Baisse du chômage : le miroir aux alouettes
Les statistiques du chômage font apparaître une nouvelle baisse en avril : les demandeurs d’emplois représentent désormais 9,3 % de la population active, contre 9,5 en mars. Mais ces jolis chiffres dissimulent un marasme social qui perdure.
Jean-Louis Borloo, ministre de l’emploi et de la cohésion sociale, s’en félicite bruyamment et fait le tour des médias pour décerner à son action un brevet d’autosatisfaction, la plupart répercutant sa parole telle quelle, sans aucun recul ni analyse. Il y a pourtant plusieurs éléments à prendre en considération pour expliquer que cette baisse ne change rien au marasme social dans lequel se débattent les Français. Un rappel d’abord : le chômage demeure, aujourd’hui encore, et malgré 13 mois de baisse, à un niveau plus élevé que quand Jacques Chirac a été réélu en 2002. Deuxième mise au point, le contexte de durcissement du contrôle des chômeurs et les radiations et autres manips statistiques si bien dénoncées par une conseillère de l’ANPE,
Fabienne Brutus (photo ci-contre), dans son livre Chômage, des secrets bien gardés. Ensuite,
ce qu’on nous présente comme une embellie est essentiellement dû au "traitement social" : au total, près de 285 000 personnes bénéficient d’un emploi aidé non marchand (contrat d’avenir ou d’accompagnement dans l’emploi), alors que la création d’emplois marchands baisse, de 30 000 au 4e trimestre 2005 à 20 000 au 1er trimestre 2006. Mentionnons aussi 452 000 contrats nouvelle embauche, dont on ignore combien d’entre eux n’auraient pas été conclus sous une forme moins pénalisante et précaire pour le salarié (une femme enceinte vient encore de se faire licencier !). Ensuite, une étude de l’Insee lève le voile sur le paysage réel de l’emploi en France : plus d’un million de salariés ont plusieurs employeurs, ce qui "va de pair avec des salaires très bas et une durée de l’emploi principal très faible". 1 126 000 personnes plus précisément, 4,8 % des salariés. Sont principalement concernés des assistantes maternelles, des aides à domicile ou des employés de maison. On a donc d’une part des emplois aidés, et de l’autre, une explosion du nombre de gens qui travaillent mais ne parviennent pas pour autant à en vivre, les "travailleurs pauvres". Sans mentionner les RMIstes, dont les deux tiers ne sont pas inscrits à l’ANPE et n’apparaissent donc pas dans les belles statistiques de Jean-Louis Borloo. Une dérive à l’anglo-saxonne, modèle tant vanté par nos ultra-libéraux, tel qu’un Nicolas Sarkozy, par exemple, rêve de transposer en France. On y arrive.
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