A ceux qui n’ont pas vu venir Donald Trump
Durant des mois, une écrasante majorité de médias, des experts, des spécialistes des Etats-Unis pronostiquaient une victoire d'Hillary Clinton, persuadés, sans doute d'une prédominence de l'idéologie libérale dans nos sociétés. Pourtant, des leaders d'opinion se sont fourvoyés et ont plutôt travaillé - volontairement ou non- à la valorisation de la communication plutôt qu'à celle de l'information. Désormais, le sentiment coupable de "n'avoir rien vu venir" pose des questions sur les compétences de ces comportements et sur la probité de tous ces dirigeants de la pensée.
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J’entends et lis des choses assez stupéfiantes ces derniers jours suite à l’élection de Trump, surtout de la part de gens de « gauche », essentiellement des « intellectuels » et des « journalistes » qui font part de leur stupéfaction, leur surprise, affirmant qu’ils n’ont « rien vu venir »… Je ne reviendrai pas sur ce point, étant donné les commentaires si nombreux qui ont sans doute permis de rabattre le caquet de ces prétentieux de « l’entre-soi » (qui n’est pas une spécificité de ce bord, entendons-nous bien), une caste effectivement de leaders d’opinion qui n’ont plus de leader que le nom.
C’est surtout que commencent à émerger des inepties de ce style : « Facebook a favorisé l’aveuglement en partageant des articles pro-Hillary » tout en affirmant son contraire : « Les réseaux sociaux ont permis l’émergence des fakes d’actualité mettant en lumière l’idée de complot et faisant la promotion d’idées réactionnaires ». Il faudrait savoir les « intellectuels qui savent », non ?
Enfin, il y a ces appels de plus en plus nombreux, grotesques et pathétiques de sociologues, psychologues, idéologues et autres « ogues » à tendance social-libérale (ça m’évite d’utiliser le terme de « gauche » qu’ils ont contribué à vider de sa substance) qui consistent à ajouter des contacts – sous-entendu de « droite » ou « réactionnaires » et même « à tendance fasciste »- afin de pallier la surprise engendrée par la découverte de cette large frange de la population qui en a assez du libéralisme économique et sociétal qui régit ce monde depuis 1989. Rajouter des contacts… Quel concept ! Pour faire quoi ? Les observer ? Se farcir leurs statuts contraires à ses propres principes et idées ? Pour voir « ce petit peuple de blancs frustré et mal élevé » ?
Allons allons. J’ai plusieurs milliers de contacts depuis une décennie. Des lecteurs ou simplement « potes » réels ou virtuels et figurez-vous qu’ils sont de tous bords ! Lorsqu’on écoute les pontes « démocrates » dans les médias mais aussi sur Facebook ou Twitter, toute personne de droite et à fortiori d’extrême-droite est le « Satan » qu’il faut éviter, combattre à tout prix, et éliminer du champ des débats… et toutes les personnes de gauche qui revendiquent l’anéantissement de ces élites qui gouvernent et de leurs armées de « petits soldats obéissants » de classe moyenne urbaine qui les soutiennent sont cataloguées de « fachos » ou/et « populistes » ou/et « démagos » ou/et « proto-communistes » ou/et « anarchistes violents » et/ou de « Rouges-Bruns » - J’ai tendance à être révulsé par ces mondains, ou/et urbains qui « n’ont rien vu venir » comme si, tiens, finalement, malgré leur critique formelle du Capitalisme, au fond, ils y trouvaient totalement leur compte. Nommer le Mal pour ces personnes, c’est taper sur ceux qui s’opposent à leurs idées et qui ne sont pas au pouvoir tout en laissant ceux qui nous dirigent continuer à mentir à ceux qui les financent : les citoyens de toutes classes sociales.
En fait, il ne s’agit pas de rajouter des contacts ou « d’ouvrir les yeux », cette posture étant encore une fois d’une condescendance et d’un pédant, elle ne mènera nulle part. Ceux qui se reconnaissent dans ce texte, d’une manière ou d’une autre auront compris que le nettoyage est en train de se produire de gré ou de force, qu’il est trop tard, que les questions sociétales ont submergé les luttes sociales, que l’argent public a favorisé des formes d’expressions artistiques et culturelles de façon unilatérale au point d’aseptiser et de détruire la liberté d’expression, que les pouvoirs publics interdisent des artistes de se produire par décret, que les citoyens, dans l’espace public, sont tenus à une « certaine retenue » (censure) se rabattant sur Internet pour parler comme on le faisait dans les bars, chez le coiffeurs ou le boucher du coin, sur la place publique, devant l’église ou dans les repas de famille. Une forme de « savoir-être » et une forme de « savoir-dire » ont été imposées. A cela s’ajoutent les « règles » ultra-libérales édictées par nos gouvernants et dont Bruxelles sert de plateforme interdisant la contestation radicale (donc libre) du système qui nous régit… et j’en passe… La liste est longue. Et ne parlons pas de la hiérarchisation des opinions : celui qui vend est celui qui est crédible, celui qui défend le « pouvoir d’achat » est celui qui est proche du « peuple », celui qui luttera contre « le sentiment d’insécurité » est le champion des « candidats »… Comme je l’écrivais en 2007, une révolution n’est pas nécessairement de gauche. Une révolution peut-être de droite, d’extrême-droite, islamiste, christianiste, raciste ou anti-raciste… Mais une révolution –massive et froide comme celle qui se déroule en ce moment- est la conséquence et non la cause des maux…
Léonel Houssam
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