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Thaïlande : en attendant la démocratie…

Arrivée au pouvoir en 2014 après un coup d’état, la junte militaire thaïlandaise souhaite depuis faire passer un nouveau projet de Constitution qui lui permettrait de garder la main mise sur le pays. Antidémocratique, ce projet s’impose peu à peu dans un climat qui voit les forces armées réprimer toute forme d’opposition.

Reculer pour mieux rester

Fin janvier, un nouveau projet de Constitution était publié par la Constitution Drafting Committee (CDC), l’organisme créé par la junte pour mener à bien une réforme censée remplacer le texte abandonné après le coup d’état de 2014 qui a fait entrer en vigueur la loi martiale dans le pays.

Soutenu par la junte militaire au pouvoir, ce projet doit officiellement aider la Thaïlande à retrouver une stabilité et à rapprocher les citoyens après une décennie troublée par les conflits entre opposants et pro régime. Officieusement, ce nouveau texte n’aurait pour seule utilité que de permettre à l’armée et au Général Prayuth Chan-ocha de rester aux manettes du pouvoir.

Pour le Chef de l’armée, la réécriture de la Constitution s’exécute avec la ferme intention de réduire au maximum le pouvoir des gouvernements élus. Pour cela, le projet est émaillé d’articles renforçant le rôle du CDC dans l’appareil gouvernemental thaïlandais. L’article 103 impose par exemple que les représentants de la Cour Constitutionnelle soient nommés par le comité de réforme de la Constitution. La Constitution telle qu’elle est voulue par la National Council for Peace and Order (NCPO), nom donné à la junte militaire, réduit, article après article, toutes les velléités démocratiques du pays pour in fine faire perdurer la loi martiale et accorder les pleins pouvoirs aux forces militaires.

Et peu importe si le CDC a du mal à faire passer les différentes versions du projet déjà présentées, le Premier ministre Chan-ocha profite du temps que nécessite l’élaboration de ce nouveau texte pour asseoir chaque jour davantage l’emprise que la junte militaire exerce sur la Thaïlande et sur son peuple.

Il n’y aura pas de nouvelle élection « démocratique » sans que la nouvelle mouture de la Constitution ne soit votée. Le Général n’est pas pressé, le temps qu’il faudra pour faire passer sa version de la Constitution reste du temps où il gouverne et où ses hommes peuvent continuer d’arpenter les rues pour faire taire l’opposition. Car toute cette transition se fait dans un climat difficile, où la moindre critique formulée à l’égard du gouvernement actuel se retrouve sévèrement punie.

Opposition et médias réduits au silence

Comme dans toute dictature qui se respecte, le gouvernement thaïlandais a du mal à supporter la contradiction. Et pour préserver la sensibilité d’un gouvernement hyper susceptible vis à vis des critiques qui pointeraient du doigt sa façon de gérer le pays, la junte n’hésite pas à inscrire ses actions dans une stratégie répressive qui atteint aujourd’hui des niveaux extrêmes.

Si les citoyens thaïlandais qui s’aventurent à remettre en cause publiquement le pouvoir en place sont régulièrement arrêtés et jetés en prison, accusés de perturber l’ordre général, le gouvernement s’attaque désormais aux intellectuels. Depuis 2014, 77 universitaires ont été assignés à résidence par la police thaïe, contraints de revenir sur leurs critiques sous peine d’être envoyés directement dans des camps spéciaux, créés pour mettre leur esprit et façon de penser à rude épreuve et dans lesquels ils se retrouvent embrigadés dans un processus d’endoctrinement à la gloire du mouvement en place. Cinq universitaires auraient même été poussés à l’exil depuis que la loi martiale est appliquée.

Pour les nombreux observateurs qui analysent la montée en puissance de la junte militaire, la répression dont sont victimes aujourd’hui les intellectuels est signe d’une certain manque de confiance en l’avenir de la part du gouvernement actuel. La parole des universitaires a une portée particulière, que ce soit au sein même du pays ou à l’international et leurs critiques peuvent véritablement affecter et remettre en cause la légitimité de la junte. Mais pour que cette parole puisse avoir un écho au-delà des frontières thaïlandaises, encore faudrait-il que le système médiatique permette une telle ouverture vers l’étranger. Seulement, depuis quelques temps, la presse est elle aussi dans le viseur de l’armée qui ne cesse de démontrer de sérieuses compétences dans le muselage des journalistes.

Les autorités thaïes viennent de redéfinir les conditions d’obtentions du permis de travail pour les journalistes. Afin de prétendre pouvoir travailler plus de trois mois sur le territoire thaïlandais et obtenir le visa adéquat, les journalistes étrangers devront travailler à temps plein et cela pour un seul média, une façon de réduire au maximum la présence d’une presse qui ne serait pas téléguidée par le gouvernement militaire. « En fait, les autorités essayent de faire peur aux correspondants établis en ne renouvelant pas les permis de travail pour les "petits" journalistes freelance qui n’ont pas le pouvoir de faire beaucoup de bruit. C’est toujours plus simple de s’en prendre aux plus faibles qu’aux correspondants de CNN, BBC ou du New York Times  » explique le dessinateur français Stéphane Peray au quotidien The Nation.

A cela, s’ajoute également des refus de visas totalement arbitraires. Dix correspondants étrangers basés en Thaïlande ont ainsi vus leur demande de visa rejetées sans y trouver quelconque justification. Plus le temps passe et plus la junte essaie d’étouffer tous discours qui pourraient « déraper » et rendre compte de la réalité. Il en va de l’image du NCPO qui a tout à gagner à garder le contrôle du pays sans que la communauté internationale ne vienne interférer dans cette gestion liberticide.

Repoussée aux calendes grecques, la future élection démocratique peut encore être décisive pour l’avenir du pays si les Etats influents s’engagent et condamnent fermement l’action en place pour accompagner le pays vers la mise en place d’une véritable démocratie.


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3 réactions à cet article    


  • Iren-Nao 25 mars 2016 08:07

    @ auteur
    Il semble que vous vous interessez beaucoup a la Thailande et que cette article ne fasse pas un tabac.
    Je vis en Thailande depuis 10 ans et mon impression est que les Thais n’en ont pas grand chose a foutre de la junte car depuis qu’elle a fait cesser le bordel entre rouges et jaunes les choses sont largement plus calmes.
    Et a part quelques excites, dont je ne connais aucun, les Thais sont generalement assez placides et dresses depuis toujours a obeir. Ce qui les rend largement plus supportables que ces petits franchouillards exemples des droits zumains et donneurs de lecons.
    Je n’ai pas lu la totalite de votre article car je sais que la regle premiere quand on vie a l’etranger c’est de s’occuper de ses fesses et surtout pas de leur politique interieure.
    Ce serait il me semble peu apprecie des Thais. Qui nont pas le privilege de vivre comme les Francais dans une democrasouille lamentable et un pays independant....
    La succession du Roi, elle risque d’engendrer des remous, mais encore une fois ce ne sont pas nos oignons.
    Sabai sabai
    Iren-Nao


    • zygzornifle zygzornifle 25 mars 2016 13:09

      en tout cas on n’y vit bien mieux qu’en France, il n’y a qu’a voir le nombre de retraités croissant qui vont s’établir la bas.....


      • Leon256 (---.---.219.192) 27 mars 2016 12:35

        Oui encore de la propagande pro Thaksin...

        Le pays n’a jamais été aussi libre....de l’emprise de l’occident

        Thai Isara, toutes les manœuvres de Washington pour prendre le contrôle du pays en le déstabilisant et le divisant ont échoué, ils sont fort les thaïlandais !

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Thierrym


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