Wiki the Leaks

L’affaire fait grand bruit dans le monde.
Ainsi, l’outil numérique est de plus en plus présent dans le monde des médias.
Son nom est désormais sur toutes les lèvres, il s’appelle Julian Assange.
Il se considère aujourd’hui comme le porte-parole de Wikileaks, et en 2010 a fait, selon Forbes, son entrée dans le palmarès des 68 personnes les plus puissantes du monde. lien
Il a notamment reçu le « Amnesty International Média Award 2009 » et le « Sam Adams Award 2010 » pour avoir dévoilé les méfaits de l’armée américaine en Irak. lien
En effet, c’est de liberté de la presse et de transparence qu’il s’agit avant tout.
L’histoire est simple : un homme a fait parvenir à Wikileaks des centaines de milliers de mémos d’ambassade, dévoilant les vraies pensées des gouvernements.
Cet homme s’appelle Bradley Manning.
Assange avait protégé l’informateur, mais celui-ci a été trahi par un autre hacker, Adrian Lamo,
Depuis, Manning moisit en prison sur la base de Quantico (Virginie) pour un certain temps. (Il est question de 52 ans). lien
On lui reproche d’avoir transmis à Wikileaks la vidéo de soldats américains abattant des civils irakiens comme dans un jeu, et les services américains le suspectent d’être à l’origine de la fuite des 250 000 mémos d’ambassade qui font la une des médias actuellement. lien
Avant ceux là, Wikileaks avait été destinataire de 400 000 documents confidentiels relatifs aux opérations américaines en Irak, aux circuits de corruption des dictateurs africains, ou de certaines compagnies russes.
Pourtant l’utilisation de ces mémos diplomatiques n’est pas si simple qu’il le parait.
Il faut, pour en extraire un sens compréhensible, mener d’authentiques investigations.
Le lieu d’émission du message est signalé par des longitudes, des latitudes. Les mots utilisés sont parfois codés.
Se donnant le rôle d’un « hyper rédacteur en chef » Julian Assange a donc décidé de communiquer ces informations à seulement 5 médias mondiaux : Der Spiegel, The Guardian, El Païs, le Monde et le New york Times. lien
Il y a eu plusieurs rencontres au sommet entre des dizaines de journalistes et lui, afin de peaufiner le travail, d’en discuter la déontologie, de passer un accord avant d’en publier quelques extraits.
En effet contrairement à ce que l’on peut lire ici ou la, le patron de Wikileaks n’est donc pas un irresponsable.
Dans le souci cohérent de ne pas exposer la vie de personnes qui seraient citées dans ces « mémos de diplomates » Assange, et les 5 journaux qu’il a contacté, ont décidé d’un commun accord de ne pas utiliser les mémos qui pourraient mettre en danger des personnes évoquées, ou d’en masquer les noms.
Et c’est lorsque les premiers mémos d’ambassades ont été publiés que le scandale a commencé.
A ce jour, sur les plus de 250 000 mémos reçus, seuls environ 800 ont été utilisés, et 2000 devrait être le chiffre maximum des publications.
On oublie que Wikileaks n’est pas une nouveauté et que le site a été crée voila plus de trois ans.
Les infos que nous découvrons ces jours ci, Assange les avaient depuis longtemps.
Et puis Julian promet pour bientôt une fuite sur une grande banque américaine. lien
Alors aujourd’hui pour l’empêcher de communiquer, tout le monde s’y met, ou presque.
Interpol a lancé un avis de recherche international pour « viol et agression sexuelle présumés ».
Or Julian a effectivement bien été accusé de viol le 21 aout 2010 par la justice suédoise, mais celle-ci avait annulé son avis de recherche quelques heures plus tard.
D’ailleurs, il est rentré en Grande Bretagne tout à fait légalement, en donnant des son arrivée ses coordonnées aux services administratifs.
Assange ayant bien compris le danger qui le menace, s’est refusé à révéler publiquement le lieu de sa résidence.
En effet, le professeur Tom Flanagan, ancien conseiller du premier ministre canadien, Stephen Harper a carrément suggéré son assassinat, réclamant « qu’Obama mette sa tête à prix et peut-être utilise un drone ». lien
D’autres menacent les sites hébergeurs de Wikileaks de représailles.
Sous la menace, Amazon a donc cédé à la pression de Joe Liberman, un sénateur américain qui a ajouté : « j’aurais aimé qu’Amazon prenne cette mesure avant ». lien
Ce à quoi Wikileaks à répondu « serveurs de Wikileaks sur Amazon expulsés : liberté de parole au pays des hommes libres…très bien ! nos dollars vont désormais être dépensés pour employer des personnes en Europe ».
Car pour Assange, le champ des possibilités d’hébergement est vaste, le monde numérique n’ayant par nature pas de frontières.
Wikileaks a donc choisi un autre hébergeur.
Pour l’instant, c’est OVH qui s’y colle : il est à Roubaix.
Ce qui a mis Eric Besson dans tous ses états.
Aurait-il décidé de s’arroger le droit de dire ce qui devrait être publié ou pas ?
De plus il évoque carrément « une organisation criminelle ». lien
Pourtant, s’il était tout à fait cohérent, il pourrait s’en prendre aussi aux 5 journaux qui ont été destinataires des informations, et qui en ont publié des articles…et du coup mettre dans le même sac toute la presse, puisqu’elle aussi relaie l’information.
Aujourd’hui seul un juge du parquet Lillois pourrait intervenir.
C’est d’ailleurs pour cette raison que le responsable d’OVH a pris les devants, et vient de consulter la justice à cet égard, afin de savoir s’il était répréhensible ou pas d’héberger Wikileaks. lien
En France, à l’instar d’Eric Besson, beaucoup sont dans l’excès ou dans l’incohérence, telle Catherine Ney qui, sur l’antenne d’Europe 1, affirme « Internet c’est la Stasi en pire »…
Hubert Vedrine, l’ancien ministre des affaires étrangères de Lionel Jospin semble aussi manquer de pertinence lorsqu’il dénonce Wikileaks qu’il qualifie de « big brother électronique relevant plus du caniveau démocratique, voire d’un totalitarisme marqué » lien
Ces attaques démesurées sont manifestement sans fondement, puisqu’on sait que la parution de chaque information fait, de la part des journaux qui les publient, l’objet de la plus grande prudence.
De plus, en « victimisant » Julian Assange, ils sont en train d’en faire un authentique martyr.
L’effet Streisand fait aussi des siennes.
On se souvient que Barbara Streisand voulant cacher sa maison, avait provoqué le contraire de ce qu’elle espérait.
Et puis on peut s’interroger sur le sens de cette agitation, puisqu’aujourd’hui, les 5 médias contactés ont déjà dans leurs tiroirs largement de quoi enrichir l’actualité pendant de longs mois, même si Wikileaks était finalement empêché de communiquer.
L’émission hebdomadaire du 5 décembre 2010 « Place de la toile » de Xavier de la Porte tentait de faire le point sur cette affaire qui fait trembler les gouvernements.
Olivier Tesquet, journaliste à Owni.fr, Romain Pigenel, (son blog Variae), Remy Ourdan, grand reporter au journal « le Monde » et Nicolas Vanbremeersch directeur de l’agence Spintank étaient présents.
On peut réécouter l’émission sur ce lien
Pour Massimo Razzi qui s’exprime dans « Repubblica » le 28 novembre 2010 est une date historique. C’est le jour ou l’information est devenue l’apanage d’Internet. lien
« via internet, les dossiers sont entre les mains de tous. Ils étendent la médiation journalistique à des masses énormes, car n’importe qui pourra éplucher, constater, démasquer, vérifier, mettre en doute, et démonter des certitudes. Ensemble les citoyens internautes pourront même augmenter la masse de ces documents, en guider l’efficacité, faire émerger telle ou telle question internationale, nationale, ou locale. Dans le même temps, les professionnels de l’information auront le devoir de « confectionner » au mieux ces révélations, de les rendre les plus lisibles possible et par-dessus tout, par un travail de grande qualité, de fouiller dans les archives et les mémoires pour relier et expliquer les faits et les méfaits que ces dossiers renferment certainement ». lien
De Cantona à Assange, la rébellion s’est donc installée dans notre paysage.
Comment cela va-t-il finir ?
Sans pour autant lire dans le marc de café, on peut avoir le sentiment d’être au début d’un profond changement dans la manière d’informer…à moins que les puissants au pouvoir arrivent à faire taire cette voix qui dérange tant de monde.
Car comme disait mon vieil ami africain :
« Celui qui n’a jamais eu peur ne peut pas connaitre le courage »
L’image illustrant l’article provient de n’importequoi.over-blog.com
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