Athènes en feu, récupération politique à Paris
Depuis dimanche soir, la Grèce vit un soulèvement populaire sans précédent, en réaction à l’adoption par le parlement du troisième plan d’austérité imposé par la Troïka (BCE, FMI et l’Union européenne). On a pu voir en direct sur Star.gr les images très violentes de la révolte dans les rues d’Athènes. A l’heure qu’il est, on dénombre plus d’une cinquantaine de blessés, une quinzaine de bâtiments brulés, et presque cent commerces saccagés.
Le soir-même, en soutien au peuple grec, des citoyens français lancent un appel à un rassemblement spontané devant l’Ambassade de Grèce à Paris. Un appel largement relayé sur les pages Facebook des mouvements citoyens (Indignés, Anonymous, Réelle démocratie maintenant, etc.). Cet appel lancé “en direct” ne mobilisa certes qu’une dizaine de personnes, mais elles étaient fermement déterminées à revenir dès le lendemain.
Puis, dans la nuit du 12 au 13 février, le Parti de Gauche a prit l’initiative d’un appel à toutes les forces de gauches (NPA, PIO, PCF, etc.) pour un rassemblement à Paris, à proximité de l’Ambassade de Grèce dans le 16ème arrondissement.
Le 13 février à 18h30, quatre cents personnes se sont donc rassemblés sur la place d’Urugay : des citoyens militants pour différents partis, mais aussi des citoyens apolitiques de tous bord.
On aurait pu espérer une coalition des différentes mouvances : apolitiques, alter-gauche et alter-droite. Enfin une convergence des luttes, qui viendrait soutenir l’insurrection du peuple grec, et qui proposerait un front uni contre le bi-partisme. Que nenni, en arrivant sur les lieux, nous constatons un clivage évident : les partisans du Front de gauche occupent la quasi totalité de la place. On ne voit que des drapeaux du Parti de gauche et du Parti de l’internationale Ouvrière (plus d’une quarantaine) et pas UN seul drapeau grec à l’horizon.
Étions-nous à un rassemblement censé défendre la cause des grecs, ou bien à un meeting de campagne en plein air ?
Les citoyens apolitiques qui s’étaient déplacés ont constaté la consternante surexposition des partis politiques qui, pour occuper l’espace médiatique et délivrer leur propagande de leur lutte partisane, sont prêts à occuper toutes les places et à s’accaparer tous les combats.
Beaucoup de partisans, sans doute excités par les élections présidentielles à venir, n’avaient visiblement pas compris qu’il s’agissait d’un appel à un rassemblement unitaire. Nicolas Dupont Aignan (Debout la République, parti de droite) a ainsi été chassé par des partisans de gauche ; il a rétorqué avant de quitter la place : « Vous n’avez pas le monopole de la colère du peuple grec ».
Après un discours consensuel et le chant en cœur de l’Internationale devant les caméras, Jean-Luc Mélenchon a filé à l’anglaise ; ses partisans, venus vraisemblablement pour écouter leur leader bien plus que pour soutenir le peuple grec, se sont rapidement dispersés dès 19h00, c’est-à-dire une demi heure seulement après le début du rassemblement…
Suite au départ des différents partis politiques, une centaine de personnes ont continué d’occuper la place jusqu’à 20h00 (heure de fin de l’autorisation préfectorale), avant d’être chassés par une quarantaine de policiers.
Les partis font campagne en toutes circonstances ! Pouvait-il vraiment en être autrement ? Ces révoltés de la demi-heure récupèrent les combats populaires mais ne dérange certainement pas le système. Alors que leur force de frappe, à travers une coalition non partisane, pourrait permettre des projets de grande ampleur, telle qu’une Assemblée Constituante, ils se contentent d’opérations médiatiques, s’accaparant au passage la colère du peuple. Loin des clivages partisans nous avons besoin d’une révolte du peuple, par le peuple et pour le peuple.
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