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Accueil du site > Actualités > International > Vers un Grenelle mondial contre la prolifération nucléaire ?

Vers un Grenelle mondial contre la prolifération nucléaire ?

Le sommet du G8 qui vient de se refermer en Allemagne (à Heiligendamm) comportait au programme des discussions la prolifération nucléaire. Une nouvelle fois les chefs d’Etats en présence ont considéré cette problématique uniquement à travers le prisme de l’Iran, de la Corée du Nord... Or, il n’y a pas à en douter, tant que ce danger ne sera pas pensé de façon globale, c’est-à-dire par une lecture complète des différents types de prolifération, il est alors certain que la prolifération nucléaire a de beaux jours devant elle...

En effet, tous les feux sont au rouge : le nombre de puissances nucléaires est passé en moins de dix ans de six (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni, Israël), à neuf avec l’Inde et le Pakistan (en 1998) et la Corée du Nord (en 2006). Les cinq puissances nucléaires reconnues par le Traité de non-prolifération (TNP) ont totalement arrêté leurs mesures de désarmements engagées dans la dernière décennie. Sur le plan des traités internationaux, la situation est loin d’être réjouissante. Le TNP, pierre angulaire du système de contrôle et de limitations des armements, devient peu à peu obsolète face à son incapacité à évoluer. D’autres traités ont eux été "cassés" (traité ABM, Anti Ballistic Missile) ou vidés de leurs sens initial (traité SORT, Strategic Arms Reduction Treaty) : celui de diminuer les armements stratégiques.

 

 

Toutes ces alertes nous ramènent aux problèmes complexes de la prolifération nucléaire qui doit être observée et combattue sous toutes ses formes : verticale, horizontale, issue du marché noir et civile. Contrairement à ce qui est révélé à l’opinion publique, les premiers proliférateurs sont les puissances nucléaires. Pour preuve, toutes ont mis en oeuvre plusieurs programmes de modernisation de leurs arsenaux, dont la durée de vie s’étend jusqu’en 2040. La France ne déroge pas à cette règle et aura d’ici l’horizon 2020 renouvelé ses missiles (M-51 et ASMP-A) et ses 348 ogives nucléaires. Cette politique d’armement peut donner une perception de sécurité. Malheureusement, ce cycle amorce immanquablement un nouveau cycle, plus pernicieux et encore plus contagieux : celui d’une prolifération horizontale, soit la création de nouvelles puissances nucléaires. La fin du XXe et le début du XXIe siècle ont vu l’apparition du Pakistan et de la Corée du Nord, deux puissances d’un genre nouveaux. Islamabad dispose d’un arsenal nucléaire estimé entre 40 et 60 ogives et entre 2 et 10 pour PyongYang. L’un comme l’autre ont acquis leurs technologies nucléaires par le biais de trafics. Le marché noir est la troisième voie de la prolifération dont personne ne mesure exactement l’étendue. Si une des têtes de ce trafic a été décapitée avec l’arrestation de AQ Khan, le père de la bombe pakistanaise, de nombreux éléments laissent penser que cette menace pourrait s’accroître dans le futur. Ainsi, des produits radioactifs et chimiques, disséminés par le passé, restent en libre circulation dans certaines zones sensible (Corne de l’Afrique, Asie centrale...). Enfin, la prolifération nucléaire civile est sans doute la plus cynique car elle est autorisée. Personne n’imaginait, dans les années 1960, certains pays être capables de développer et de transférer cette technologie civile à des fins militaires (Taiwan, Inde, Brésil...). Résultat, plus d’une trentaine d’Etats sont susceptibles de se constituer un arsenal nucléaire en moins de 24 mois. L’exemple flagrant de cette prolifération non officielle est aujourd’hui l’Iran, qui tente d’accroître ses infrastructures d’enrichissement d’uranium pour une utilisation normalement civile...

 

 

Il apparaît ainsi trop réducteur de concentrer le problème du nucléaire militaire à un seul type de prolifération. La prolifération ne pourra pas être stoppée seulement par des mesures de rétorsions, voire des actions militaires à l’égard de quelques pays mis sur la sellette. Non, elle doit être combattue de façon globale. Ceci implique de la part de nos dirigeants du courage politique. Des mesures de désarmement ont été proposées récemment par Hans Blix en 2006 dans son rapport "Les armes de la terreur". La France pourrait prendre une telle initiative en lançant un Grenelle mondial contre la prolifération nucléaire. Ce type d’action volontariste est souvent source de succès comme l’a démontré, entre autres, la conférence d’Ottawa (1996) contre les mines antipersonnel. Ce signal fort, permettrait de relancer une dynamique de désarmement. La première mesure pourrait s’appuyer sur la création d’un traité sur l’arrêt de production des matières fissiles, dit Cut-Off, un traité actuellement souhaité par la France. Au préalable de cet agenda, la France pourrait, sans pour autant remettre en cause sa sécurité, annoncer un moratoire sur la modernisation de ses arsenaux stratégiques, ouvrir un véritable débat public (militaire, citoyens, ONG...) et rédiger un nouveau Livre blanc sur la défense...

 


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1 réactions à cet article    


  • jeanne 9 juin 2007 12:10

    Pour une fois un texte vraiment claire sur la proliferation nucléaire qui permet de comprendre réellement les causes de cette course au surarmement jeanne

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