Une certaine idée de la compensation
La télévision publique sans la pub est un casse-tête compensatoire pour la nouvelle commission chargée de mettre en oeuvre la dernière idée du président Sarkozy. Et au passage, on oublie Radio France.

Décidément, Nicolas Sarkozy possède un sens des mots hors du commun. Le chef de l’Etat vient d’installer une nouvelle commission, chargée de réfléchir à la mise en place d’une nouvelle forme d’entreprise audiovisuelle publique, débarrassée de ses recettes publicitaires. Cette commission télé est conduite par Jean-François Copé, qui cumule quelques recettes personnelles, avec ses fonctions de député, maire de Meaux et avocat. Histoire de compenser son pouvoir d’achat, sans doute. Mais revenons au sujet : la télé sans pub.
Nicolas Sarkozy veut deux choses :
1. une télé publique populaire débarrassée de la course à l’audience ;
2. la disparition du budget tiré de la pub sera compensée à l’euro près.
En ce qui concerne le point 1, on ne voit pas bien en quoi l’absence de publicité met fin a priori à la double ambition légitime (sinon à quoi sert d’être professionnel ?) de réaliser des programmes populaires (qui s’adressent donc au plus grand nombre) et de gagner de l’audience (c’est-à-dire de capter effectivement l’attention du plus grand nombre).
Sur le point 2, il y a une légère erreur de calcul. France Télévisions, c’est plus de 800 millions d’euros de recettes publicitaires (plus d’un milliard selon certains, mais n’exagérons pas). La pub à la télé publique, c’est 4 heures par jour en moyenne de temps de programme. Si on compense à l’euro près, il manque donc de quoi fabriquer 4 heures de programmes ! Mais peut-être que la « compensation », dans le jargon sarkozien, ce n’est pas de la comptabilité.
La télé sans pub, chers amis, avec l’inflation, la baisse du pouvoir d’achat et les caisses vides de l’Etat (ou bien j’ai mal compris), c’est un casse-tête. Le nouveau boulot de M. Copé n’a rien d’évident. D’autant qu’il s’agit avant tout que cette réforme ne se voit pas dans le porte-monnaie du contribuable. Pas question d’augmenter la redevance (116 €, la plus faible d’Europe actuellement). Les opérateurs de téléphonie et d’internet, et les vendeurs de matériel audiovisuel sont dans la ligne de mire. Autrement dit, les consommateurs pourraient supporter le coût de la fameuse compensation.
Ah ! Une dernière chose. Un détail. Dans l’histoire de cette compensation révolutionnaire et populaire, il y a un oubli de taille : la radio. Car « l’audiovisuel public », ce n’est pas seulement la télé, c’est aussi Radio France (France Inter, France Info, France Bleu, France Culture, France Musique, Le Mouv’, deux orchestres et quelques services annexes).
Sans la pub, 8 % du budget disparaissent. Ici, pour l’instant, aucune compensation prévue. D’ailleurs, Jean-François Copé, ce mercredi 20 février interrogé sur France Inter, était bien embêté par la question. « Ce n’est pas parce qu’il n’y a rien maintenant que cela empêche qu’on y réfléchisse », a-t-il dit. Soit !
Dans son dernier communiqué maison, le Syndicat national des journalistes (SNJ), constate que la radio est tenue à l’écart des réflexions présidentielles sur les compensations budgétaires. Le SNJ précise que 45 millions d’euros (le revenu de la pub pour Radio France), cela représente dix radios locales (le quart des antennes régionales actuelles). Les personnels de Radio France ne sont pas favorables à voir la pub galoper sur les antennes. Mais il y a un juste milieu. C’est probablement une autre histoire de compensation...
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