Aujourd’hui, en France, à quelques mois des élections présidentielles,
c’est la presse dite de gauche, Libération et Politis, qui doit se
restructurer. Des groupes comme Le nouvel observateur et Le Monde se soutiennent mutuellement en prenant des participations croisées.
Mais du côté de la presse régionale, l’anarchie règne : des villes comme Lyon
sont couvertes par les gratuits distribués dans la rue : Direct soir, 20 minutes, des culturels comme 491 ou encore Métro
le bien nommé.
En Amérique latine, le groupe suédois (Métro) est maintenant très bien implanté et des milliers de Chiliens qui jusqu’ici ne lisaient pas de journaux ont droit à leur feuille d’information quotidienne.
Face à cette montée en puissance des journaux gratuits, la presse traditionnelle a réagi diversement. Pour rester à Lyon, un quotidien historique comme Le progrès a dû se restructurer et, face à l’érosion de ses lecteurs, tente de concurrencer la presse gratuite sur son propre terrain en créant sans grand succès Lyon plus. Mais la situation est telle que le groupe, qui a déjà dû se débarrasser du magazine Lyon capitale, enchaîne les plans de licenciement et envisage même de se revendre à des groupes étrangers. On dit même que seule une intervention de l’Elysée a pu empêcher sa vente à un fonds d’ investissement avant les élections présidentielles de 2007.
Au Chili, la Copesa, une entreprise liée à la droite conservatrice, qui monopolise la quasi-totalité de la diffusion, a aussi essayé de contrer l’arrivée des gratuits comme Métro et La Hora par la création de titres concurrentiels. Des journaux historiques régionaux comme El mercurio de Valparaiso ne doivent leur salut qu’à la survente d’abonnements de complaisance dans les administrations et au quasi-monopole de la publicité et des annonces légales que le gouvernement fait passer dans ce journal, au grand dam des rares journalistes indépendants, comme Raoul Guttierez, de Granvalparaiso.cl.
Le développement des journaux en ligne
Reste la sortie par le haut, qui pouvait paraître jusqu’ici plus économique et plus écologique (par l’économie de papier et d’encre...). Il s’ agit du développement des journaux en ligne. Mais là encore, les groupes financiers veillent, et on peut s’attendre à ce que l’évolution des technologies et le renchérissement des logiciels et des droits de propriété intellectuelle (sur les photos ou la musique, par exemple) empêche le développement d’une presse libre et diversifiée, et favorise les rachats et regroupements. Il existe tout de même des initiatives indépendantes, comme Elmostrador.cl ou Granvalparaiso, déjà cité, au Chili, ou encore Lyonpeople.com ou Lyonmag.com, pour revenir à Lyon. Mais, même si Lyonmag peut compter sur l’appui du multimillionnaire "anarchiste" Thierry Hermann (le créateur de la maison du chaos), ce genre d’initiative hors circuit a peu de chances de prospérer, et sera vite contrée par les éléphants ultrafinancés par la publicité que sont par exemple Latercera.cl (groupe Copesa) au Chili, ou parismatch.com (groupe Hachette).
Ceux qui pensent que le citoyen moyen sortira gagnant de cette débauche de médias se trompent lourdement, car loin de favoriser la diversité d’opinion, le recours aux mêmes agences de presse favorise les regroupements, et à terme la disparition d’un métier autrefois tant vanté et aujourd’hui tant décrié, celui de journaliste.