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Accueil du site > Actualités > Médias > Turquie : les fantômes de l’Anatolie (III)

Turquie : les fantômes de l’Anatolie (III)

Le Collectif VAN vous propose la dernière partie de la traduction de l’article du Turc Tolga Eren, paru sur le site kurde Nasname. « Pouvons-nous laisser l’histoire aux historiens ? » s’interroge Tolga Eren en soulignant le caractère outrancièrement mensonger de l’histoire revisitée par l’Etat turc. « Combien de temps un pays fondé sur des mensonges peut-il exister ? Comment guérir de cette folie, de cette maladie mentale ? », de cette « schizophrénie paranoïaque » ? Tolga Eren souligne la continuité entre les responsables du génocide arménien de 1915, ces membres du Comité Union & Progrès qui « se sont fait une place parmi les cadres dirigeants de la jeune république (…) et se sont appropriés le crime » et la Turquie moderne de Mustapha Kemal, et il interroge : « D’après vous, pourquoi Atatürk a-t-il accordé des rentes aux familles des criminels du génocide arménien ? (…) Un génocide planifié jusqu’aux moindres détails et conduit par la main de l’Etat. Un crime contre l’humanité, organisé sous le couvert d’un déplacement de populations en prétextant la guerre. » L’auteur continue : « Une demande d’excuse ne sera jamais suffisante. Il en faut beaucoup plus. Mais d’abord, nous devons nous mettre à leur place. (…) La question n’est pas seulement une question de génocide, c’est le traumatisme de perdre les terres que tu as toujours appelées ta patrie ». On ne peut que saluer le courage de l’auteur de cet article. Des positions malheureusement encore bien minoritaires chez les intellectuels de Turquie. Un jour viendra peut-être…

Tolga Eren : Un fantôme se balade en Anatolie

D’accord. Alors, pourquoi l’Institut Turc d’Histoire essaye-t-il de lier la dynastie arménienne Gamsaragan, les fondateurs de la ville d’Ani, à la tribu Saka, une soi-disant branche des Turcs Oguz, les Kemer-Sakanlı - il est évident que c’est une histoire mensongère - on peut même se demander si les Kemer-Sakanlı étaient vraiment Turcs. Pourquoi le nom d’Ani devient-il ’ANI’ ? (Nota CVAN : sans point sur le "i", ’ANI’ signifie ’souvenir’ en turc). N’est-ce pas un signe de faiblesse ? Pourquoi cet effort pour trouver un lien ? Est-on complexé par le fait que les Turcs soient venus en Anatolie plus tard ? Pourquoi dit-on que les églises arméniennes chrétiennes ont été construites par les Turcs ? Pourquoi Atatürk avait-il dit que « l’Anatolie était turque dans l’histoire, par conséquent elle est turque et restera toujours turque » ? Pourquoi avait-il ressenti le besoin de combler un manque, en falsifiant clairement l’histoire et avait-il essayé de lier les origines des civilisations grecque et égyptienne aux Turcs, voir même d’y voir l’origine de toutes les langues du monde ? Tous ces efforts pour justifier des origines avec des affabulations qui ne peuvent servir qu’à nous ridiculiser. Comment cela peut-il nous rendre crédibles ? Après tant de déformations et de manipulations, comment pouvons-nous respecter les thèses historiques des Turcs ? Comment pouvons-nous faire confiance à ces thèses ? En conclusion, comment pouvons-nous laisser l’histoire aux historiens ? Pourquoi, lors de son discours à Adana, Atatürk avait-il dit « les Arméniens n’ont aucun droit sur ces terres » ?

Ces terres peuvent-elles accepter tant de mensonges ? La vérité ne surgira-t-elle pas à un moment ou un autre ? Pouvez-vous cacher la vérité ? Combien de temps un pays fondé sur des mensonges peut-il exister ? Combien de temps peut-il poursuivre son existence en dépit d’une grande injustice ? Sans cette confession, comment ce pays peut-il se purifier et trouver la sérénité ? Comment guérir de cette folie, de cette maladie mentale ? Je réponds : on ne peut pas. Il y a une expression « lorsque tu commences à te mentir à toi-même, tu entrebâilles la porte de la folie ».

Voici la folie que nous sommes en train de vivre. Ce qui perdure depuis 80 ans, et ce qui est devenu une schizophrénie paranoïaque, c’est l’état d’un pays qui regarde autour de lui avec suspicion, qui se sent encerclé, qui voit des ennemis partout, qui s’isole et se détache du monde entier, et qui n’arrive pas à devenir membre de la famille de l’humanité. La cause de tout cela est un crime contre l’humanité qui est ancré dans notre subconscient, qu’on n’arrive pas à affronter, qu’on évite d’affronter et qu’on repousse dans les profondeurs. Cela ressemble à la peur du voleur qui craint qu’un jour on ne lui enlève les biens qu’il a volés. D’ailleurs, ça s’est passé exactement comme cela lors de la formation de la République. Les notables, les Aga, les pachas et les membres du Comité Union et Progrès, ayant partagé le butin du pillage, ont participé à la défense de l’Anatolie et se sont fait une place parmi les cadres dirigeants de la jeune république. En faisant cela, ils se sont appropriés le crime. D’après vous, pourquoi Ataturk a-t-il accordé des rentes aux familles des criminels du génocide arménien, pourquoi leur a-t-il attribué les maisons restantes des Arméniens ?

Actuellement, les défenseurs de la thèse officielle s’attachent souvent à l’argument suivant : les Arméniens étaient minoritaires. Moi, je dis : « non, ils n’étaient pas minoritaires ». Malgré le fait que les Kurdes étaient éparpillés (d’une façon forcée) sur le territoire arménien, ils n’étaient pas minoritaires. Donnons l’explication suivante : on parle d’une population anatolienne, au début de la 1ère guerre mondiale, atteignant 10 millions de personnes. On peut affirmer que 1,5 million étaient des Arméniens, sans oublier de préciser que sur l’ensemble du territoire de l’Empire, ce chiffre était de 2 millions, dans la région de l’Egée 1,5 millions étaient Grecs et sur la côte de la mer Noire, il y avait 1 million de Grecs ; quant aux Assyriens, on donne ces chiffres entre 500.000-700.000, au total il y avait près de 5 millions de chrétiens. Presque la moitié de la population anatolienne.

Qu’allait-il advenir alors de ces gens ? On pouvait très bien leur donner des droits nationaux, les regrouper dans une région, par exemple on pouvait donner aux Arméniens une sorte d’autonomie, regroupant les autres entités chrétiennes, grecques, assyriennes et autres, on aurait pu ainsi gagner ces nations. Ou bien une société démocratique multi-culturelle. Ce que je veux dire : en réalité, tout pouvait être résolu par la dialogue. Cette question a-t-elle jamais été posée avant d’emprunter le chemin de la violence ? C’était exactement ce qu’il fallait faire en réalité. L’autre choix n’était par le choix naturel et les conséquences horribles ne pouvaient pas être évitées. Car vous détruisez le tissu naturel de l’Anatolie : cette approche en force ne pouvait être mise en œuvre que par le génocide, pas par un autre moyen.

Un génocide planifié jusqu’aux moindres détails et conduit par la main de l’Etat. Un crime contre l’humanité, organisé sous le couvert d’un déplacement de populations en prétextant la guerre. De plus, une opération concernant les Arméniens des régions n’ayant aucun rapport avec les fronts de guerre comme Edirne,Tekirdag, Canakkale, İzmit, Kütahya, Eskisehir, İzmir, etc.. Qu’est-il arrivé aux maquisards dans les montagnes ? Rien. Quels sont ceux qui ont été punis, qui ont été exilés sur les routes ? Les femmes, les enfants, les vieillards. Alors pourquoi ? Si on les avait laissés chez eux, que ce serait-il passé ? Rien.

L’objectif à atteindre était différent et tout était planifié pour leur départ sans retour. Les autres immigrés étaient installés aussitôt dans leurs maisons. On a visé à réduire leur nombre [le nombre des Arméniens] à une proportion raisonnable, à moins de 5%. Bahaeddin Şakir s’est déplacé en Anatolie pour donner personnellement des instructions, jusque dans les moindres recoins. Les hommes respectables et dignes qui ne souhaitaient pas participer à ce crime contre l’humanité ont été assassinés, d’ailleurs ils avaient dit [les Unionistes] que les défenseurs des Arméniens seraient pendus devant leur propre maison. De plus, ils ont lancé des fatwas disant que les biens des Arméniens étaient ’hallal’ pour eux, incitant ainsi la population à y participer [au pillage].

Les troupes des Forces Spéciales - Teşkilatı Mahsusa – étaient placées le long de l’itinéraire, elles donnaient l’impression que les convois étaient attaqués par des bandits, tandis que les gendarmes n’intervenaient pas. Pour accomplir cette besogne, tous les criminels coupables de meurtres, de viols, ont été libérés des prisons et ont été obligés de se joindre au Teskilat-i Mahsusa. Les lits des fleuves, les pieds des falaises, les cavernes, les puits étaient remplis de cadavres d’innocents.

Le peuple [turc et kurde], sachant qu’ils [les Arméniens] allaient vers une mort certaine, attaquait ces groupes [d’Arméniens] comme des mouches se précipitant sur une goutte de miel, et les pillait, essayait de leur prendre tout ce qu’ils avaient : les pièces d’or qu’ils avaient cousues sur leurs vêtements, quelques pièces d’argent, des morceaux de pain sec, des vêtements, jusqu’à leurs chaussures.

Même un morceau de pain sec était de trop pour eux. Et les enfants ? C’était dommage, c’était un pêché, c’était une main d’œuvre, ça représentait un capital, ils les ont pris, ils les ont partagés entre eux (Nota CVAN : comme un butin). Et les belles femmes ? C’était vraiment dommage ! Ils n’arrivaient pas à les départager ! Ne seraient-elles pas bien dans leurs petits harems ?

C’était une frénésie totale, tout le monde se précipitait sur ce butin, le butin du navire naufragé, ils saisissaient ce qu’ils pouvaient. Je me demande si, pour une nation, il y a une tragédie plus grande que celle-là ? Un peuple ne vit-il pas pour venger cela ? Il vit même jusqu’à l’éternité. En vérité, comme je dis toujours, une demande d’excuse ne sera jamais suffisante. Il en faut beaucoup plus, beaucoup plus. Tout ce que nous pouvons faire. Tout ce dont nous sommes capables. S’il le faut, il faut qu’on les porte sur nos têtes. Mais d’abord, nous devons nous mettre à leur place. Nous ne l’avons jamais vécu, nous ne connaissons pas ça car nous étions une société nomade, nous ne savons pas ce que veut dire rester à un endroit pendant 3000 ans, voici notre problème. Lorsqu’on va comprendre ceci, c’est-à-dire lorsqu’on va comprendre ce que signifie pour un peuple qui n’a pas connu d’autre patrie que ses terres, ce que signifie pour lui le fait de regarder de loin l’Ararat qu’il vénère, après avoir été chassé de sa patrie, à ce moment-là, tout va être résolu.

En fait, au bout de 500 ans, vous pouvez maintenant le comprendre. Imaginez par exemple que vous soyez chassés d’Istanbul, le peuple entier. Imaginez que vous soyez éparpillés partout dans le monde. Il n’y a pas de paysage plus magnifique que le Bosphore, que Bebek, Emirgan, Taksim, Kadikoy, Besiktas, Uskudar (Nota CVAN : les beaux quartiers d’Istanbul). Il ne reste plus que les souvenirs de cette ville, des transports en bateaux et des mouettes que vous nourrissiez avec des morceaux de simit (Nota CVAN : pain aux graines de sésame).

Les îles aux Princes, la tour de Kız Kulesi, les tablées de conversations avec des amis, face au Bosphore, autour du raki et du poisson, les jours où vous aviez nourri les pigeons sur la place d’Eminonu, le Grand Bazard, la mosquée de Sultanahmet, le palais de Topkapı, votre première entreprise à Mecidiyeköy, votre première maison à Aksaray, le parc où vous aviez emmené vos enfants, l’école primaire que vous avez fréquentée, la Colline de Camlica où vous aviez tenu la première fois par la main votre chérie, tout cela n’existe plus, Istanbul n’existe plus pour vous ! Et même si vous étiez partis au bout du monde, sans jamais pouvoir revenir, votre coeur est resté ici, votre chérie appartient à un autre, vous y pensez, vous pleurez, et vous mourrez avec ce pénible chagrin nostalgique.

Pensez-y une fois. Sentez-le. Lorsque vous allez le sentir, à l’instant même vous allez dire « tenez prenez tout, car vous les méritez davantage » mais lorsque vous direz cela, eux ne diront pas « oui, partez, allez-vous en, nous voulons tout » ; lorsque vous allez le dire, ils diront « non, ne partez nulle part, vivons ensemble en paix ». Je l’ai toujours dis, la question n’est pas seulement une question de génocide, c’est le traumatisme de perdre les terres que tu as toujours appelées ta patrie. Ce traumatisme ne peut être réparé en aucune circonstance mes amis !

Oui je demande pardon, je demande même pardon du fond de mes racines pour toute mon existence. Sur ces terres où je suis arrivé plus tard du Caucase en tant qu’immigré, je demande pardon au nom de mes ancêtres qui se sont installés dans leurs villages, je demande pardon parce qu’ils sont restés silencieux à leur départ, parce qu’ils ont récupéré leurs biens (Nota CVAN : le verbe ’konmak’ utilisé fait allusion à un oiseau chasseur qui ’se perche’ sur sa proie sans défense, sans fournir d’effort). Parce que ‘je suis descendu de la montagne et que j’ai chassé celui de la vigne’ (Nota CVAN : l’expression turque signifie dans ce contexte, ‘je suis un rustre qui a chassé le civilisé’). Parce qu’après leur départ, ces terres ont perdu leur âme et elles se désertifient de plus en plus. Pour cette géographie que nous ne nous efforçons même pas de connaître vraiment et sur laquelle nous plantons une culture factice et sans racines.

J’ai honte parce que j’ai fait exploser leurs églises, j’ai détruit leurs monastères, j’ai essayé d’effacer toute trace de leur existence, je ne connais même pas les racines des noms des villages, des districts, des villes, des montagnes, des fleuves qui portent toujours les traces, parce que j’ignore les mots arméniens entrés dans notre langue, les plats arméniens, les coutumes arméniennes entrées dans ma culture. J’ai honte parce que je suis étranger à ces terres à ce point-là, parce que je ne connais pas deux mots d’arménien, de grec et de kurde, parce que, eux, ils parlent ma langue. J’ai honte parce qu’en ce moment il n’existe pas un seul village arménien en Anatolie (on ne peut pas compter le village de Vakifli car jusqu’en 1939, il n’était pas à l’intérieur des frontières de la Turquie). Aujourd’hui 10% de la population d’Egypte est chrétienne, cela correspond à 7,5 millions de personnes, 10% de la population de Syrie est chrétienne et cela correspond à 2 millions de personnes, je demande pardon parce que le pourcentage de la population [chrétienne] dans ce pays [la Turquie] est de 0,01 et chaque jour nous faisons tout pour les faire fuir encore.

Le voila, un fantôme se balade en Anatolie et c’est le fantôme des innocents qui ont subi le génocide, c’est le cri de la majorité silencieuse de l’Anatolie. Ils ne sont pas seulement les ancêtres des Arméniens vivant en Arménie. Ce sont les Grecs, les Kurdes, les Assyriens, les Chaldéens, les Nestoriens, les Yezidis, les Alevis, ce sont les habitants de ces terres. En vérité, ils sont l’Anatolie. Et pour que ces âmes reposent en paix, je m’agenouille. Je présente mes excuses pour que la malédiction se lève, pour que ces terres retrouvent la sérénité et la paix. Je ne me contente pas de présenter des excuses, j’ouvre mes bras à ceux qui sont dispersés partout dans le monde mais qui n’ont d’autre patrie que l’Anatolie, aux vrais enfants de l’Anatolie, les Arméniens, les Grecs et les Assyriens et je les invite dans leur pays d’origine. Je leur dis "venez s’il vous plait", "Bienvenue dans votre pays d’origine ", revenez sur ces territoires vides, déserts, maudits, visités par des fantômes, pour que cette terre retrouve sa vitalité et son âme. Je fais cela au nom de l’humanité. J’en suis redevable. Car il faut plus que la demande d’excuses…

Tolga Eren

21 Décembre 2008

Traduction du turc : S.C. pour le Collectif VAN - 22 janvier 2009 - 07:10 - http://collectifvan.org/

Article mis en ligne sur :

Turquie : les fantômes de l’Anatolie (III)

Lire aussi :

Turquie : les fantômes de l’Anatolie (I)

Turquie : les fantômes de l’Anatolie (II)

 


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7 réactions à cet article    


  • maharadh maharadh 3 avril 2009 21:32

    Entre 1894 et 1896, comme les Arméniens réclament des réformes et une modernisation des institutions, le sultan en fait massacrer 200.000 à 250.000 avec le concours diligent des montagnards kurdes.

    Un million d’Arméniens sont dépouillés de leurs biens et quelques milliers convertis de force. Des centaines d’églises sont brûlées ou transformées en mosquées... Rien qu’en juin 1896, dans la région de Van, au coeur de l’Arménie historique, pas moins de 350 villages sont rayés de la carte.

    Les « Jeunes-Turcs » veulent se démarquer des « Vieux-Turcs » qui, au début du XIXe siècle, s’opposèrent à la modernisation de l’empire.

    Ils installent au pouvoir un Comité Union et Progrès (CUP, en turc Ittihad) dirigé par Enver pacha (27 ans), sous l’égide d’un nouveau sultan, Mohamed V.

    Dès 1909, soucieux de créer une nation turque racialement homogène, les Jeunes-Turcs multiplient les exactions contre les Arméniens d’Asie mineure. On compte ainsi 20.000 à 30.000 morts à Adana le 1er avril 1909...

    Les Jeunes-Turcs lancent des campagnes de boycott des commerces tenus par des Grecs, des Juifs ou des Arméniens.

    Le sultan déclare la guerre le 1er novembre 1914. Les Turcs tentent de soulever en leur faveur les Arméniens de Russie. Mal leur en prend... Bien qu’en nombre supérieur, ils sont défaits par les Russes à Sarikamish le 29 décembre 1914.

    L’empire ottoman est envahi. L’armée turque perd 100.000 hommes. Les Jeunes-Turcs profitent de l’occasion pour accomplir leur dessein d’éliminer la totalité des Arméniens de l’Asie mineure, qu’ils considèrent comme le foyer national exclusif du peuple turc. Ils procèdent avec méthode et brutalité.

    L’un de leurs chefs, le ministre de l’Intérieur Talaat Pacha, ordonne l’assassinat des Arméniens d’Istamboul puis des Arméniens de l’armée, bien que ces derniers aient fait la preuve de leur loyauté (on a ainsi compté moins de désertions chez les soldats arméniens que chez leurs homologues turcs). C’est ensuite le tour des nombreuses populations arméniennes des sept provinces orientales (les Arméniens des provinces arabophones du Liban et de Jérusalem ne seront jamais inquiétés).

    La « Loi provisoire de déportation » du 27 mai 1915 fixe le cadre réglementaire de la déportation des survivants ainsi que de la spoliation des victimes.

    Dans les villages qui ont été quelques semaines plus tôt privés de leurs notables et de leurs jeunes gens, militaires et gendarmes ont toute facilité à réunir les femmes et les enfants. Ces malheureux sont réunis en longs convois et déportés vers le sud, vers Alep, une ville de la Syrie ottomane.

    Survivent toutefois beaucoup de jeunes femmes ou d’adolescentes (parmi les plus jolies) ; celles-là sont enlevées par les Turcs ou les Kurdes pour être vendues comme esclaves ou converties de force à l’islam et mariées à des familiers (en ce début du XXIe siècle, beaucoup de Turcs sont ainsi troublés de découvrir qu’ils descendent ainsi d’une jeune chrétienne d’Arménie arrachée à sa famille et à sa culture).

    En septembre, après les habitants des provinces orientales, vient le tour d’autres Arméniens de l’empire. Ceux-là sont convoyés vers Alep dans des wagons à bestiaux puis transférés dans des camps de concentration en zone désertique où ils ne tardent pas à succomber à leur tour.

    Au total disparaissent pendant l’été 1915 les deux tiers de la population arménienne sous souveraineté ottomane.

    En Occident, les informations sur le génocide émeuvent l’opinion mais le sultan se justifie en arguant de la nécessité de déplacer les populations pour des raisons militaires !

    Le gouvernement allemand, allié de la Turquie, censure les informations sur le génocide. L’Allemagne entretient en Turquie, pendant le conflit, une mission militaire très importante (jusqu’à 12.000 hommes). Et après la guerre, c’est en Allemagne que se réfugient les responsables du génocide, y compris Talaat Pacha.

    Ce dernier est assassiné à Berlin le 16 mars 1921 par un jeune Arménien. Mais l’assassin sera acquitté par la justice allemande, preuve si besoin est d’une réelle démocratisation de la vie allemande sous le régime républicain issu de Weimar !

    À la vérité, c’est seulement dans les années 1980 que l’opinion publique occidentale a retrouvé le souvenir de ce génocide, à l’investigation de l’Église arménienne et des jeunes militants de la troisième génération, dont certains n’ont pas hésité à recourir à des attentats contre les intérêts turcs.

    Les historiens multiplient depuis lors les enquêtes et les témoignages sur ce génocide, le premier du siècle. Le cinéaste français d’origine arménienne Henri Verneuil a évoqué dans un film émouvant, Mayrig, en 1991, l’histoire de sa famille qui a vécu ce drame dans sa chair.

    Les « Jeunes Turcs » sont à l’origine du sentiment national turc. Ils ont permis l’émergence d’une grande nation. Mais ils sont aussi responsables de l’extermination de la plus grande partie des chrétiens arméniens d’Asie mineure en 1915.

    En 1923, le général Moustafa Kémal a parachevé la « turcisation » de la Turquie en expulsant les Grecs qui y vivaient depuis la haute Antiquité.

    Istambul, ville aux deux-tiers chrétienne en 1914, est devenue exclusivement turque et musulmane après cette date. Depuis lors, les gouvernements turcs s’obstinent à ne pas vouloir reconnaître le génocide arménien. C’est le cas aussi de la presque totalité des citoyens de ce pays. Qu’ils appartiennent à la minorité laïque ou à la majorité islamiste, ils ne veulent rien renier du nationalisme et de l’idéologie raciale de Moustafa Kémal et des Jeunes Turcs.

    Source : hérodote


    • Hieronymus Hieronymus 3 avril 2009 23:04

      @ l’auteur
      merci pour ce long recit tres bien documente
      oui, c’est un crime et un crime innommable, transformer en proie facile pour le reste de la population des citoyens paisibles et loyaux, c’est abolir tout sentiment de dignite et de respect de soi ..
      les Turcs allaient appliquer vis a vis des Chretiens d’Anatolie la methode du salami, propre a tout systeme pervers de domination totalitaire, on commence par le cas le plus "delicat" avec les Armeniens car les plus nombreux et les plus susceptibles par leur proximite geographique d’etre aides par une puissance etrangere (les Russes), puis les Assyro-Chaldeens (facile) et enfin les Grecs (plus difficile), quoiqu’il en soit c’est une monstruosite irreparable et meme si les Turcs nes bien apres n’en sont pas responsables, il n’est pas normal qu’ils ne soient pas ou ne veuillent pas etre conscients de ces atrocites passees !


      • SysATI 4 avril 2009 05:06

        J’aimerai rajouter un grain de sable turc au sujet si vous le permettez....

        Je suis d’origine turque et j’ai donc baigné dans cette ambiance "négationniste" toute mon enfance...

        Mon opinion sur la question n’est donc forcément pas "objective".

        Si j’écris ce commentaire, ce n’est pas pour "négationner" ni pour critiquer mais bien tout simplement pour apporter un éclairage légèrement différent. Je ne suis pas historien et j’essaie tout simplement d’avoir du bon sens...

        A vous de juger si ce commentaire est négationniste, totalement biaisé, faux ou peut être partiellement vrai et digne d’être lu par un français pas forcément au courant de ces choses la...

        La question que je voudrais en fait poser est la suivante : "à qui profite le crime" ?

        Pourquoi vouloir à tout prix faire admettre l’existence d’un génocide d’un coté ou refuser tout débat sur la question de l’autre ? Tout ceci pour des événements vieux de plus d’un siècle...

        L’histoire étant une science basée sur l’analyse de faits, on peut assez difficilement interpréter une période de l’histoire de façon aussi différente et antagoniste sans qu’il y ait des non-dits derrière...

        Un négationniste à la turque aurait commencé par pinailler sur les chiffres, le nombre de morts et autres moyens de noyer le poisson. Je n’étais pas la, vous non plus, mais partons du principe que les chiffres avancés sont exacts. Un grand nombre d’individus ont donc été assassinés pendant la fin troublée de l’histoire Ottomane.

        Admettons également qu’il y avait bien une volonté politique derrière ces massacres.

        Il y donc bien meurtre avec préméditation d’une population avec comme seule raison une différence ethnique, ce qui est bien la définition d’un génocide.

        Le premier bémol que j’aimerai apporter, c’est sur l’existence de cette volonté politique dans un empire en pleine déliquescence et occupé de toute part. C’est je pense donner bien du crédit à ce pouvoir de plus en plus inexistant à l’époque et distant de plus de 1000Kms.... C’est comme imaginer aujourd’hui que le gouvernement de Kaboul a un quelconque pouvoir dans les provinces Afghanes.

        Il me parait également bien angélique de supposer que les "pauvres arméniens " n’y étaient pour rien et que les "horribles turcs " leurs ont sautés dessus comme ça un soir histoire de se faire un petit génocide alors qu’ils vivaient ensembles sans histoire depuis des temps immémoriaux...

        La vérité est sans doute quelque part au milieu du guet.

        L’empire est en train de crever, pourquoi ne pas profiter de l’occasion pour instaurer un état arménien ?
        (je ne fais que lire entre les lignes : "Entre 1894 et 1896, comme les Arméniens réclament des réformes et une modernisation des institutions...")

        Surtout que les Russes, les Anglais, les Français, les Grecs en auraient été absolument ravis et qu’ils ont du très certainement du financer le mouvement... Sans parler de tous les religieux catholiques...

        Manque de pot l’Empire n’a pas apprécié et il avait encore des capacités de nuisances...

        Comme à leur accoutumée les occidentaux ont d’abord "foutu la merde " mais n’ont ensuite rien fait pour aider cette population qu’ils ont mené à l’abattoir... Allez-y les gars on est derrière vous..... puis plus personne.....

        Le gouvernement Turc pousse ce raisonnement jusqu’à l’absurde en citant des chiffres de "pauvres turcs " assassinés par les "horribles arméniens " bien supérieurs aux chiffres avancés par les arméniens eux-mêmes. Genre c’est pas nous qui vous avons génocidés, mais c’est vous.....

        Ce n’est sans doute pas tout à fait exact (euphémisme ?), mais est-ce totalement absurde de croire qu’en cette période trouble de guerre il y ait pu y avoir une volonté de s’émanciper de la part des Arméniens (soutenus en cela par les forces et l’argent occidental) et que l’Empire a réagit violemment en supprimant ce "danger " ?

        Ou en faisant faire le sale boulot aux chefs de tribus locaux, ce qui revient au même...

        Très récemment nous avons eu droit au même genre de situation pas très loin géographiquement.
        Heureusement cela c’est mieux terminé pour les Géorgiens... En résumant grossièrement, les Géorgiens croyant les promesses américaines ont attaqués les Russes. Les Russes n’ont pas appréciés et leur ont foutu la pâtée. Bien entendu les Américains n’étaient plus la pour défendre leurs "alliés " (idem il y a quelques années avec les Kurdes, le père Bush et Saddam) Heureusement pour les Géorgiens, les Russes n’ont pas poussé leur avantage jusqu’à l’occupation totale de la Géorgie et l’annexion pure et simple du pays... Suivi éventuellement d’un "nettoyage ethnique " à la Yougoslave.

        Bien entendu la presse occidentale a relaté ces événements comme une attaque brutale de l’armée Russe sur un pauvre petit pays tout gentil dans son coin.... Il faut avoir sa carte de l’UMP pour gober ce genre de discours...

        Cela me parait quand même beaucoup plus plausible qu’un massacre à la SS et camps de concentration...

        Donc si génocide il y a eu, c’était loin d’être la Shoa ou l’histoire du loup et de l’agneau.

        Le second bémol est que même en admettant que le pouvoir politique avait effectivement bien le pouvoir de réaliser ce génocide, en quoi le gouvernement actuel devrait-il en être tenu pour responsable ?

        La France de De Gaulle est elle responsable de la police de Pétain ?
        La France a-t-elle restitué les avoirs qui ont été confisqués aux juifs qui ont finis au Vel d’hiv ?
        (je n’en sais rien et je le leur souhaite, mais j’en doute beaucoup....)

        Personne ne semble se poser la question dans ces termes la et pourtant la République Turque et l’Empire Ottoman sont deux choses totalement différentes...

        Pourquoi demander à la République Turque créée en 1923 d’endosser la responsabilité d’un génocide perpétré avant même sa création ?

        Il n’y a pas eu de coup d’état et d’un pouvoir remplaçant l’autre (à la De Gaule/Pétain) mais la création d’un nouvel état sur une base totalement différente du précédent et qui a "conquis" pied à pied son territoire sur les décombres du précédent et sans reprendre ni ses institutions ni sa classe dirigeante.

        Il n’y a donc absolument aucune continuation entre les Ottomans et les Turcs.
        (c’est même malheureux pour ce peuple qui n’a du coup plus d’histoire... mais c’est un autre débat)

        Par ce que tout ça n’est en fin compte qu’une histoire de gros sous et c’est bien la que le bât blesse...

        Mon histoire personnelle, bien qu’inversée est peut être un début d’explication...

        Mes grands-parents venaient sans doute d’une famille de guerriers illustres à qui le sultan avait octroyé plusieurs villages / moulins / terres en Albanie. Ma grand mère et sa famille à du fuir l’Albanie en 1905 pour venir se réfugier en Turquie. Toute sa vie durant cette femme a ensuite été en procès avec l’état albanais pour essayer de récupérer "quelque chose". "Quelque chose" pour elle, mais sans doute surtout "quelque chose" pour ses enfants. Ce que tout parent normalement constitué aurait fait à sa place....

        Aujourd’hui les "collectifs arméniens pour la reconnaissance du génocide " font quoi exactement ?
        Est-ce juste une "démarche historique" ? Cathartique ? Psychanalitique ?
        Il faudrait être vraiment demeuré (ou avoir sa carte de l’UMP :) ) pour y croire...

        Le but du jeu est effectivement de récupérer "quelque chose" que des générations et des générations d’arméniens ont patiemment construits en Turquie et dont ils ont été spoliés...

        Le refus du gouvernement n’est pas de nature différente....
        Accepter l’existence d’un génocide revient à dire "oui, nous vous avons spolié de vos biens" et la conséquence logique est forcément "voici un dédommagement"... ou encore pire "vous pouvez rentrer chez vous ".

        Quel gouvernement peut accepter de prendre ce genre de position ?

        Les Etats-Unis ont-ils dédommagé les indiens d’Amérique ?
        Les Israéliens et les palestiniens, les français/anglais/espagnols/etc etc et leurs colonies ?
        (La crise récente dans les DOM-TOM n’est qu’un soulèvement colonial et rien d’autre...
        Si vous croyez que c’était pour avoir 200€ de rab, c’est forcément que avez votre carte de l’UMP :) )

        La démarche arménienne "pro-reconnaissance" n’est certainement pas aussi "pure " qu’elle aimerait le paraitre (et encore une fois c’est normal, n’importe quel parent ferait la même chose !).

        La population arménienne il y a 100 ans n’était certainement pas aussi angélique qu’on veut bien nous la présenter aujourd’hui.

        Et les turcs ne sont pas des psychopathes qui se sont réveillés un beau matin avec des pulsions génocidaires alors qu’ils vivaient depuis des siècles et des siècles aux cotés des arméniens....

        Tout ça pour dire qu’il y a un monde de différence entre ce qui s’est passé en Europe avec les Juifs pendant la WWII et ce qui s’est passé en Anatolie avec les Arméniens il y a un siècle. 

        Suite...


        • antyreac 4 avril 2009 08:11

          Tu t’étales beaucoup pour rien dire...

          Il ne pas pourtant difficile de dire que les turcs ont massacrés des populations innocentes parce que elles

          étaient chrétiennes.

          Ces populations chretiennes ont été spoliées de leur terre par l’envahisseur turc au moeurs barbares qui

          vivait sur le dos de ces populations.

          Ces populations, oui avaient le droit à une indépendance en particulier les grecs et les arméniens.





        • SysATI 4 avril 2009 22:23

          Désolé, mais tu te trompes lourdement...

          Les turcs ont massacrés des gens à cause de leur religion. OK, admettons, mais alors POURQUOI ?
          Ils ont vécus avec ces gens la pendant des siècles et des siècles sans les massacrer...

          J’ai étudié au Lycée St Joseph des frères des Ecoles Chrétiennes à Istanbul.
          Nombre de mes profs et de mes camarades étaient d’origine greque/juive/arménienne. 
          Ce lycée avait été autorisé par le sultan et installé sur des terres données par l’état aux Frères.
          Des lycées comme celui la il y en a encore une 10aine d’actifs à Istanbul aujourd’hui !
          Comment cela est-il compatible avec cette supposée volonté d’erradication des minorités chrétiennes ?

          D’autant que s’ils vivaient sur leur dos, comme tu le dis, c’était parfaitement stupide de faire ça....

          "Ces populations, oui avaient le droit à une indépendance en particulier les grecs et les arméniens."
          C’est à peine raciste ce que tu dis la... Eux avaient le droit, mais les autres minorités pouvaient aller se faire voir ailleurs ?

          Ce type de raisonnement est valable aujourd’hui, pas il y a 100 ans... 
          Tu ne peux pas juger des évennements d’il y a 100 ans avec des concepts contemporains...

          En 1931 (soit 50 ans plus tard) se tenait à Paris l’Exposition Coloniale....
          Et étaient "exposés" entre autre des pygmés...
          La population parisienne a été passionnée par ces "choses" mi-hommes mi-singes.

          Personne n’a idée de critiquer aujourd’hui cette exposition sous prétexte que des hommes étaient traités comme des animaux. Sans parler du fait que pendant des siècles la religion chrétienne a considéré les noirs comme des singes à peine évolués mais qui n’étaient définitivement pas humains et n’avaient pas d’âme...

          Aujourd’hui c’est une position que personne ne défend plus, mais à l’époque c’était malheureusement "normal"...

          > Turquie : les fantômes de l’Anatolie (III)
          par antyreac (IP:xxx.x2.163.249) le 4 avril 2009 à 08H11
          Tu t’étales beaucoup pour rien dire...

          Il ne pas pourtant difficile de dire que les turcs ont massacrés des populations innocentes parce que elles étaient chrétiennes.

          Ces populations chretiennes ont été spoliées de leur terre par l’envahisseur turc au moeurs barbares qui vivait sur le dos de ces populations.

          Ces populations, oui avaient le droit à une indépendance en particulier les grecs et les arméniens.


        • SysATI 4 avril 2009 05:06

           ...Suite

          Autre angle de vision qui a très certainement son importance pour appréhender le problème...
          Et qui fait que malheureusement la Turquie ne peut pas admettre l’existence d’un génocide...

          Pour un français, "la France " ça existe depuis Clovis et les Francs. Le pays n’a jamais été occupé (à part l’Alsace et la Lorraine :) ) et pourtant il y a eu des velléités de séparations (les Chouans hier, les Corses aujourd’hui).

          Mais en France cela ne pose pas de problème majeur. Personne n’imagine vraiment une ile Corse indépendante ou la Bretagne séparée du reste du territoire par des postes frontière. Donc tout le monde peut "gueuler" tranquille, cela ne porte pas à conséquences...

          La Turquie à l’inverse n’a pas du tout cette histoire la.

          L’empire Ottoman a toujours été multi-etnique/multi-culturel et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle il a disparu sans faire trop de vagues dans les poubelles de l’histoire.

          Pendant des siècles les turcs ont eu une politique très permissive vis-à-vis des étrangers qui étaient les bienvenus s’ils voulaient s’installer dans l’empire. S’il s’agissait d’un territoire occupé, les populations n’étaient pas converties de force ou "turquisées " de force. Pendant des siècles les ottomans ont donc régnés sur des peuples sans leur imposer leur culture/religion.

          Et le jour ou le couvercle (la chape de plomb si vous voulez) s’est entrebâillé, les peuples ont repris leur autonomie sans problème et sans grand dommage.

          [ Pour rappel, les juifs chassés d’Espagne par l’inquisition ont trouvé refuge à Istanbul et des siècles plus tard j’ai moi-même côtoyé des femmes habillées tout en noir et parlant espagnol dans les rues d’Istanbul. A l’époque les protestants se faisaient trucider en France par les catholiques, les Cathares/Templiers étaient exterminés etc etc...]

          Mais à la toute fin de l’empire, ou plutôt au tout début de la république actuelle, le pays ne faisait que quelques 10aines de kilomètres carrés autour d’Ankara (à l’époque petit village de bergers perché sur une colline).

          L’état ne peut viscéralement donc pas permettre aux minorités d’exprimer leurs différences, c’est bien trop risqué. On passé si près de l’annihilation, qu’il est hors de question de continuer cette politique ancestrale et idiote de "vivez comme bon vous semble ".

          D’où les problèmes avec la population kurde (enfin en partie, par ce qu’il y a biens d’autres causes...)

          C’était le mot d’ordre d’Atatürk en créant le pays et il faut comprendre qu’il n’y avait aucun autre choix possible "pour bouter l’Anglais hors du pays " (l’Anglais, le Français, le Grec, le Russe et forcément son allié l’Arménien et le Chrétien...)

          La situation du gouvernement actuel ne peut pas être différente aujourd’hui et il est absolument hors de question que l’on puisse "rendre" même un tout petit bout du teritoire à quiconque génocide ou pas. Si les turcs mettaient le doigt dans cet engrenage, il n’aurait pas de fin...

          Les Grecs réclament Constantinople et toute la cote ouest du pays, les Kurdes le sud-est, les Arméniens le nord-est. Autant remonter tout de suite sur les flancs de la coline et de faire d’Ankara le Lichtenstein du Moyen-Orient...

          Et même si cela était possible et que l’on faisait un peu de prospective utopique, aboutirait-on à autre chose qu’au sort que connaissent les Yougoslaves aujourd’hui ? Sans doute pas...

          Serait-ce un bien ? Certainement pas et pour personne...

          Juridiquement je ne vois d’ailleurs pas comment on peut faire porter la responsabilité de quelque chose à une entité qui n’existait pas au moment des faits. Et s’il n’y a pas responsabilité, donc dédomagements à la clé, à quoi sert tout cela ???


          Vu du petit bout de la lorgnette parisienne le "hou les méchants turcs qui ne veulent pas admettre le génocide " mérite un minimum d’explications.

          Ce sont les miennes, elles valent ce qu’elles valent mais j’espère qu’elles vous ont apporté un éclairage un peu différent de la bêtise ambiante qu’on lit sur le sujet quelque soit le "camp " qui s’exprime.

          Pour ma part je n’ai pas mis les pieds en Turquie depuis quelques décennies, je ne sais donc pas si la situation "officielle " a évolué ces dernières années mais je ne vois vraiment pas comment elle pourrait le faire à la lumière de ce que je dis plus haut...

          Mes ancêtres n’étaient pas à l’époque (surtout qu’ils sont pour moitié normands :) ) je ne suis donc en rien ni responsable, ni coupable, ni même vraiment concerné... Mais je m’interroge sur la pugnacité des uns et des autres depuis des années et j’essaie d’y voir plus clair. Napoléon a été la cause de la mort de millions d’hommes aux quatre coins de l’Europe, pourquoi n’y a-t-il pas de "collectif des victimes de Napoléon " ? Par ce que c’était 100 ans avant et qu’on a oublié ?

          Quand la Turquie se sentira assez forte pour assumer son passé et qu’elle fera son mea culpa que va-t-il bien pouvoir se passer ? Est-ce que les morts de l’époque reposeront plus en paix qu’aujourd’hui ?

          Que veut dire ce genre de phrase imbécile "...quoiqu’il en soit c’est une monstruosite irreparable et meme si les Turcs nes bien apres n’en sont pas responsables, il n’est pas normal qu’ils ne soient pas ou ne veuillent pas etre conscients de ces atrocites passees !"

          Je suis turc, je suis conscient et je suis sincèrement désolé pour les pauvres gens assassinés à l’époque.

          ET ALORS ??? Cela apportera quoi et à qui que je me flagelle tous les matins ?

          Depuis l’aube des temps des hommes tuent d’autres hommes souvent sous couvert de religion ou de race mais toujours pour leur voler leurs biens.

          Ils continuent à le faire AUJOURD’HUI sous nos yeux et pour exactement les mêmes motifs.
          (Nous aurions eu le président actuel à l’époque, nous aurions d’ailleurs été à leurs cotés pour piller leur pays et leur voler leur pétrole.)

          CA SE PASSE MAINTENANT les gars..... pas il y a 100 ans....

          Ca toujours existé, ça existe toujours et vu la façon dont le pays qui mis fin à la royauté continue à voter, c’est pas près de s’arréter... Donc je reviens à ma question initiale : "à qui profite le crime" et pourquoi s’acharner sur "la reconnaissance (ou le déni) du génocide" si n’est pas pour de basses raisons matérielles ?

          Commencont pas appeler un chat un chat, et la peut être qu’il y aura une solution...

          Mais tant qu’on parlera de "monstruosité irréparable" ou "d’atrocités passées" je doute qu’il en sorte quoi que ce soit de positif...

          Surtout quand ces remarques viennent d’un français, peuple qui a élu un tel président pour le diriger et se repait de TF1 tous les soirs.

          Pourquoi les français auraient-ils le droit d’être cons et ignares (de leur propre histoire coloniale et même de leur présent !) mais que "il n’est pas normal que les turcs ne soient pas ou ne veuillent pas etre conscients de ces atrocites passees !"


          PS : Je préfèrerai franchement que vous m’insultiez plutôt que de bêtement "moinser" ce commentaire pour le faire disparaitre... Et encore mieux que vous y répondiez de façon constructive... si c’est possible vu le sujet polémique...

          Donnez-moi au moins le bénéfice du doute même si vous ne voulez pas croire en ma sincérité...


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