« Bourrage de crânes » aux Invalides ?
Un discours qui reprend toutes les vieilles ficelles de la propagande de guerre.
Quelles que soient l’opinion que l’on a sur l’engagement des forces françaises en Afghanistan, il n’empêche que le discours prononcé par M. Sarkozy à l’Hôtel des Invalides le jeudi 21 août 2008 fait immanquablement penser aux grandes figures de la propagande de guerre amplement utilisées lors de la "Grande Guerre".
D’abord, tout au long du discours, le recours premier au registre de l’émotion "chagrin, tristesse, pleurs,..." devant laquelle toute réflexion un peu critique paraît obscène...
Ensuite, la justification classique des buts de guerre au nom de la défense des grandes valeurs :
En 1914, l’Allemagne était l’agresseur, elle avait violé le Droit, la France se battait au nom des Droits de l’Homme, de la civilisation...
Aujourd’hui :
"Ils ont donné leur vie loin de leur pays pour faire leur devoir, pour la liberté des droits de l’Homme, pour des valeurs universelles qui sont au cœur de notre République."
"En Afghanistan, vous avez travaillé pour la paix."
"la France n’est pas non plus un pays comme les autres. Elle est membre permanent du Conseil de sécurité. Elle a en charge, avec les autres pays du monde, je veux dire les grands pays, la responsabilité de la paix dans le monde."
"vous vous battiez là-bas contre le terrorisme. Terrorisme qui a ravagé des familles sur le sol de la République française et qui, pour une large part, prend naissance là-bas où vous et vos camarades avez combattu courageusement".
La diabolisation de l’ennemi :
En 1914-18, le soldat allemand bombardait les civils, utilisait des boucliers humains, tuait des otages, était un barbare...
Aujourd’hui :
"Vous étiez engagés en Afghanistan dans un combat contre la barbarie, l’obscurantisme et le terrorisme".
"Nous n’avons pas le droit de laisser les barbares triompher".
"Dans ce pays qui était ravagé par la guerre, aux mains d’un régime moyenâgeux qui avait donné et qui donne encore, hélas, asile au terrorisme international, qui opprimait sa population et qui bafouait les droits les plus élémentaires de la personne, et notamment des femmes".
La glorification du sacrifice :
En 1914-18, on ne compte pas les images de glorification du sacrifice, la journée du poilu, les marraines de guerre, le soldat inconnu...
Aujourd’hui :
"vous avez lutté des heures entières avec une bravoure et une ténacité qui forcent l’admiration".
"Et pourtant donner sa vie avec honneur, c’est réussir sa vie".
"Dix qui sont tombés en allant jusqu’au bout de leur engagement".
"Ils ont donné leur vie loin de leur pays pour faire leur devoir".
On pourra se reporter notamment à la description de ce jeu de l’Oie pour vérifier les affirmations concernant la permière guerre mondiale.
Une différence notable cependant :
Le "Je" présidentiel, utilisé 27 fois (dont 11 "je veux" et 4 "je sais"), loin devant la Nation, la France ou la Patrie... et cette phrase étonnante :
"Je veux dire devant vos familles, à ce moment précis où je vous parle, jamais à quel point, je n’ai mesuré ce que peut être la solitude d’un chef de l’Etat face aux décisions qu’il doit assumer." Où le chef de l’Etat semble incapable de s’empêcher de mettre en avant sa "souffrance" même devant les dix cercueils des soldats....
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