Avis de menace de réaction en chaine à EELV
François Hollande pousse-t-il à la fission d’EELV ?
François Hollande affirma à l’automne 2011, à la suite dit-on d’une injonction téléphonique d’Areva au lendemain de l’accord prévoyant la fermeture immédiate de Fessenheim et venant d’être conclu entre le PS et EELV en vue d’accéder au pouvoir, qu’il ne se sentait aucunement tenu par les engagements de celui-ci. Il donnait ainsi la mesure de ce qu’allait être l’attitude ultérieure de ces deux partis sur la question de Fessenheim. Une attitude teintée de veulerie ?
Puis finalement, semblant faire fi de cette si martiale et courageuse position, à l’occasion du débat l’opposant à Sarkozy il martela, mais en fait bien sûr de manière opportune, qu’il fermerait la centrale avant la fin de son mandat, soit au plus tard en 2017.
L’été passa, avec sa kyrielle de migrations touristiques et en particulier vélocipédique, et dans la suite, faisant preuve d’une grande générosité en termes de délai, il précisa le 14 septembre en ouverture de la Conférence environnementale que cette fermeture aurait lieu fin 2016. Pour finalement assouplir encore sa position quelques jours plus tard et indiquer qu’elle se ferait au plus tard le 31 décembre 2016. Probablement pour ne pas s’enfermer dans une date trop précise et laisser la porte ouverte à une fermeture plus précoce si une réelle opposition devait se faire jour.
Or vendredi dernier il a fait de nouveau marche arrière, dans un pas de danse d’une balourdise, ou mieux d’une gaucherie, qui devient franchement ridicule, autour du passage de l’année 2016 à l’année 2017. Ce sera donc désormais « fin 2016 début 2017 ».
Tout ça probablement pour jouer avec les nerfs des antinucléaires, et en particulier ceux d'EELV, parce qu’effectivement il est tout à fait désopilant de jouer avec eux. Il est vrai que le gouvernement n’a pas besoin des votes EELV à l’Assemblée nationale, que le peuple malien va bientôt porter Hollande en héros, et puis surtout que la situation à Fukushima et au Japon est des plus amusantes, voire carrément comique.
Demain, si l’on suit bien la logique présidentielle, la nouvelle position de Delphine Batho, ministre de l'écologie, devrait donc s’exprimer en des termes de ce style : « C’est à une heure indéterminée, mais traduisant une opinion déterminée, entre le 31 décembre 2016, minuit, et le 1er janvier 2017, 0 heure, qu’aura lieu la fermeture de la centrale de Fessenheim ». Et après-demain : « Finalement dans sa grande mansuétude notre Présimonarque a décidé qu’il fallait octroyer quelques secondes de répit à nos chers concitoyens-travailleurs et néanmoins camarades, bien que désobligeamment cégétistes, de la centrale de Fessenheim ». Et ainsi de suite, jusqu’à bien sûr la veille du premier tour des élections présidentielles de 2017 au cours de la quelle François Hollande annoncera, impérial, la fermeture immédiate et définitive de la centrale de Fessenheim conformément à l’accord passé entre EELV et le PS en vue de conserver ce si chéri Pouvoir. Forcément le jour même.
J’vous dit pas les nerfs des antinucléaires à c’moment là… Et sans doute bien avant.
A EELV manifestement le ridicule ne tue pas. (La preuve ? Pascal Durand, le secrétaire national, est toujours en vie !)
Et quelle fut la réaction immédiate et vive d’EELV, empreinte d’un inévitable courroux intarissable, à l’annonce de cette nouvelle reculade sous l’influence du lobby nucléaire du Président et de sa ministre de l’écologie ?
Il y eut tout d’abord la réaction d’Alain Jund, porte parole régional d’EELV Alsace, le 24 janvier, avant tout le monde parce qu'il fait partie des premiers exposés au risque des annonces explosives. D’après les Dernières Nouvelles d’Alsace, il piqua une colère : « Ça suffit ! EDF, Areva et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) doivent cesser de résister. Ils ne peuvent faire l’inverse des engagements de l’État ! Fessenheim doit fermer le plus tôt possible, pour des raisons de sécurité et parce que c’est un engagement du président de la République »
Mais dès le lendemain, Pascal Durand, d'une manière similaire à celle de son ministre auquel il tente apparemment de s’identifier parce que celui-ci après tout est parvenu à devenir ministre et qu’il veut sans doute prouver qu’il peut lui aussi le devenir, signait de son nom un communiqué qui laisse pantois. Cependant d’après sa formulation celui-ci émane à priori de l’instance dirigeante d’EELV.
Le voici (vous êtes priés de ne pas rire) : « Fessenheim : Europe Ecologie Les Verts salue les déclarations claires du Président de la République :
EELV salue l’engagement réaffirmé ce vendredi 25 janvier par le Président de la République de fermer la centrale nucléaire de Fessenheim au plus tard début 2017.
Ces déclarations lèvent les doutes qui avaient pu se faire jour à la suite de la publication, par le journal Le Monde, d’éléments de nature juridique relatifs à l’état de la centrale. Europe Ecologie Les Verts prend acte de la volonté claire du Président de la République et du gouvernement de maintenir la décision annoncée.
Dès lors, EELV regrette une nouvelle fois le maintien de travaux coûteux et inutiles sur une centrale programmée pour la fermeture (…) ».
Il faut tout de même rappeler que le 18 décembre 2012, en direct de Fukushima, à la question suivante posée par un internaute (à 43’30’’ de la vidéo) : « A votre retour de Fukushima allez-vous, enfin, réclamer l’application de l’accord EELV/PS ? », Pascal Durand avait tout de même répondu : « C’est une bonne question. « Enfin » c’est injuste car on le demande depuis le départ, et on le demande haut et fort, et je suis même allé le demander en tête à tête à Delphine Batho. Bien sûr ! on demande la fermeture immédiate de Fessenheim ! Elle a une valeur symbolique très forte. Mais je n’entends pas évidemment me contenter de ça.(…)Et je reviens de Fukushima avec une motivation encore plus forte alors qu’elle était déjà très forte. C’est un défi majeur »…
Sans commentaire.
Et puis le même jour survint une parole fortement dissonante :
Ce jour du 25 janvier 2013, qui pourrait devenir historique pour EELV, Denis Baupin, vice-président EELV de l’Assemblée nationale, publiait en effet le communiqué suivant :
« Fessenheim : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ?

Oui, donc, la centrale de Fessenheim présente des risques de sûreté importants, non seulement du fait de sa vétusté, mais aussi du risque de contamination de la nappe phréatique en cas d’accident, du risque d’inondation par le Grand Canal d’Alsace, et des risques de sismicité. C’est ce qui a conduit logiquement le Président de la République à décider de sa fermeture. Une fermeture qui doit bien sûr s’accompagner de toutes les mesures sociales indispensables pour sécuriser les parcours professionnels des personnels (notamment sur le site pour accompagner sa reconversion) et pour prendre en compte les impacts sur le territoire.
La fermeture de Fessenheim constituera une première en France. Raison de plus pour ne pas complexifier à l’excès la gestion de cette opération. C’est pourquoi nous estimons totalement contradictoire de continuer de dépenser des dizaines de millions d’euros sur un réacteur destiné à fermer à court terme, et ce d’autant plus qu’EDF a déjà menacé de demander des dédommagements à l’Etat en cas de fermeture de la centrale (oubliant d’ailleurs que depuis des décennies c’est le secteur nucléaire qui n’a survécu qu’à coup de subventions et dérogations aux règles accordées par la collectivité à ce seul secteur énergétique, et non l’inverse). Allons-nous, nous contribuables, devoir payer deux fois pour des travaux de toutes façons inutiles ?
J’ai interrogé le Président de la Cour des Comptes sur l’absurdité de cette dépense : il s’est malheureusement déclaré incompétent. J’ai interrogé le Président de la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) sur l’opportunité d’un débat public avant que de tels travaux conséquents soient engagés : lui aussi s’est malheureusement déclaré dans l’incapacité de s’auto-saisir. Il revient donc au gouvernement, actionnaire principal d’EDF, de choisir le parcours le plus simple pour fermer le réacteur : ne pas engager des travaux bien trop dispendieux au regard de la durée de vie du réacteur.
La pertinence de ces travaux pose d’ailleurs elle-même des questions très importantes. Les nouveaux dispositifs techniques introduits peuvent eux-mêmes fragiliser la sûreté du réacteur. Et ils posent des problèmes en matière de sécurité des ouvriers amenés à intervenir sur le site : l’arrêt du réacteur et son déchargement complet du combustible s’y trouvant apparaissent comme des préalables indispensables si on veut assurer leur radioprotection.
Au nom de la sécurité des salariés et de la sûreté nucléaire, au nom de la simplification des procédures comme de l’économie des deniers publics, choisissons de faire simple : reconnaissons la dangerosité de Fessenheim, arrêtons d’y investir à corps perdu, et fermons au plus vite cette centrale ».
Autrement dit une réaction pour le moins claire, et qui tranche on ne peut plus curieusement avec le communiqué officiel.
Avant cela d’autres responsables EELV n’avait pas été moins clairs. Ainsi Karima Delli, députée européenne, avait menacé par tweet : « Retour de Fukushima : ni silence, ni oubli, à jamais ! ». Et Michèle Rivasi, également députée européenne, dans ses vœux avait tonné : « Des engagements ont été obtenus sous l’impulsion des écologistes, ils doivent donc être appliqués à la lettre par le gouvernement ».
Là-dessus, hier, Noël Mamère (souvent il est heureux qu’il soit là…) en rajoutait une petite couche : « En regardant les centaines de milliers de manifestants défilant joyeusement pour défendre l’égalité des droits, je me disais que si l’on veut créer un rapport de forces utile au changement, on le peut. Et si l’on faisait de même avec le droit de vote des étrangers ? Pour demander la fin du contrôle aux faciès ? Le droit de mourir dans la dignité ? La fin des licenciements boursiers ou la transition énergétique, sans nucléaire et sans gaz de schiste… Elle aurait une autre gueule, la gauche, non ?
Avec EELV on n’est jamais à l’abri de surprises. Après la veulerie, le ridicule, peuvent tout à fait surgir des manifestations de profonde dignité.
Mais au final quelle est la direction d’EELV ?
La fermeté et la détermination en vue de la fermeture imminente de Fessenheim ?
Ou l’enfumage dont ils sont devenus spécialistes ?
(Un moyen peut-être de le savoir est de leur poser directement la question. Ce soir ont lieu les « 13 voeux pour 2013 d’Europe Écologie Les Verts, à partir de 18h30 au Pan Piper (2-4 impasse Lamier, 75011 Paris). Ils y invitent à un apéritif dînatoire en présence de Pascal Durand, des membres du Bureau exécutif, de Cécile Duflot, de Pascal Canfin et des parlementaires écologistes, ainsi que de différentes personnalités, militant-e-s, syndicalistes, associatifs, journalistes, politiques, chercheurs, etc. Il n’est pas nécessaire de s’inscrire », précisent-ils).
Crédit photos : auteurs inconnus (source : Google). Remerciements.
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