Médias – De l’explosion du journalisme au self média
Ca faisait longtemps qu’une émission de radio en général et de France Inter en particulier ne m’avait pas autant « collé l’oreille au poste ». Sachant que mon « poste de radio » aujourd’hui est tour à tour la webradio de la cuisine, le petit poste à piles de la salle de bain, le radio réveil de la chambre, les applis de l’Iphone, le web sur mon Mac et même le système Bluetooth de mon casque moto. Bref mardi après-midi j’ai zappé entre mes différentes « radios » mais je n’ai pas changé d’émission tellement le propos était passionnant.
Mardi 1er mars à 15h Daniel Mermet recevait, dans son émission quotidienne « là-bas si j’y suis », Ignacio Ramonet, ancien directeur du Monde Diplomatique, à l’occasion de la parution de son nouveau livre cette semaine aux éditions Galilée : »L’explosion du journalisme, des médias de masse à la masse de médias ».
Et pour vous faire une idée de la qualité d’analyse de l’auteur, autant reprendre la présentation de l’ouvrage signée par Ignacio Ramonet lui-même puisque je ne ferai pas mieux et que je partage totalement sa vision du métier de journaliste et des secteurs de l’information et de la communication.
« Cet essai critique propose une anatomie de l’explosion de la presse écrite à l’heure où l’ensemble de l’écosystème médiatique est dynamité par les impacts successifs de la révolution numérique et du prodigieux développement des réseaux sociaux. Chaque citoyen, dans la nouvelle société-réseau, a vocation à devenir « journaliste » en s’appropriant des dispositifs légers comme les blogs ou les réseaux sociaux Twitter et Facebook qui offrent un potentiel communicationnel exceptionnel. Des individus possèdent désormais le pouvoir de communiquer entre eux des sons, des textes et des images, d’échanger de l’information, de la redistribuer, de la mélanger à d’autres documents, de réaliser leurs propres photos ou vidéos et de les mettre sur la Toile où des masses de gens vont les voir, et à leur tour participer à la circulation circulaire de l’information… Certains envisagent même un « journalisme sans journalistes », à la manière du média social WikiLeaks, pour garantir, face aux pressions des États, des groupes multimédias géants et des pouvoirs autocratiques, l’existence d’une indispensable information libre et indépendante. Un monde sans secrets… »
Et c’est évidemment encore plus intense dit à la radio, d’autant que l’émission était rythmée par des extraits de« Huit journalistes en colère « , le documentaire consacré à la crise de la presse, diffusé sur Arte, le 9 février dernier. Un film dans lequel huit journalistes triés sur le volet et interrogés par l’ancien patron de l’Express, Denis Jeambar, font le procès d’un métier dont ils sont paradoxalement quelques-uns des plus illustres et dignes représentants. « Huit journalistes en colère »… Et qui ne manquent pas d’air, comme le dit si bien Renaud Revel dans son blog.
En tout cas Daniel Mermet buvait du petit lait. Et moi aussi même si je ne suis pas un grand fan de ses émissions d’habitude.
Mais le plus amusant est cette coïncidence, c’est également cette semaine qu’a été remis aux pouvoirs publics,le rapport du Conseil Supérieur Audiovisuel (CSA) sur « l’accès des associations aux médias audiovisuels« .
Sur la base d’un état des lieux approfondi des besoins et des attentes de chaque acteur, le rapport formule dix propositions pour faciliter une meilleure exposition des associations dans les médias audiovisuels nationaux et locaux, avec trois objectifs visant à renforcer l’équité, la clarté et la promotion de l’engagement citoyen. En clair, faire disparaître tout favoritisme pour répondre à la polémique lancée il y a 1 an et demi par Pierre Bergé, à la tête du Sidaction. Il avait alors déclaré sur France Info « Le Téléthon parasite la générosité des Français de manière populiste. »
Par ailleurs, les autres propositions du rapport insistent sur la nécessité d’inviter des représentants associatifs dans les émissions, de mieux identifier à l’antenne la destination des dons ou encore de nommer un référent Associations au sein de chaque média,… et la marmotte met le petit chocolat dans le papier d’alu ! Bien évidemment !
Ce sont certes de bonnes intentions et de bonnes incitations mais aujourd’hui pourquoi vouloir encore asservir les médias, les racoler, les squatter pour communiquer lorsqu’on est une association mais également une entreprise, une personnalité ? Au risque en plus que les portes de la médiatisation ouvertes au prix d’un effort démesuré reviennent aussitôt et encore plus violemment en pleine tête le jour où cette même personne ou organisation fait l’objet d’un scandale.
Grâce au web 2.0, si chacun est devenu journaliste comme le constate Ignacio Ramonet, chaque personnalité ou organisation peut devenir surtout son propre médium. Son propre site internet, son blog, sa newsletter peut faire aujourd’hui office de vrai magazine composé d’articles écrits, de chroniques ou émissions de radio et de vidéos. De ce fait c’est vous qui offrez directement l’information que vous souhaitez communiquer, comme pour les fruits et légumes, directement du producteur au consommateur ! Et en plus les vrais journalistes viendront, eux mêmes, jusqu’à vous puisque vous êtes la meilleure, la plus crédible et la plus légitime des sources de votre information.
De récentes recherches ont déjà montré que les 18-30 ans passaient plus de temps en ligne que devant la télévision, ce dernier rapport révèle cette fois que ce sont les 31-44 ans qui passent plus de temps en ligne que sur leur canapé. Que demander de plus ?
Peut-être que des journalistes « explosés » travaillent uniquement pour vous désormais !
PS : À l’occasion de la sortie de son livre L’Explosion du journalisme, Ignacio Ramonet sera l’invité de Franz-Olivier Giesbert , ce vendredi 11 mars à 23 h, dans l’émission « Semaine critique ! », sur France 2.
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