Cas Woerth, lapidation médiatique ou justice affranchie ?
C’est une rentrée pourrie pour le ministre du Travail, alors même que les manifestants n’ont pas encore foulé le bitume par millions. Le coup est parti hier dimanche 29 août 2010. On apprenait que Jean-Louis Nadal, procureur général près de la Cour de cassation, avait réclamé au parquet général de Versailles de lui transmettre les pièces du dossier Woerth, avant une hypothétique saisine de la Cour de justice de la République (CJR). Saisi par un courrier de Corinne Lepage, Jean Louis Nadal souhaite étudier les pièces, pour estimer si des infractions présumées de prise illégale d’intérêt et de délit de favoritisme seraient constituées.
Eric Woerth encaisse cet énième souci dominical, pour rebondir ce lundi en attaquant les médias – « je subis depuis deux-trois mois une sorte de lapidation médiatique assez impressionnante » – avec une posture victimaire qui frise le ridicule : « c’est un peu une chasse à l’homme, comme il existe ici des chasses à courre. Sauf que c’est moi qui joue le rôle du cerf ».
La réaction de Woerth est teintée de mauvaise foi, pour ne pas dire inaudible. Car au fond, ce ne sont que les rouages d’une justice indépendante qui se mettent en branle. On comprend que Woerth ait peur de JL Nadal. Procureur général près de la Cour de cassation, ce dernier a fait montre d’indépendance et de pugnacité lors de la rentrée solennelle de la cour de cassation en janvier 2010. Peiné, comme tous ses pairs d’avait été compté parmi le « petits pois » par Nicolas Sarkozy à la même rentrée de 2009, JL Nadal a savouré sa revanche institutionnelle un an plus tard. Revêtu de son hermine, le magistrat qui est l’un des plus hauts placés du pays, a brandi le carton jaune. « L’obstacle » à la suppression du juge d’instruction « n’est plus politique mais bien juridique », a-t-il averti. Cela ressemblait un canardage en règle de la réforme annoncée un an plus tôt par Nicolas 1er. Maître Eolas parlait de rififi à la cour de cass ;-)
Cet épisode est utile pour rappeler que le procureur Nadal n’est pas un docile. Et contrairement à l’ami de l’omniprésident, le procureur Philippe Courroye qui pilote l’enquête sur l’affaire Woerth/Bettencourt, Nadal est très attaché à l’équilibre des pouvoirs indissociable d’une démocratie.
Eric Woerth ne peut bien entendu par attaquer de front, la Cour de Cass et son procureur général, pour s’être saisi de cette affaire. Alors, il crie seul à la chasse à l’homme, à la lapidation médiatique, … En fait, Woerth a peur de ce qui va sortir des cartons pour atterrir dans les mains rebelles de Nadal. Et s’il crie si fort, c’est sans doute qu’Eric Woerth a très peur. Car enfin, question lapidation, nous ne sommes pas en Iran… Eric Woerth devrait garder ses nerfs et savoir raison garder, une justice indépendante qui avance même en Sarkozie n’est pas une chasse à l’homme.
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