De Gaulle vs Mitterrand
Qu’est-ce qui sépare l’un de l’autre à part la réponse spontanée : ‘tout’ ?
Au cours des années 1940-41-42 quelques dizaines de milliers de Français sur 41,6 millions estimèrent qu’il était de leur devoir de résister à la plus organisée des barbaries jamais connues. Vers la fin de la guerre, on comptera 300 000 résistants : moins de 1% de la population aura finalement pris part à la résistance.
L’appel du 18 Juin 1940 prononcé par le général de Gaulle sur les ondes de la BBC à Londres essaya de fédérer les élans. Ce discours fut très peu entendu sur le moment. Il donna lieu à une publication reprise par quelques journaux français. Fin juillet 1940, un peu plus de deux mille cinq cent personnes l’auront rejoint : « Une poussière de soldats ».
Aux élections qui suivirent la guerre, les communistes recueillirent 26,2% des voix, les démocrates-chrétiens 23,9%, les socialistes 23,4%. De Gaulle dirigera brièvement le pays après la Libération, mais favorable à un pouvoir exécutif fort, il s’oppose aux projets parlementaires et démissionne en 1946. Il revient au pouvoir en mai 1958, dans les remous de la guerre d’Algérie.
Il édicte une nouvelle constitution, il refuse la domination des États-Unis en mettant en avant une force nucléaire autonome, il pose son véto à l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE (future UE), il met en place le programme spatial français, il accorde l’indépendance à l’Algérie tout en perdant le soutien d’anciens combattants luttant pour l’Algérie française, il est la cible d’attentats terroristes de l’OAS, il réprime peu avant l’indépendance de l’Algérie des manifestations animées par le FLN, les harkis, désarmés par la France, sont abandonnés à leur sort, il instaure le suffrage universel direct pour l’élection présidentielle, il promeut l’Europe des Nations, il fait rapatrier la part de l’or de la Banque de France déposé à New York à la Banque fédérale de réserve…
Il surmonte les ‘événements’ de Mai 68, puis engage son mandat par un référendum en 1969 sur la réforme du Sénat et la régionalisation. La victoire du ‘non’ conduira à sa démission.
F. Mitterrand s’engage en politique après la Seconde Guerre mondiale au sein de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance considéré comme un parti socialiste libéral. Il sera député de 1946 à 1958, puis sénateur de 1959 à 1962 et à nouveau député de 1962 à 1981, il est onze fois ministre sous la IVe République. Candidat du Parti socialiste à l’élection présidentielle de 1981, il est élu au second tour face à Valéry Giscard d’Estaing. Il sera réélu en 1988.
Après avoir conduit une vague de nationalisations et impulsé une augmentation de 27% des dépenses publiques, il met en oeuvre un ‘tournant de la rigueur’ afin de se conformer à une ‘culture de gouvernement’.
Il abolira la peine de mort, autorisera des radios locales privées, créera la Haute Autorité pour la communication, fera passer la majorité sexuelle à 15 ans pour tous, abolissant ainsi la distinction entre rapports homosexuels et hétérosexuels, procédera à la régularisation des étrangers en situation irrégulière, initiera la décentralisation administrative, créera les zones d’éducation prioritaire, supprimera les notions de ‘bonne moralité’ et de ‘bonnes mœurs’ du statut général des fonctionnaires, créera les premières chaînes de télévision privées, instaurera (provisoirement) un scrutin proportionnel aux élections législatives, fera une loi pour limiter le cumul des mandats, créera le revenu minimum d’insertion (RMI), fera une loi interdisant les propos négationnistes et luttant contre le racisme, interdira les écoutes administratives, délocalisera certains organismes publics en banlieue parisienne, ramènera le service militaire à 10 mois, fera un moratoire sur les essais nucléaires, fera une loi condamnant l’entrave à l’interruption volontaire de grossesse (IVG) et dépénalisant l’avortement…
L’un aimait la France, l’autre voulait être aimé des Français. Aimer, être aimé, l’un est-il compatible avec l’autre lorsqu’on s’adresse à un peuple ?
C’est François Mitterrand, avec beaucoup d’autres, qui a fait école en France comme ailleurs et qui a imposé un mode d’action aux démocraties. Gagner les élections implique de satisfaire les droits ou/et les appétits du plus grand nombre. Les processus électoraux demandent des trésors d’imagination pour séduire et convaincre les foules. Un savant mélange de convictions et de rouerie est proposé lors des votations actuelles : revenu universel (d’activité ou pas), abaissement des droits de succession, augmentation du SMIC, prime à l’emploi, allocation logement, prime de Noël, indemnité inflation, prime de pouvoir d’achat, prime « Coup de pouce Chauffage et/ou Isolation », allègement d’impôts, suppression de l’ISF, baisse de cotisations salariales, patronales, suppression de la taxe foncière, baisse de la TVA…
Pourtant les bénéfices de l’instant ne permettent pas d’obtenir le respect de tous par chacun si un partage, même minime, du pouvoir n’est pas mis en place.
Le Général de Gaulle a constaté en son temps que les gens fortunés ne l’avaient pas rejoint à Londres : « Les possédants sont possédés par leurs possessions ». En 1948 il énonce que : « Nous, peuple français, nous voulons que les travailleurs deviennent des sociétaires, au lieu d’être des salariés. », ce qui entraînerait que les cadres, les chefs, les ouvriers devraient pouvoir fixer ensemble entre égaux leurs conditions de travail. En 1967, le général de Gaulle signera une ordonnance qui instaurera la participation pour les entreprises de plus de 100 salariés (50 salariés depuis 1990) si elles ont réalisé un bénéfice.
En France, les sociétés du CAC40 versent 68,2 milliards de dividendes à leurs actionnaires soit plus des deux tiers de leurs bénéfices. À peu prés deux millions et demi de travailleurs touchent le SMIC (1269,45€ net par mois) et six millions de personnes vivent de minima sociaux. Si la totalité des dividendes était versée aux personnes qui en ont le plus besoin, ceci représenterait 668€ par mois pour l’ensemble des personnes concernées. Il reste à déterminer les parts respectives du travail et du capital. De plus, la participation des salariés aux conseils d’administration permet l’accès à la dignité en plus des apports financiers précédents.
Aimer la France c’est surtout aimer l’égalité de respect et de traitement entre tous ceux qui la constituent. Aimer les Français c’est distribuer des subsides aux plus méritants quelquefois, aux plus bruyants souvent.
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