversaire de l’indépendance de l’Ukraine, a appelé à accélérer l’adhésion de son pays à l’Otan.
L’Ukraine est un pays de 50 millions d’habitants, sensiblement de même superficie que la France, dont le quart de la population est de culture russe. Le pays s’étend sur 1 400 km d’est en ouest. La partie orientale, limitrophe de la Russie, est une région industrielle possédant des mines de charbon, de fer et de manganèse, des puits de pétrole et de gaz, ainsi qu’une importante industrie lourde. La partie occidentale au contraire, limitrophe de la Pologne et de la Roumanie, est une région agricole.
L’Ukraine a fait partie de la Russie pendant tout le XIXe siècle. La révolution d’octobre lui a permis de prendre une brève indépendance en 1918, mais elle a été intégrée à l’URSS quelques années plus tard, en 1922. Sous la dictature de Staline, une famine provoquée par la collectivisation forcée des paysans et la réquisition de leurs récoltes a fait plusieurs millions de victimes, alors que l’Ukraine possédait les plus importantes ressources agricoles de toute l’Union soviétique. Cette famine artificielle, nommé « Holodomor » par les Ukrainiens de l’Ouest, est la principale cause de leur ressentiment pour les Russes, bien que le peuple russe ait subi les mêmes souffrances.
La victoire de l’armée russe sur l’armée géorgienne est une bonne nouvelle pour les Ukrainiens de l’Est. Leurs dirigeants politiques tiennent chaque année en Crimée un forum pour étudier les moyens de s’affranchir des pressions américaines visant à une éventuelle adhésion de leur pays à l’Otan. Ils sont soutenus par Vladimir Poutine, qui a déclaré en 2006 que l’Ukraine pourrait bien un jour être « démembrée » si elle continuait à poursuivre ce rêve. Cette menace n’est pas vaine. Gennady Basov, le leader du parti pro-russe, a expliqué qu’il est facile de couper le pays en deux : « L’économie de l’Est dépend de la Russie, celle de l’Ouest dépend de l’Europe. Les gens de l’Est parlent russe, ceux de l’Ouest parlent ukrainien. A l’Est on pratique la religion orthodoxe, à l’Ouest la religion catholique romaine. »
Viktor Iouchtchenko craint que la défaite de la Géorgie pousse la Crimée à faire sécession. La République autonome de Crimée, grande comme la Belgique, est une presqu’île qui se détache de l’Ukraine en s’enfonçant dans la mer Noire qui borde toutes ses côtes, sauf pour la côte Nord-Est, baignée par la mer d’Azov (voir la carte). Elle fait juridiquement partie de l’Ukraine depuis 1954, dont elle constitue une République autonome. Elle compte 2,5 millions d’habitants, dont 65 % sont d’origine russe, 22 % d’origine ukrainienne et 10 % des Tatars.
Iouchtchenko n’a pas tort, car les habitants d’origine russe acceptent difficilement que la Crimée fasse partie de l’Ukraine. Depuis dix-sept ans, cette situation a provoqué de nombreuses tensions entre la Russie et l’Ukraine, exacerbées par la présence de la flotte russe de la mer Noire dans le port de Sébastopol. La plus récente a été provoquée par un débarquement de matériel militaire américain dans le port de Théodosie le 27 mai 2006.
L’Otan est divisée sur la façon de répondre à la menace russe. L’Allemagne et l’Italie, qui sont les plus gros consommateurs de gaz russe, appellent à un « dialogue ouvert ». George Bush a menacé la Russie de « sérieuses conséquences », et la Pologne a immédiatement signé avec les Etats-Unis un plan d’installation de bases anti-missiles sur son territoire. Medvedev a répliqué qu’il n’avait pas peur. Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union européenne qui vont se réunir le 1er septembre pour un sommet extraordinaire vont-ils adopter une position commune ?
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