Abstentionnistes, petits fonctionnaires, Républicains, souverainistes… Ces orphelins politiques en quête de représentants
Aidé par une gauche pulvérisée et une droite modérée sans espace politique, le duel Macron / Le Pen semble inévitable pour 2022. La tâche pour contrer cet effondrement politique et intellectuel semble délicate. A moins qu’une incarnation n’émerge en mêlant discours social, non techno, patriotique et sans radicalité institutionnelle.
Photo : Thomas Bresson (Manifestation de Gilets jaunes, à Belfort, le 29 décembre 2018)
En cette crise sociale et économique, la présidentielle de 2022 semble lointaine mais le calendrier impose déjà une réflexion. En effet, la situation favorise inévitablement le statu quo et la polarisation des débats. Les néolibéraux et gagnants de la mondialisation – un électorat maigre qui se mobilise fortement en temps électoral – ont leur candidat avec Emmanuel Macron, et Marine Le Pen incarne le vote contestataire. Entre les deux, tout est morcelé. Le principal parti de la droite modérée (Les Républicains, ex-UMP) ne semble compter que sur une candidature de Xavier Bertrand. Son espace politique est limité et semble ne se différencier d’Emmanuel Macron qu’avec l’image d’élu de terrain.
A gauche, le PS semble encore croire que le quinquennat Hollande fut une réussite politique et refuse toute introspection. Sa faillite intellectuelle est totale. Il en est de même pour la plus grande force politique de ce bord-là : Jean-Luc Mélenchon. Ne transformant pas l’essai de 2017, le leader de La France Insoumise a perdu une bonne partie de son électorat, en souhaitant préserver la ligne communautariste et indigéniste dans son mouvement.
Le duel Emmanuel Macron et Marine Le Pen est-il pour autant inéluctable ? Pour contrer cette défaite politique et intellectuelle, un candidat doit refaire le coup macronien de 2016, à l’envers, en réussissant un front du peuple.
Si l’union des gauches ou celle des droites n’apportent aucun débouché d’espérance politique, un espace transpartisan est toutefois ouvert. En rendant plus perceptible pour le peuple un programme qui lie la souveraineté, la défense du système social (la République sociale), l’intransigeance sur les principes républicains (laïcité notamment), le tout en modérant le poids des questions sociétales, son représentant permettrait de faire consensus et de retrouver un élan auprès du peuple, des abstentionnistes (qui défendent majoritairement le combat des Gilets jaunes), des « petits » fonctionnaires (policiers, infirmiers, enseignants, etc.) et des Républicains convaincus. Et le programme n'est-il pas déjà trouvé ? Il suffit de lire celui de Jean-Pierre Chevènement en 2002 pour retrouver tous les arguments. Une traduction moins technique et plus populaire s’est retrouvée en partie dans le discours patriotique de Jean-Luc Mélenchon en 2017. Cette inspiration, quasi chevènementiste, lui avait permis à l’époque d’entraîner une dynamique et d’être à un cheveu du second tour de la présidentielle.
Il ne faut pas oublier les retraités. Un électorat, qui se mobilise fortement. Il est globalement attaché aux valeurs traditionnelles de la France et à l’Europe. Il fuit les hypothèses apparaissant comme radicales, telles les candidats prônant « le Frexit » ou la « VIe République ». Ces deux idées sont vues comme des instabilités et des tables rases du passé.
Quelle peut être l'incarnation de ce mouvement fédarateur ? Michel Onfray, Arnaud Montebourg, Natacha Polony, Julien Aubert, Eric Zemmour, le général Pierre de Villiers, une autre hypothèse ?
Concernant Michel Onfray et Eric Zemmour, les deux intellectuels semblent s’extrémiser eux-mêmes, en se caricaturant. Ils apportent des éclairages parfois intéressants et importants pour le débat public mais, nul doute, leurs positions clivantes ne pourront satisfaire et séduire un électorat assez large : Michel Onfray vante l’anarchisme proudhonien et le fédéralisme, Eric Zemmour a un discours identitaire avec quelques dérapages au passage.
Dans tous les cas, le candidat de l’espoir doit être détaché du monde médiatico-politique, celui-ci suscitant actuellement le rejet au sein de la nation. Il peut être actuellement élu ou être un ex-élu, mais pour que sa personnalité ne soit pas mêlée à la tambouille politicienne, il doit être assez détaché des différents aréopages politiques : que ce soit ceux du pouvoir évidemment, ou ceux des instances nationales des vieux partis existants.
Ce candidat doit aussi apparaître comme étant une figure quasi naturelle pour rassembler un tel mouvement. Car c’est bel et bien cette incarnation qui permettra d’amorcer la dynamique.
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