Burns, burns, burns, the ring of fire

Un gros beauf’ qui sort de la cambrousse étatsuniennes et fait le buzz, c’est assez banal. Sauf quand celui-ci projette à l’avance de brûler quelques 200 exemplaires de Coran le jour de la commémoration du 11 septembre. Tery Jones prévoit son coup depuis juillet, une info relayée par différents sites (Yahoo reprend une brève de Religion News Service, avant que cette info soit de nouveau envoyée ailleurs). La rumeur enfle, le personnage se fait (re)connaître. Parce que oui, ce clown s’est brièvement fait un nom en 2009 lorsqu’il planta des panneaux devant son église au doux reflets islamophobes ("Le Coran est le Diable"). Devant son église disais-je puisque le pasteur Jones est à la tête de la Dove World Outreach Center, un groupuscule évangélique extrémiste (et par déduction, inconnu du grand public).
Victime de son succès à caractère controversé, le fanatique accordera pas moins de 150 interviews aux journaux américains. Dans une société où l’information est transmise à tout-va, il fait les choux gras des tabloïds. C’est le jackpot total, il peut faire librement sa pub anti-islam dans un pays de foi chrétienne.
A quelques jours du 11, il lâche prise, ne brûlera pas les Corans et ira même jusqu’à dialoguer avec un imam. Avec ce dernier, il aurait passé un accord tacite portant sur le déplacement de construction de mosquée sur Ground Zero. Autrement dit, un lieu de culte islamique dans le quartier des Twin Towers, détruites par quelques terroristes islamistes. Soit la branche politique de l’islam. Une nette différence néanmoins avec un air de famille, c’est ce même coran qui guide les terroristes et les fidèles. Tery Jones est un des rares à s’exprimer ouvertement sur cette haine de l’islam et est actuellement en train d’en payer les frais. Cependant, des récents sondages montrent qu’une majorité d’Américains aimerait que cette mosquée se construise ailleurs que sur Ground Zero, encore traumatisée par les attentats.
Tery aurait-il dit tout haut ce que notre société occidentale pense tout bas ? Le phénomène n’est pas uniquement aux États-Unis. En fin d’année 2009, un référendum suisse interdisait la construction de minarets sur son territoire. En France également, avec la campagne du FN reprenant celle des Suisses, en y ajoutant des éléments d’algérophobie. L’Occident peut-il comprendre les sociétés islamiques ? Ses dimensions religieuses nous échappent-elles parce que nous ne nous penchons pas assez dessus ? Au fond, n’est-ce pas simplement une peur sourde de l’étranger, de l’inconnu ?
American way of life
Quoi qu’il en soit, ce pasteur n’a rien à faire en une des journaux. Son projet n’était qu’un fait-divers (qui a déjà eu lieu en 2008, sans aucune répercussion dans les médias) issu de l’imagination d’un vieux fou. Était-il au moins seulement convaincu par son idée ou n’était-ce qu’une publicité pour son église ?
Mais allons à l’essentiel. Comment une information aussi stupide a-t-elle pu être diffusée longuement sur les grandes chaînes mondiales ? Le buzz. Nous ne vivons que par et pour cela, le buzz. Cette semaine, c’était au tour de Tery Jones. D’abord cité par un petit site religieux, repris par Yahoo puis par les chaînes de télévision, l’impact a eu de nombreuses répercussions. Mais c’est surtout grâce au total libéralisme pratiqué par les États-Unis que l’on doit cette boulette.
Avant et après chaque JT se situe une plage de publicité très importante, or, pour inciter les téléspectateurs à regarder une chaîne plutôt qu’une autre, il faut de l’exclusif, des trucs dingues. Bien conscientes de l’image anti-islam véhiculée via ses canaux, les chaînes ont préféré l’argent plutôt que la morale. Et ce n’est qu’une fois le mal fait que l’arroseur arrosé se retire. Alors qu’il aurait suffit de refuser de diffuser les images pour empêcher tout dérapage, le contraire s’est produit. Logique, plutôt que d’essuyer un coup en traître, la stratégie était de diffuser un maximum d’images.
En contradiction avec les principes fondateurs de l’Occident, le respect du culte a été bafoué à la face du monde.
Ricochets
Les répercussions sont grandes et se mettent en place. En Afghanistan, des milliers de croyants ont manifesté à la sortie des mosquées, le jour de fin du ramadan. La foule ne s’est pas faite prier pour chanter "Mort à l’Amérique" et pour caillasser une base de l’Otan sous responsabilité allemande. Un manifestant fut tué par balle. Les représentants islamiques en appellent à tous les chrétiens de faire cesser ce projet, sous peine de blesser tous les croyants de la première religion du monde. Du monde !
Plus dangereux encore, les troupes américaines sur les sols afghan et irakien sont exposées au danger. Manifester, c’est bien sympa, mais il y a un soupçon de rage qui reste au creux du ventre. Or, les troupes américaines sont les représentants des États-Unis, ceux-ci diffusant les images hostiles au coran. Afghans et Irakiens pourraient se soulever face à leur ennemi commun, aggravant encore un peu plus le gouffre entre deux sociétés antagonistes.
Tout ça parce que nos médias omniprésents n’ont pas été capables de gérer un tant soit peu la portée qu’auraient les propos (prévisibles) de Tery Jones. Et surtout, de s’intéresser à l’inintéressant.
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