Là-bas si j’y suis : sectarisme et copinage
Nous poursuivons notre enquête sur les invités des médias, Enquête et Débat est d’ailleurs le seul média à réaliser ce genre d’enquête, et de plus sans parti-pris idéologique. Ainsi après nous être penché sur l’analyse des invités de plusieurs émissions de télé (Ce soir ou jamais, C dans l’air, Bibliothèque Médicis, On n’est pas couché, Revu et corrigé), et de radio (du Grain à Moudre), voici une enquête sur les invités de l’émission Là-bas si j’y suis, sur France Inter. Remerciements à Pablito, qui s’est chargé du travail harassant pour constituer la base de données à partir d’éléments publics.
Cette émission est à elle-seule la preuve du deux poids deux mesures dans notre pays. Sur une chaîne publique (donc payée par les impôts de tous), France Inter en l’occurrence, depuis plus de 20 ans, une émission quotidienne donne la parole à l’extrême-gauche et seulement à l’extrême-gauche. Or France Inter ou aucune autre radio ou télévision de service public ne donne la parole, quotidiennement, pendant une heure ni même une minute, à l’extrême-droite, ou aux libéraux, ou aux pro-israéliens. Le service public, qui est donc censé donner la parole à tous, n’est donc pas pluraliste, mais orienté, vers la gauche et l’extrême-gauche.
Certains (notamment à l’extrême-gauche) qualifieront Alain Finkielkraut d’extrême-droite, et prétendront qu’avec son émission Répliques sur France Culture tous les samedis, l’équilibre est là. Or il s’agit d’une hebdomadaire, et non d’une quotidienne, et la programmation de Répliques est plus conforme au service public, puisqu’il s’agit à chaque émission ou presque d’un débat contradictoire. Une étude des invités de cette émission sera bientôt révélée sur ce site qui le démontrera. Ce qui invalide d’ailleurs l’accusation d’extrême-droite à l’endroit d’Alain Finkielkraut, mais passons.
Par contre, le qualificatif d’extrême-gauche est tout à fait justifié pour Daniel Mermet et son émission Là-bas si j’y suis, car le débat en est totalement absent, et seul le catéchisme anti-libéral, internationaliste gauchiste et pro-palestinien y a droit de cité. Voici ce qu’en dit Mermet : “Nous ne faisons pas une émission militante, mais il est impossible de rester neutre. Informer, c’est choisir“. On se demande ce que serait une émission militante, selon M. Mermet…
Alain Finkielkraut en parlait aussi : “ Et je dirai un dernier mot, un dernier mot sur Castoriadis [cité par Serge Halimi contre BHL] : j’ai été l’ami de Castoriadis. Et simplement, Castoriadis en effet pouvait être très sévère. Mais qui étaient ses amis ? C’étaient des gens qui ne pensaient pas comme lui, c’était Pierre Manent, c’était Philippe Raynaud, c’était Luc Ferry, des gens avec lesquels il se disputait jusqu’à trois heures du matin. Jamais ces gens-là n’auront l’honneur d’une citation au Monde Diplomatique ou chez Daniel Mermet, sauf pour être injuriés. Donc je retire à Serge Halimi le droit de se réclamer de Castoriadis, et j’ajoute pour finir que j’ai essayé de l’inviter, moi, Serge Halimi, à mon émission, lorsqu’il avait fait Les nouveaux chiens de garde, il n’est pas venu. Jamais ces gens-là ne parlent avec des gens qui ne pensent pas comme eux. Ils les injurient, c’est tout ce qu’ils font.” Le Zapping de France Inter, 10.11.2007, cité dans Alain Finkielkraut décrypté, de Jean Robin, éditions Tatamis (2009)
En voici effectivement la preuve, par les invités de l’émission du 1er janvier 2011 au 21 février 2012.
Justement, la personne à avoir été la plus invitée n’est autre que… Serge Halimi ! Avec 10 modestes invitations. Celui qui fait la leçon aux journalistes dans Les nouveaux chiens de garde (livre et documentaire) et leur reproche d’être tout le temps invité et de se renvoyer l’ascenseur fait la même chose avec Daniel Mermet. D’ailleurs, le patron du Monde Diplomatique (détenu à 51% par le Mondedonc par des financiers) est en bonne compagnie puisque la deuxième personnalité la plus invitée n’est autre qu’Alain Gresh, directeur adjoint du Monde diplomatique, avec 4 invitations. A eux deux, sur la période étudiée, ils représentent 7,56% de tous les invités, pas mal.
L’émission est quotidienne mais un jour sur deux en moyenne c’est un reportage qui est diffusé, sans invité. Nous avons donc considéré les 183 invités sur la période.
Arrive ensuite sur la dernière marche du podium Sihem Ben Sedrine, journaliste tunisienne, invitée 4 fois elle aussi.
Puis c’est au tour de ceux qui ont été invités 3 fois : l’éditeur Eric Hazan (bien connu de nos lecteurs pour son apologie du communisme et ses mensonges), le journaliste Fabrice Nicolino (La Croix, Politis,Charlie Hebdo), le sociologue Franck Poupeau (Secrétaire éditorial de la revue Actes de la recherche en sciences sociales, fondée en 1975 par Pierre Bourdieu), le journaliste Frédérick Pagès (Canard enchaîné), le romancier et cinéaste Gérard Mordillat (soutien affiché du Front de Gauche), le journaliste Gilles Balbastre (réalisateur du film Les nouveaux chiens de garde et grand ami d’Halimi), le tunisien militant Kamel Jendoubi (intervient souvent sur Al Jazeera), le sociologue Michel Pinçon (soutien du Front de Gauche et de Jean-Luc Mélenchon), sa femme Monique Pinçon-Charlot (qui soutient aussi Mélenchon), et la retraitée Monique Hervo.
Et s’il vous prend l’idée d’aller regarder ceux qui ont été invités 2 fois, vous trouverez le reste de la famille : Noam Chomsky, Pierre Rimbert, Daniel Bensaïd, Dominique Vidal, Franck Lepage, Frédéric Lordon, Gérard Filoche, Jean Ziegler, Pascal Blanchard, etc. etc. (la liste exhaustive est à disposition de ceux qui le souhaitent : [email protected])
Tous du même camp idéologique, donc, et naturellement il en va de même pour les reporters, comme François Ruffin par exemple, auteur des Petits soldats du journalisme, responsable du magazine indépendant Fakir, et … journaliste au Monde diplomatique. Ou encore Antoine Chao, frère du chanteur Manu Chao, et qui partage les mêmes idéaux gauchistes. Ah les copains, les renvois d’ascenseur et tout le tralala ne semblent pas être l’apanage de l’oligarchie !
Sur 183 invités, les personnes invitées 3 fois ou plus représentent 26,22% de tous les invités, soit plus du quart, donc la pluralité n’est même pas de mise non plus. Cerise sur le gâteau, c’est une des émissions qui invite le moins de femmes parmi celles que nous avons étudiées. Elles ne sont que 29 sur 183, soit 15,84% ! Pour des gens défendant notamment l’égalité homme femme et la parité dans les entreprises, dans la politique et même dans les médias, ça la fout mal. Et tout ça avec notre argent.
Bizarrement, les grands médias qui sont régulièrement attaqués par Daniel Mermet, le Monde Diplomatique et Acrimed (association critique média) n’ont jamais pris la peine de faire le rapide décompte que nous venons de faire, et que nous pourrions étendre à plusieurs années si nous en avions le temps et l’énergie (si un tel travail vous intéresse, envoyez-nous un mail, nous vous expliquerons comment faire). Au lieu de ce travail factuel et inattaquable, nos grands médias ont préféré leur cracher dessus, démontrant ainsi leur nullité. Ces grands médias ne sont décidément à la hauteur de rien.
Auteur et source de l'article : Enquete&Débat
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