Fréquence brouillée à Skyrock
Suite à la mise à l’écart de son fondateur historique, Pierre Bellanger, par le conseil d’Administration du groupe AXA, la radio Skyrock est en émoi. Sur le même modèle que Canal + en 2002, animateurs et auditeurs organisent la résistance, sous l’étendard d’une liberté d’expression en danger.

Ce n’est pas encore le silence radio, loin de là. Et pourtant, c’est déjà la peur bleue sur la ville. Première radio nationale indépendante, Skyrock vit depuis le début de la semaine un moment charnière de son existence. Le fondateur historique de la station, Pierre Bellanger, a en effet été démis de ses fonctions de Directeur Général par le Fond Axa qui possède à 70% Skyrock (contre 30% pour Bellanger), au profit de Marc Laufer, un ancien d’NRJ et RMC.
L’annonce de la nouvelle fit l’effet d’un tsunami médiatique, avec réactions immédiates en rafale. Pour les animateurs de la station, au premier rang desquels le directeur d’Antenne David Massart, alias Difool, pas question de laisser passer pareille décision. A leurs yeux, Pierre Bellanger EST Skyrock. Avec un autre à la tête de la station, ils n’imaginent pas autre chose que la fin de l’esprit de la plus célèbre « radio libre ». Outre des éventuels changements de ton à l’antenne, les employés de la station craignent un plan de restructuration qui pourrait toucher 25% de la masse salariale.
Soutiens coupe-gorge ?
Dès lors, les animateurs ont mis en place une opération médiatique de grande ampleur sur tous les supports. Tout d’abord, ils mobilisent l’antenne sur le sujet pour organiser la résistance. Ils ont fait appel à l’aide des auditeurs, pour que ceux-ci interviennent en direct, ou manifestent leur sympathie via les blogs ou le réseau social facebook. Avec déjà 500 000 soutiens affichés, le groupe de pression quasi improvisé impressionne par son ampleur.
Mais la résistance se matérialise un peu plus par le fait que les animateurs ainsi que certains auditeurs dorment sur place, au siège de la radio. Des barricades à forme humaine, en somme. Quant à Bellanger, il refuse de quitter son bureau. Dès lors, impossible pour le nouveau PDG d’accéder à ses fonctions.
Du médiatique au politique, il n’y a souvent qu’un pas, dans un sens comme dans l’autre. Certains hommes de gauche n’ont pas manqué de saisir la balle au bond. Jack Lang, Benoit Hamon et le candidat déclaré à l’élection présidentielle François Hollande se sont ainsi déplacés dans les locaux de Skyrock pour apporter eux aussi leur soutien. De tout là-haut, François Mitterrand, qui autorisa les radios libres en 1981, y serait sûrement allé de son big-up.
Le médiateur de l’arrêt public
Au final, tout ce cirque ressemble à s’y méprendre aux remous de Canal + en 2002, lorsque Jean-Marie Messier, quelques semaines avant son licenciement, avait poussé dehors Pierre Lescure, le directeur historique. On se souvient de la prise d’antenne des résistants, avec Alain Chabat et Bruno Gaccio dans le rôle des syndicalistes en chef. Mais tout ceci n’eut aucun effet.
Ici, voilà que Pierre Bellanger se dit prêt à racheter leurs parts à Axa, qui n’est pas contre une vente. Mais avec quel argent ? Telle est la question. Au final, voici qu’un médiateur vient d’être nommé pour trouver une solution au conflit et préserver les intérêts de « l'entreprise, de ses salariés, de ses auditeurs, de ses internautes et de ses actionnaires ». Entre ceux qui ne peuvent pas rentrer et ceux qui ne veulent pas sortir ; ceux qui veulent refaire le monde et ceux qui veulent se refaire la cerise ; ceux qui veulent toucher leur ratio et ceux qui ne veulent pas qu’on touche à leur radio : Monsieur le médiateur, bon courage.
Gwendal Plougastel
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